Entre inégalités et modernisation
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Le dernier rapport de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD) met en lumière de profondes disparités dans l’accès aux infrastructures et aux services de base au Sénégal.
L’analyse de la distribution régionale des logements selon un rapport de l’ANSD exploité par EnQuête, fait apparaître une forte concentration dans la région de Dakar. La capitale regroupe 99,1% des appartements dans un immeuble, 78,1% des maisons à étages, 24,3% des baraques et 18,5% des maisons basses, tandis que les cases n’y représentent que 2,9%. L’analyse sur la possession de biens d’équipement révèle des disparités significatives tant au niveau régional que selon le milieu de résidence. La région de Dakar se distingue nettement avec les taux d’équipement les plus élevés dans toutes les catégories, reflétant son statut de capitale et son niveau de développement.
À l’échelle nationale, il a relevé une hiérarchie claire dans la possession des différents équipements. La télévision apparaît comme le bien le plus répandu, présent dans 65,4% des ménages sénégalais, suivie par la bonbonne de gaz (53,1%) et le réfrigérateur (39,8%).
Concernant le taux de pénétration du téléphone mobile, il est remarquablement élevé sur l’ensemble du territoire, atteignant 99,3% au niveau national. Cette couverture est quasi universelle avec très peu de variation entre les zones : 99,6% pour Dakar urbain et autre urbain, et 99,0% en milieu rural.
S’agissant du taux d’accès individuel au téléphone mobile (personnes de 12 ans et plus disposant d’un téléphone), des disparités plus marquées apparaissent. Au niveau national, 66,4% des individus disposent d’un téléphone portable, avec des écarts significatifs selon le milieu de résidence. Dakar urbain enregistre le taux le plus élevé avec 79,8%, suivi des autres zones urbaines avec 68,5%. Le milieu rural présente le taux le plus faible avec 58,4%.
Pour l’utilisation effective du téléphone portable, elle suit globalement la même tendance que l’accès, avec un taux national de 64,8%. Les écarts entre milieux de résidence et quintiles de richesse restent similaires, suggérant une forte corrélation entre la possession et l’utilisation du téléphone mobile.
Le téléphone fixe, quant à lui, connaît une très faible pénétration avec seulement 2,2% des ménages abonnés au niveau national. Son utilisation est principalement concentrée dans les zones urbaines, particulièrement à Dakar (5,8%), et quasi inexistante en milieu rural (0,2%). Cette fracture est encore plus marquée selon le niveau de vie, avec 6,3% d’abonnés dans le quintile le plus riche contre pratiquement 0% dans le quintile le plus pauvre.
Pour ce qui est de l’accès à internet au Sénégal, au niveau national, le taux d’accès à internet s’établit à 46,8%. Ce taux masque cependant des écarts considérables entre les différentes zones de résidence. Dakar urbain se distingue avec le taux d’accès le plus élevé, atteignant 71,0% des ménages. Les autres centres urbains enregistrent un taux nettement inférieur avec 52,8% des ménages. Le milieu rural accuse un retard significatif avec seulement 31,3% des ménages ayant accès à internet.
Eau et l’assainissement
Au niveau national, en 2023, le robinet dans le logement (80,2%) constitue la principale source d’eau de boisson des ménages. La région de Dakar affiche la meilleure couverture avec plus de neuf ménages sur 10 (94,5%) qui utilisent l’eau de robinet dans le logement.
Les disparités urbaines-rurales persistent : 86,6% des ménages urbains ont accès au robinet dans le logement contre 69,1% en milieu rural. Les régions de Kolda (49,5%), Sédhiou (49,6%) et Tambacounda (21,8%) dépendent fortement des puits non protégés, tandis que la région de Kédougou se distingue par l’importance des puits à pompe/forages (32,9%). Au-delà des robinets, les autres sources alternatives d’eau de boisson intègrent les puits non protégés (7,4%), les puits protégés (5,1%) et les puits à pompe ou forage (2,8%).
L’analyse des installations sanitaires au Sénégal en 2023, révèle une situation contrastée. Au niveau national, la chasse avec fosse prédomine (44,8%), suivie de la chasse raccordée à l’égout (18,1%). Les zones urbaines bénéficient d’installations modernes avec 28,7% de raccordement à l’égout et 50,8% de chasses avec fosse, tandis que les zones rurales ne sont pas raccordées aux égouts et utilisent principalement la chasse avec fosse (34,5%) ou recourent à des latrines couvertes (21,7%).
S’agissant de l’évacuation des eaux usées au Sénégal, au niveau national, dans la rue/nature, elle domine (41,6%), suivie du réseau d’égout (19,2%) et des fosses/puisards (14,5%). L’analyse des modes d’évacuation des ordures ménagères au Sénégal révèle qu’au niveau national, le ramassage par camion (40,3%) et les dépôts sauvages (27,3%) sont prédominants. Dakar se distingue avec 86,6% de collecte par camion, illustrant une gestion plus formalisée. À l’opposé, les régions de Sédhiou (59,5%), Kédougou (56,3%) et Matam (53,1%) recourent majoritairement aux dépôts sauvages.
Selon le milieu de résidence, les zones urbaines ont plus accès au ramassage par camion (61,7%) tandis que les zones rurales utilisent principalement les dépôts sauvages (58%).
Sources d’énergie des ménages
Au niveau national, le gaz (45,2%) et le bois (38,4%) suivis du charbon (14,3%) sont les principaux combustibles utilisés par les ménages pour la cuisson. L’électricité (0,3%), la bouse de vache (1,1%) et les autres sources (0,6%) restent marginales.
Concernant le principal mode d’éclairage utilisé par les ménages au Sénégal, il est noté une prépondérance de l’électricité (74,4%) au niveau national, suivie de la lampe torche (12,4%) et du solaire (8,5%). Les disparités ‘’urbain-rural’’ sont remarquables : 94,1% des ménages urbains utilisent l’électricité comme principal mode d’éclairage, contre seulement 40,5% en milieu rural, où l’usage des lampes torches (29,1%) et du solaire (20,3%) est important.
Dakar affiche le meilleur taux d’électrification (98,7%) relié au réseau de la SENELEC, contrastant avec Kédougou (21,6%) où les ménages ont plus recours à l’énergie solaire (39,1%).
Les régions de Tambacounda, Kolda,Kaffrine et Kédougou présentent des proportions de ménages utilisant l’électricité comme principale source d’éclairage, inférieures à 40%, avec un recours important aux lampes torches (30-40%). L'énergie solaire émerge comme alternative dans certaines régions, notamment Kédougou (39,1%), Sédhiou (31,8%) et Kolda (21,7%).
Protection sociale
Les travailleurs sénégalais bénéficiant d’une sécurité sociale reçoivent des allocations en cas de survenance de certaines situations (maladie, maternité, accident, etc.). Cette édition de la Situation économique et sociale nationale s’intéresse aux allocations familiales gérées par la Caisse de Sécurité sociale (CSS) et qui couvrent les travailleurs non fonctionnaires. Il convient de préciser que les fonctionnaires bénéficient d’une sécurité sociale qui est du ressort de la Direction de la Solde.
Pour la CSS, le montant total des charges techniques des prestations familiales (PF) selon le rapport, s’élève à 15 105 925 904 F CFA en 2022. Cette somme est répartie entre plusieurs types de prestations.
Les allocations familiales représentent la part la plus importante des charges, avec 58,7% du total, soit 8 869 176 900 F CFA, ce qui montre leur prédominance dans les dépenses liées aux prestations sociales. Suivent les indemnités de congé de maternité, qui regroupent 34,6% des charges, avec 5 230 812 707 F CFA, soulignant l’importance du soutien aux mères pendant cette période. Les allocations de maternité s’élèvent à 696 796 200 F CFA (4,6%), représentant ainsi un poste non négligeable, tandis que les allocations prénatales couvrent 1,6% des dépenses, soit 243 835 450 F CFA, apportant un soutien aux femmes enceintes.
Les ristournes sur les allocations familiales ne représentent que 0,3% des charges, avec 37 486 767 F CFA, et les allocations de chômage sont quasi inexistantes avec seulement 150 800 F CFA.
Les allocations CAF (Caisse d’Allocations Familiales), bien qu’ayant un faible poids global (moins de 1%), incluent 27 237 330 F CFA pour les allocations familiales, 182 250 F CFA pour les allocations prénatales et 247 500 F CFA pour les allocations de maternité.
Par ailleurs, les rentes (84,3%) et les indemnités journalières (10,4%) ont constitué l’essentiel des prestations d'accidents de travail en 2022. Les indemnités journalières sont payées durant la période de traitement d’une blessure alors que les rentes prennent en charge une incapacité permanente.
Assistance sociale
En 2023, la répartition des interventions de la Brigade nationale des sapeurs-pompiers (BNSP), révèle des tendances marquantes par catégorie d’intervention. Les accidents restent majoritaires avec 24 322 sorties y afférant, soit 44,7% du total, bien que cette proportion soit en légère baisse par rapport à 2022 (47,4%). Les interventions pour cas de maladie ont notablement augmenté, atteignant 8 473 sorties, soit 15,6% des interventions, contre 13,8% en 2022. Par ailleurs, les interventions pour incendie sont également en hausse, avec 4 587 sorties (8,4% des interventions), contre 6,9% en 2022, soit une augmentation des incidents liés au feu ou une réponse accrue aux situations à risque. Les opérations diverses, avec 5 460 sorties (10,0%), restent presque stables par rapport à l’année précédente, attestant de la polyvalence des équipes de la BNSP face à des missions variées. Enfin, les activités diverses, représentant 11 597 sorties (21,3%) sont aussi restées presque constantes en poids (21,2% en 2022), illustrant le rôle élargi de la BNSP en prévention et soutien communautaire.
En ce qui concerne la durée des interventions en 2023, des variations notables sont enregistrées par rapport à 2022. La majorité des interventions ont duré moins d’une heure, bien que ce chiffre soit en baisse, passant de 34 555 en 2022 à 29 147 en 2023, ce qui représente une diminution d’environ 15,6%. Cette baisse est compensée par une augmentation des interventions de durées plus longues, notamment celles comprises entre 1 et 6 heures, qui sont passées de 16 513 en 2022 à 21 627 en 2023, soit une augmentation de 30,9%. De même, les interventions d’une durée de 6 à 12 heures ont presque doublé, passant de 1 219 en 2022 à 2 182 en 2023. Pour les interventions durant entre 12 et 24 heures, une hausse est également observée, de 351 en 2022 à 621 en 2023, soit une augmentation de 76,9%. Les interventions de plus de 24 heures restent rares mais ont également augmenté, passant de 78 en 2022 à 111 en 2023, soit une hausse de 42,3%.
Au total, la BNSP a réalisé 54 439 interventions en 2023, ce qui représente une légère augmentation de 1,8% par rapport à 2022 (52 716 interventions). Les données indiquent une tendance vers des interventions plus longues, ce qui pourrait nécessiter des ajustements en termes de gestion de ressources humaines et matérielles pour répondre efficacement à des missions d’une durée plus étendue.
Par ailleurs, en 2023, la BNSP a enregistré une hausse de 16,6% de ses interventions relatives à l’assistance aux malades par rapport à 2022, atteignant 8 473 assistances. Bien que les cas de maladies non déterminées restent les plus fréquents, leur part a légèrement diminué (de 51,4% à 44,4%). Les interventions pour troubles mentaux ont fortement baissé en pourcentage, tandis que d’autres catégories, comme les crises d’épilepsie, les autres crises et les malaises, ont augmenté de manière significative.
CHEIKH THIAM