Publié le 21 Mar 2020 - 16:50
SENSIBILISATION CONTRE LA PROPENSION DE LA COVID19

Les patrons de presse réclament leur part du budget de guerre 

 

Avec ses 38 cas enregistrés en moins d’un mois, le Sénégal reste le pays le plus touché par la covid-19 en Afrique de l’ouest et fait, en même temps, partie des 5 Etats qui ont une contamination communautaire. Pour faire face à la propagation de la maladie, les autorités veulent miser sur la sensibilisation, avec comme premier partenaire la presse, afin d’atteindre les cibles. A cet effet, les patrons ont rencontré, hier, le ministre de la communication et se sont engagés à participer à la guerre contre la Covid-19 et réclament leur part du budget de guerre.    

 

Conscient que les médias, en tant que moyen de transmission de l’information, jouent un rôle essentiel dans la sensibilisation contre la propagation de la Covid-19, les autorités ont rencontré, hier, les patrons de presse pour échanger et réfléchir sur la stratégie à mettre en œuvre pour un meilleur traitement cohérent des informations relatives à la pandémie. L’objectif est d’endiguer les contenus ou interventions pouvant favoriser la propagation des rumeurs, de la désinformation, de la stigmatisation ou de la confusion dans le traitement des informations. 

Ainsi, au cours de la rencontre, le ministre de la Culture et de la Communication a appelé la presse à participer à la guerre contre la Covid-19, en sensibilisant davantage la population. ‘’Il n’est nullement question de vouloir remettre en cause l’indépendance ou la liberté d’informer des journalistes. Il s’agit juste de faire appel au sens de responsabilité des uns et des autres, face à l’urgence sanitaire qui doit être une préoccupation majeure pour tous les concitoyens. La situation est assez sérieuse et le gouvernement a donné des orientations et des mesures importantes pour protéger le pays. Il faut réfléchir sur la gestion de la maladie et sur l’après crise et l’information a un rôle capital à jouer dans ce sens’’, considère Abdoulaye Diop.

Les patrons de presse de répondre favorablement à son appel. Mais, ils soulignent qu’à l’instar de beaucoup de secteurs, les médias souffrent des impacts économiques de la crise du coronavirus. Et pour mieux contribuer à la lutte, les patrons de presse ont tenu à solliciter le gouvernement, à travers leur ministère de tutelle, pour qu’il les appuie. Ainsi, le Conseil des diffuseurs et éditeurs de presse (CDEPS) a fait part au ministre les différentes requêtes du secteur. Il s’agit, entre autres, de réviser substantiellement le montant de la subvention de la presse 2020 et de diligenter sa distribution, de créer un fonds spécial de dotation financière durant toute la période de lutte contre la Covid-19, pour accompagner les entreprises de presse face aux charges de fonctionnement (loyers, électricité, impression, salaires, téléphonie et internet) et de doter les reporters et techniciens de matériels de protection.

Il est également question d’accompagner les journalistes reporters et les techniciens des médias dans la mobilité. Le Cdeps a également sollicité l’ajournement des taxes, impôts et cotisations sociales des entreprises de presse, pour amortir leur déficit de trésorerie, accentué par la pandémie coronavirus. Et à en croire le président de cette organisation, Mamoudou Ibra Kane, la crise du coronavirus se fait déjà sentir dans le secteur des médias, plus particulièrement dans la presse écrite, avec la chute de la publicité. ‘’Tous les secteurs sont touchés par la crise de la covid-19, mais la presse semble la plus touchée. Dans la presse écrite, par exemple, les insertions publicitaires ont chuté vertigineusement. Il y a également les conditions de travail qui sont très difficiles pour respecter les barrières de division de la maladie. Certaines entreprises seront obligées d’envoyer des travailleurs en chômage technique. Or, notre secteur est vital dans la vulgarisation de la lutte contre la propagation de la covid19.  C’est pourquoi, nous avons estimé qu’il faut, peut-être, anticiper l’aide à la presse et la donner aux entreprises pour qu’elles puissent faire face à la crise’’, considère-t-il.

Le directeur général de la RTS a abondé dans le même sens. En effet, selon Racine Tall, on vit une situation exceptionnelle qui est une guerre contre un virus. Et à l’instar des médecins, les médias ont un rôle essentiel à jouer pour gagner cette bataille. Et à ce titre, estime-t-il, les medias ont le droit de bénéficier du budget de guerre. ‘’On dit qu’il y a un budget de guerre dégagé par l’Etat qui, en mon sens, ne doit pas être confondu avec l’aide à la presse. Aujourd’hui, le travail qui devrait se faire est de créer la synergie entre la cellule de crise créée hier ou celle du ministre de la Santé pour travailler sur les questions de communication. Il s’agit d’impliquer de façon méthodique la presse et chacun avec son style pour tomber d’accord sur un fait : à savoir qu’on est en guerre et qu’il n’y a pas à aller à contre-courant des messages. Si on est d’accord sur ça, nous pouvons réclamer de façon légitime, en tant que presse, notre part à ce budget de guerre. Et ce, d’autant que le ministre de la Santé a dit que le budget consacré à la communication s’élève à environ 400 millions de franc sur le Milliard annoncé officiellement’’, réclame Racine Tall.

Il ajoute : ‘’il faut appuyer tous les organes, surtout les privés, qui voient toutes leurs grilles aujourd’hui perturbées. On ne parle que de coronavirus et tous les organes en parlent dans le bon sens, dans le sens de l’Etat, pour sensibiliser. On fait la guerre avec de l’argent et les organes sont hyper fragiles. Il faut s’asseoir avec Diouf Sarr et lui dire qu’il y a un devoir national d’appui à la presse’’.

Le ministre Abdoulaye Diop : ‘’Il faut arrêter l’hémorragie’’

Répondant à ces interpellations, le ministre Abdoulaye Diop a promis de discuter avec ses collègues de l’Economie et de la Santé pour trouver solution à cette question. Mais, souligne-t-il, l’urgence est de faire bloc pour éliminer la propagation du coronavirus. ‘’Il faut arrêter l’hémorragie et on est là pour dire comment l’arrêter, parce que l’augmentation de cette hémorragie va inévitablement avoir des conséquences fâcheuses sur les entreprises. Nous sommes dans une situation assez sérieuse, parce qu’il s’agit, d’abord, de protéger la vie de nos concitoyens. Plus on arrive à le faire, plus on aura la capacité de faire face à l’aide et à l’accompagnement de la presse. Toute expansion de la maladie aura une conséquence sur toute l’activité économique. La priorité est la sensibilisation pour le changement de comportement des citoyens’’, estime le ministre.

En outre, les acteurs des médias ont évoqué les changements dans les communiqués du ministère de la Santé et de l’Action sociale qui ne mentionnent plus la provenance des personnes atteintes ainsi que leurs nationalités. Souleymane Niang du Groupe futurs medias a posé la question. Le ministre Abdoulaye Diop a répondu que cette décision vise à arrêter la stigmatisation qui commençait à gagner le terrain, avec le cas de Touba.  Il a annoncé une rencontre élargie, mardi prochain, avec les ministres de l’Economie et de la Santé et des acteurs de la presse pour aborder cette question, ainsi que celle relative à l’appui financier au secteur.

ABBA BA

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