Les ferrailleurs alertent sur la survie

La Coopérative des ferrailleurs du Sénégal a organisé, hier, un point de presse devant son dépôt à Thiès, afin de dénoncer la crise profonde que traverse leur secteur. La manifestation, marquée par la présence d’une dizaine de ferrailleurs vêtus de tee-shirts rouges en signe de colère, a traduit l’ampleur du désespoir. Ces derniers ont tiré la sonnette d’alarme sur la menace qui pèse sur des milliers d’emplois et ont interpellé les autorités au plus haut niveau de l’État.
Cheikh Yalli, président de la coopérative, a dressé un constat inquiétant. Selon lui, les fabricants locaux, qui détiennent des licences de production à partir du fer collecté sur le marché sénégalais, se détournent désormais des ferrailles collectées localement. ‘’Depuis longtemps, nous avons alerté le ministère de l’Industrie et du Commerce. Ces fabricants devraient acheter nos ferrailles avant de produire des articles finis, comme le fer rond. Mais aujourd’hui, ils préfèrent importer du brut ou transformer des baguettes venues de l’étranger’’, a-t-il regretté.
Cette évolution, selon M. Yalli, provoque une surproduction, fragilise l’économie locale et menace la survie même de la filière. Il rappelle par ailleurs que ces mêmes usines ont jadis bénéficié de financements étrangers, notamment indiens, pour encourager la collecte nationale, avant de tourner le dos aux acteurs locaux. Le président de la coopérative dénonce aussi des pratiques qu’il juge injustes et pénalisantes : ‘’À l’usine, notre produit est souvent rejeté sous prétexte d’excès de fonte. Et lors du pesage, nous devons payer une taxe de 40 000 F CFA par tonne. C’est inacceptable !’’ Les participants craignent la fermeture de nombreux dépôts et la disparition d’un métier qui contribue, selon eux, à la cohésion sociale et au programme de transformation du Sénégal à l’horizon 2050. ‘’Nous lançons un appel solennel : si les autorités ne réagissent pas, c’est tout un secteur qui risque de s’effondrer’’, a averti Cheikh Yalli.
L’association estime que plus de 70 000 emplois sont menacés aujourd'hui si rien n’est fait. Les ferrailleurs interpellent directement le chef de l’État, Bassirou Diomaye Faye, le Premier ministre, Ousmane Sonko, ainsi que le ministre de l’Industrie et du Commerce, Serigne Guèye Diop. Madame Kane, représentante de l’Association des ferrailleurs du Sénégal, a pour sa part pointé du doigt le rôle des intermédiaires, accusés de ‘’polluer’’ le secteur par leur recherche effrénée de profits. Elle a insisté sur l’urgence d’une implication plus forte de l’État pour préserver ce pan stratégique de l’économie nationale.
Ndeye Diallo ( Thiès)