Les tendances d'un phénomène transfrontalier
Le Goethe Institute vient d'organiser un débat sur le phénomène des couples mixtes. Au tour de la table, le sociologue allemand David Glowsky, l'économiste sénégalais Felwin Sarr, et Hélène Ndiaye, anthropologue française d’origine sénégalaise...
La mixité était jeudi dernier l'hôte du Goethe Institute où plusieurs chercheurs d'horizons divers ont entretenu le public sur le thème : «Pourquoi les hommes allemands se marient-ils à des femmes de pays moins prospères ?» Se servant de plusieurs diapositives pour étayer ses idées, David Glowsky, sociologue allemand, a fait appel à certaines notions économiques pour expliquer les tendances prises par les relations conjugales entre Allemands et Africaines. «Les hommes allemands, vieux et/ou moins attirants, prennent la direction de l’Afrique pour prendre des filles minces, jeunes, pleines de vivacité, parce qu’ils sont dans des difficultés de se marier chez eux», indique Glowsky dans sa présentation de ce phénomène. S'appuyant sur les moyennes d'âge pour le mariage en Allemagne (28 ans) et au Sénégal (20 ans), Glowsky a souligné que cette différence montre le rapport important que le «marché matrimonial» entretient avec celui de son pays. A cet effet, il a rapporté des exemples sur les indices de développement du taux de mariage dans les deux pays en parlant de la théorie du choix rationnel.
L’économiste Felwin Sarr, abondant dans le même sens, a tout de même redéfini la relation cause à effet de l’amour dans les couples mixtes. ‘’L’amour est une valise, il peut tout contenir. Néanmoins, il faut le définir avec prudence», a suggéré l’universitaire. Issue d'un couple mixte, Hélène Ndiaye a réalisé une étude basée sur des enquêtes concernant ces unions «particulières». Elle a expliqué les nombreux problèmes que rencontraient ces dits couples, en France par exemple, sur la gestion quotidienne de leur vie privée. ‘’Ils sont souvent soumis aux enquêtes policières. Le procureur même fait des enquêtes pour détourner le ou la français(e) à ne pas se marier avec des étrangers de peur de créer un problème dit de communautarisme», a-t-elle souligné. Selon elle, le climat de suspicion devient de plus en plus fort à l’égard des couples franco-étrangers. La police s’immisce dans la vie privée de ces couples sans aucune réserve avec comme prétexte le souci de faire la chasse aux mariages complaisants qui donnent droit à des papiers de séjour. Ces arguments sont issus d’un court métrage d'une dizaine de minutes qui mettent en scène quatre couples mixtes qui relatent leurs difficultés au jour le jour.
Ainsi, c'est Jeannie qui affirme avoir subi des pressions durant 2h30 de la part d'un magistrat procureur qui le dissuadait de se marier avec un étranger. Intervenant dans le débat, le Pr Maguèye Kassé soutient qu’il n’y a pas de sociétés homogènes. Autant la France ne veut pas que son peuple se mixte avec les Africains, autant les Africains font de même/ A voir. A Saly, rappelle-t-il, des jeunes passent tout leur temps à faire des body building et finissent, pour certains d'entre eux, à séduire de vieilles européennes.
Le débat était intense avec des échanges profonds, fondés sur l’analyses des faits de société d’ici et d’ailleurs. Les deux exposants ont eu le mérite de toucher à des sujets chauds et amers qui font souvent appel à la question du racisme.
Mariétou Kane (stagiaire)