Publié le 2 Nov 2020 - 14:51
NOMME A LA TETE DU CESE

Idrissa Seck se justifie  

 

Nommé président du Conseil économique, social et environnemental (Cese) depuis hier, en remplacement d’Aminata Touré, Idrissa Seck a organisé un point de presse, chez lui au Point E, pour donner les raisons qui l’ont poussé à accepter ce poste.  

 

La liste des nouveaux membres du gouvernement du Sénégal est connue depuis hier. Même si elle suscite des réactions, elle n’a pas forcément été au centre des débats. C’est plutôt la nomination du leader du Rewmi, Idrissa Seck, à la présidence du Conseil économique, social et environnemental (Cese) qui a suscité explication, interrogation et analyse. Beaucoup de Sénégalais ne s’attendaient, apparemment pas, à ce retour d’Idy aux affaires. Comme pour répondre à ceux qui lui rappelaient son choix de ne plus occuper de poste nominatif le restant de sa vie ou sa promesse de campagne à la Présidentielle de 2019 de supprimer le Cese, Idrissa Seck a fait face à la presse, hier. 

Ainsi, il dit être convaincu qu’aujourd’hui, il faut ‘’une union de l’ensemble des forces de la nation, pour mieux faire face aux défis du moment’’. ‘’J’ai choisi le chemin d’une implication directe et personnelle pour participer aux efforts qui nous incombent à tous, pour redresser la situation de notre pays’’, a-t-il dit. Une situation consécutive à ‘’une analyse lucide, sereine du contexte international, sous-régional et national’’ qu’il aurait faite. Ce, après plusieurs mois d’échanges dans le cadre du dialogue national et au cours de plusieurs rencontres en tête-à-tête avec le président de la République Macky Sall.

Aussi, a-t-il relevé, ‘’dans notre sous-région, des conflits et des tensions extrêmement vives déchirent les classes politiques. Il nous appartient de rendre grâce qu’au Sénégal, au moyen d’une discussion sereine, longue, profonde dans plusieurs cadres, notre classe politique, qui représente 85 % de l’électorat, soit parvenue à s’entendre pour mieux prendre en charge les défis du pays.’’ Ce, bien que d’autres personnes aient suggéré de choisir un autre chemin.

Il tacle l’opposition radicale

Il s’agit, selon l’ex-maire de Thiès, de celui ‘’d’une opposition radicale, tentant d’utiliser les interrogations et les inquiétudes légitimes des populations et en particulier de la jeunesse, nées du contexte de crise, pour fragiliser le régime en place et en tirer des gains politiques immédiats’’. ‘’Je respecte leur intelligence et leur analyse, mais je n’ai pas choisi ce chemin-là’’, a-t-il indiqué.  Même s’il ne le cite pas, c’est un tacle à peine voilé sur le leader de Pastef-Les Patriotes, Ousmane Sonko.

Par ailleurs, la crise sanitaire actuelle serait également l’une des raisons qui l’ont poussé à accepter ce poste qui fait aujourd’hui de lui la 3e personnalité de l’Etat.  ‘’Ce n’est un mystère pour personne que les plus grandes économies, nos plus grands partenaires, ont souffert et souffrent encore de la Covid-19 et de son cortège de conséquences économiques et sociales’’. Aux Etats-Unis, première puissance mondiale, ‘’des millions de personnes sont en train de perdre leur emploi et de perdre leur maison, faute de pouvoir payer leur échéance’’, a-t-il rappelé. Le même scénario se déroule en Europe où, a-t-il dit, plusieurs Sénégalais vivent. C’est pour cela d’ailleurs, à l’en croire, que ‘’le premier impact pour nous, est que les transferts de notre diaspora en direction du pays ont connu une chute considérable. Au point que les transferts inverses du pays vers notre diaspora soient devenus nécessaires’’.

Dans ce contexte, avoir un Conseil économique, social et environnemental est plus que nécessaire, suivant son analyse.

En outre, le nouveau président du Cese a fait appel à toute la population sénégalaise pour faire face aux défis auxquels le pays est confronté. ‘’Qu’on ne s’y trompe pas. La classe politique seule n’y suffira pas. La situation exige que toutes les filles et tous les fils du pays soient mobilisés et tendus vers le même but : redresser notre économie, rééquilibrer notre société, consolider la paix civile et la stabilité de notre pays qui est, qu’on le dise ou non, l’un des rares îlots de stabilité dans notre sous-région’’, dit-il. ‘’Et nous devrons également assumer notre responsabilité en direction de nos autres pays frères pour consolider la stabilité là où des conflits politiques ont déchiré la classe politique’’, a-t-il appelé.  

MOUSSA DIAW (ENSEIGNANT EN SCIENCE POLITIQUE A L’UGB)

‘’Ce remaniement est éminemment politique’’

Le gouvernement mis en place hier n’a pas répondu aux attentes des Sénégalais, semble dire le Pr. Moussa Diaw. L’enseignant en science politique à l’université Gaston Berger de Saint-Louis estime que c’est plutôt des solutions politiques que le chef de l’Etat a tenté d’apporter, notamment à travers son rapprochement avec Idrissa Seck.

Le chef de l’Etat a publié, hier, la liste de son nouvel attelage gouvernemental, marquée par l’entrée du parti Rewmi. Comment analysez-vous cette nouvelle donne ?

Apparemment, c’est l’événement majeur de ce remaniement pour lequel on attendait des changements profonds en termes politiques, socioéconomiques et judiciaires, mais finalement, on est resté sur notre faim. Le changement n’a pas eu lieu. Il y a eu plutôt des arrangements politiques qui ont permis à Idrissa Seck de se rapprocher de la majorité et de lui confier le poste du Conseil économique, social et environnemental, en plus de deux postes de ministre pour Rewmi. C’est une déception par rapport à toute l’attente qu’on avait de ce gouvernement.

Compte tenu de la conjecture et du contexte actuel, avec les problèmes qu’il y a eu dans le domaine du foncier, de la justice, des problèmes des jeunes sans espoir qui prennent beaucoup de risques pour aller vers l’Europe, on pensait que cela allait constituer le socle pour le président de la République. Que ce dernier allait apporter des éléments de réponse qui puissent constituer une politique de la jeunesse en matière de création d’emplois pour susciter l’espoir.

On nous dit qu’il y a des jeunes, mais, de façon globale, ce que l’on attendait, c’est une politique de jeunesse.  

Quand on regarde le gouvernement, c’est plutôt des solutions politiques, avec ce rapprochement avec Idrissa Seck qui lui permet de rebondir. On a entendu sa justification par rapport à son rapprochement avec la majorité, qui traduit qu’il est dans une nouvelle alliance. Cette alliance pour faire quoi ? Avec quelle perspective ? Et peut-être que derrière tout cela, il y a des stratégies qui sont posées.

Quelles sont, selon vous, les perspectives politiques d’Idrissa Seck ?

Idrissa Seck, actuellement, on lui a donné cette perspective de revivre politiquement. Il avait choisi une stratégie qui l’avait complètement éliminé et l’avait mis pratiquement dans l’ombre. Il intervenait de façon ponctuelle pour dire certaines choses sur l’actualité, sans prendre une réelle position qui puisse gêner la majorité. 

Maintenant, on lui a donné cette possibilité de rebondir, parce qu’aussi, au Conseil économique, social et environnemental, il y a des ressources et un fonds politique. Il peut redistribuer et permettre à Rewmi de se remettre en scène, parce qu’il était en léthargie. C’est l’occasion pour lui de rebondir et d’exister. Lui-même a dit qu’on avait signé sa mort politique, mais politiquement, on n’est jamais mort. Il vient de faire la preuve.

Il se justifie par des raisons d’implications politiques. Il a dit qu’il avait un autre choix, mais a choisi celui-là qui semble être le plus judicieux pour travailler pour le pays. Il fallait qu’il se justifie et il l’a fait. Est-ce qu’il va continuer à intervenir, à occuper la scène politique ? C’est la grande question. Il est certain que des membres de l’Alliance pour la République ne verront pas ça d’un bon œil, surtout ceux qui ont des ambitions politiques.  

Est-ce qu’on peut s’attendre à ce qu’Idrissa Seck remplace Macky Sall en 2024 ?

Pour l’instant, on ne sait pas pourquoi. Il y a eu des négociations et il a accepté de rejoindre la mouvance présidentielle. S’il a accepté, c’est parce qu’il a négocié avec le président. En tout cas, il y a des actes politiques qui ont été posés. Ce remaniement est éminemment politique, plutôt que social ou économique, et c’est là où on l’attendait.

Qu’est-ce que ces deux leaders peuvent gagner de cette fusion ?

C’est Idrissa Seck qui va gagner plus. Macky Sall va un peu tempérer le climat politique. Est-ce que tout cela va contribuer à maitriser le jeu politique à l’intérieur de sa majorité ? Est-ce qu’il ne va pas provoquer un séisme au niveau de sa majorité ? Il y a des ministres qui ont été limogés ; est-ce qu’ils vont accepter de se taire ? Et les cadres de l’APR, vont-ils accepter de ne rien dire, en voyant Idrissa Seck occuper le terrain ? Est-ce que cela ne va pas susciter une opposition à l’intérieur de l’APR ?

Si tel est le cas, on va vers des déchirements et ça risque de poser d’énormes problèmes et faire de l’ombre à d’autres qui avaient d’autres ambitions politiques au niveau de la majorité, notamment de l’APR.

‘’EnQuête’’ avait fait un article sur le gouvernement élargi. A l’époque, vous trouviez qu’un tel gouvernement n’est pas pertinent. Avec cette nouvelle composition…

Un gouvernement élargi ne changera rien du tout. Intégrer Idrissa Seck et quelques ministres, prendre des ex du PDS ne va rien changer par rapport à la politique menée. A mon avis, on n’est pas dans une logique de bouleversements, mais de continuité en innovant un peu. Cette innovation est plutôt politique et cela ne permet pas un changement politique. Je pense surtout à l’opinion politique, aux Sénégalais qui vont penser à une sorte d’arrangement politique entre Idrissa Seck et Macky Sall. Même pour le statut de l’opposition, Macky Sall avait pensé à Idrissa Seck. Maintenant, la donne va changer, le rapport de force aussi. Malheureusement, les vraies questions que se posent les Sénégalais n’ont pas encore trouvé de réponse, avec ce remaniement.

Selon vous, quelle sera la nouvelle carte de l’opposition sénégalaise ?

L’opposition va changer. Il y a une nouvelle donne. Idrissa ne va plus rester dans l’opposition ; il a choisi son camp. Il a dit lui-même qu’il avait deux propositions : celle de rester avec l’opposition offensive et celle qui consiste à collaborer et à participer à l’action gouvernementale. Mais cela ne changera pas grand-chose, parce qu’on met en avant la politique plutôt que les autres dimensions qui sont capitales, qui sont d’ailleurs prioritaires par rapport aux différents enjeux qu’attendent les Sénégalais, surtout la jeunesse. On attendait quelque chose de très fort, mais il n’a pas eu lieu et c’est un peu décevant par rapport au changement qu’on a eu.

HABIBATOU TRAORE

BABACAR SY SEYE

 

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