La défense s’attaque aux violations combinées des articles 71 et 167
Dénonçant une violation combinée des articles 71 et 167 du Code de procédure pénale dans le réquisitoire introductif de l’agent judiciaire de l’Etat, les avocats de Khalifa Ababacar Sall ont exigé, hier, des conseillers près la Chambre criminelle de la Cour suprême, la cassation du verdict rendu sur l’affaire de la caisse d’avance.
Le verdict rendu d’abord en première puis en deuxième instance dans l’affaire Khalifa Sall, a longuement fait objet de débat, hier, à la Chambre criminelle de la Cour suprême du Sénégal. Les conseils de l’ancien maire de Dakar, dans leur mémoire dont ‘’EnQuête’’ détient copie, ont étayé tous les exceptions et moyens soulevés dans leurs requêtes aux fins de cassation dirigés contre les arrêts n°382 en date du 10 juillet 2018, n°398 du 18 juillet 2018, n°399 du 18 juillet 2018 et n°454 du 30 août 2018 de la Cour d’appel de Dakar. Il est ainsi reproché à ce dernier arrêt d’avoir refusé d’annuler le réquisitoire introductif du procureur de la République pour violation des dispositions combinées des articles 71 et 167 du Code de procédure pénale, après avoir annulé le procès-verbal d’enquête préliminaire sur lequel se fonde ledit réquisitoire qui le vise expressément. Cela, au motif que ledit réquisitoire se fonde aussi sur le rapport de l’Inspection générale d’Etat (Ige). Ce qui lui a permis de limiter la portée de l’annulation du procès-verbal d’enquête préliminaire sur le fondement de l’article 166 du Code de procédure pénale.
Alors que, soulignent les conseils de Khalifa Sall dans leur mémoire, l’article 167 du Code de procédure pénale interdit à tout juge de se fonder sur une pièce de procédure qui puise un renseignement dans une pièce annulée. Ce qui est, selon eux, le cas du réquisitoire introductif qui vise expressément le procès-verbal d’enquête préliminaire auquel il prie par son visa, le juge d’instruction, pour son exposé et analyse des faits qu’il devait viser obligatoirement, de bien vouloir s’en rapporter.
D’ailleurs, relèvent les avocats de la défense, l’agent judiciaire de l’Etat, dans son mémoire en réponse en date du 23 octobre 2018, sur la violation des articles 71 et 167 du Code de procédure pénale, a invoqué deux jurisprudences pour conforter la thèse selon laquelle le fait pour le réquisitoire introductif de juger des pièces suffit au juge comme élément d’analyse des faits. Selon l’agent judiciaire de l’Etat, la chambre criminelle juge que le visa dans le réquisitoire introductif équivaut à une analyse desdites pièces. Or, relèvent les avocats de l’ancien maire de Dakar, l’article 167 susvisé interdit aux magistrats à peine de forfaiture de puiser aucun renseignement dans le procès-verbal d’enquête préliminaire.
‘’Qu’il s’ensuit que l’arrêt susvisé a violé de façon incontestable et reconnue les dispositions de l’article 167 du Code de procédure pénale, en maintenant dans la procédure un acte entaché de nullité, à savoir le réquisitoire introductif qui vise ou qui s’appuie sur un acte ou procès-verbal d’enquête préliminaire, annulé et auquel il lui est expressément interdit de puiser un quelconque renseignement ; l’arrêt n°454 du 30 août 2018 encourt incontestablement la cassation pour avoir annulé le procès-verbal d’enquête préliminaire et maintenu dans la procédure le réquisitoire introductif qui se réfère à un procès-verbal annulé et retiré du dossier, en violation de l’article 167 du Code de procédure pénale’’, écrit Me Moustapha Ndoye, avocat à la Cour.
Le réquisitoire introductif devant suivre obligatoirement le sort de l’acte annulé sur lequel il a puisé des renseignements qu’il a soumis au juge d’instruction qui, de ce fait, a été irrégulièrement saisi, Me Moustapha Ndoye poursuit que la violation des dispositions combinées de l’article 71 qui prévoient que le réquisitoire introductif doit viser les faits objets des poursuites et celles de l’article 167 qui interdisent aux magistrats de puiser des renseignements dans un acte annulé, est rigoureusement établie.
Dès lors que les faits visés et analysés par emprunt dans une pièce annulée sont nuls, inexistants et interdits d’évocation, lui et ses collègues de la défense ont demandé aux conseillers près la Chambre criminelle de la Cour suprême de faire droit aux exceptions et moyens de cassation exposés dans leur mémoire.
ASSANE MBAYE