Les exécutions en baisse dans le monde
Le bureau Afrique de l’Ouest et du Centre d’Amnesty International a procédé hier à la publication du rapport annuel sur la peine de mort dans le monde l’an dernier.
Amnesty International est toujours en croisade contre la peine de mort. Pour 2016, janvier à décembre, l’organisme, qui a présenté ‘‘des estimations a minima’’, s’est félicité d’une diminution de 37% du nombre d’exécutions dans le monde. ‘‘Au moins, 1 032 personnes ont été exécutées, dans 23 pays, soit 602 de moins qu’en 2015’’, s’est félicité le directeur du bureau régional d’Amnesty, Alioune Tine. Une baisse qui cache une contradiction, puisque le nombre de nouvelles condamnations à mort recensées l’année dernière est en hausse significative : 3 117 dans 55 pays, confirme le chef du bureau.
USA, Bénin, Guinée adoubés
Le rapport fait état de commutation de peines de condamnés à mort ou de grâce dans 28 pays en 2016. Parmi les bons élèves, la première puissance mondiale obtient les encouragements d’AI. Bien que 2 832 personnes se trouvent encore dans les couloirs de la mort aux USA, le pays quitte le top 5 d’un classement peu envieux. ‘‘Pour la première fois, depuis 2006, les Etats-Unis ne font pas partie des cinq pays ayant exécuté le plus grand nombre de condamnés’’, se félicite M. Tine. Pis, ou mieux, en 2016, l’Oncle Sam, avec 20 exécutions, a connu la plus faible application de la peine capitale depuis 26 ans ; alors que le nombre de condamnations (32) est le plus faible depuis 1973. ‘‘Ce qui montre que les juges, les procureurs et les jurés se détournent de la peine de mort comme moyen de rendre la justice’’, selon le chef d’Amnesty.
Toutefois, le directeur du bureau régional émet quelques réserves sur le cas étasunien. ‘‘Il faut continuer de se battre pour que cela continue. Les exécutions pourraient reprendre en force en 2017’’, avertit Alioune Tine. Pour l’Afrique subsaharienne, la réduction significative du nombre d’exécutions est un motif de satisfaction. ‘‘22 exécutions ont été enregistrées contre 43 en 2015’’, se félicite la directrice régionale adjointe, Samira Daoud. L’autre avancée est que deux pays ont supprimé la peine capitale à savoir le Bénin dont la Cour constitutionnelle l’a abolie dans les faits, et la Guinée dont le nouveau Code pénal l’a supprimée pour les crimes ordinaires. Une tendance stationnaire, puisqu’en 2015, deux autres pays avaient également renoncé à la peine capitale à savoir Madagascar et la République du Congo.
La Chine, tête de peloton
Quand Amnesty International décerne les mauvais points, l’Empire du milieu est très sévèrement coté. Les données sur l’exécution de la peine capitale y sont secrets d’Etat (ainsi qu’au Vietnam). ‘‘La Chine a exécuté plus de personnes que le reste du monde combiné’’, déclare Alioune Tine pour qui le rôle de premier plan que ce pays veut jouer à l’international exige une transparence totale dans ses données judiciaires, au même titre que celles économiques. ‘‘Le gouvernement chinois a reconnu qu’il était en retard en matière d’ouverture et de transparence judiciaire, mais il persiste à cacher activement la véritable ampleur des exécutions’’, dénonce-t-il. Si les chiffres ne sont pas officiels, ‘‘les articles publiés par les médias font état de 931 exécutions, entre 2014 et 2016. Mais 85 seulement figurent dans la base de données’’, dénonce M. Tine. Le deuxième lot est constitué des pays arabo-musulmans, comme l’Arabie Saoudite, l’Irak, le Pakistan ainsi que l’Iran qui totalisent, en dehors de la Chine, 87% des exécutions.
En Afrique subsaharienne, la reprise des exécutions par le Nigeria et le Botswana, après un arrêt de trois ans, ‘‘est un mauvais signal’’, selon la directrice régionale adjointe, Samira Daoud. Mais, ce qui inquiète plus ces responsables d’Amnesty International, ce sont les implications de la guerre contre le groupe armé islamiste Boko Haram dont les gouvernements camerounais et nigérian adoptent une position défensive lourde de conséquences pour l’abolition de la peine de mort. Aussi, le géant ouest-africain a vu ses tribunaux prononcer 527 condamnations à mort, en 2016, alors qu’au Cameroun, les tribunaux militaires ont prononcé au moins 160 condamnations de personnes suspectées d’appartenir à la secte dans la ville de Maroua, explique Samira Daoud