Un rempart qui peut devenir une bombe
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Outils de protection contre la covid 19, les masques peuvent également constituer une véritable bombe sociale, s’ils ne sont pas utilisés à bon escient.
Depuis quelques jours, c’est la ruée vers les masques dont le port est rendu obligatoire dans certains milieux par le gouvernement sénégalais. Si la mesure est saluée et encouragée par nombre de spécialistes de la médecine, sa mise en application nécessite un encadrement strict, pour ne pas se retrouver avec des effets contraires à ce qui était prévu. Déjà, l’ancien coordonnateur du Programme de lutte contre les infections nosocomiales, Dr Oumar Boun Khatab Thiam, prévient : ‘’En toute chose, il faut tenir compte du contexte et du milieu. Ce qui fait que l’Etat doit multiplier les actions de sensibilisation et d’éducation pour montrer aux Sénégalais comment ils doivent utiliser ces outils ? Sinon, ça peut être un couteau à double tranchant’’.
En fait, l’anesthésiste réanimateur à la retraite, tout en saluant la mesure, nourrit une multitude de craintes quant à son applicabilité efficiente. D’abord, explique-t-il, il y a la problématique de la gestion des déchets. Les ordures, rappelle le spécialiste, dans beaucoup de quartiers, sont ramassées par des charretiers. ‘’Une fois utilisés et jetés dans les poubelles, les masques risquent ainsi d’être ramassés par ces derniers qui ne jouissent pas toujours de la protection requise’’, signale Dr Thiam. Aussi, renseigne-t-il, pour ce qui est des masques en tissus réutilisables, il faudrait que ceux qui les lavent prennent un certain nombre de précautions pour ne pas contracter la maladie. Ce qui est loin d’être évident.
Très précautionneux, le président de l’Alliance nationale pour la sécurité des patients met aussi en garde contre le business des masques. Certains, pense-t-il, pourraient être tentés de les ramasser, les recycler en vue de les remettre sur le marché.
Enfin, fait remarquer l’ancien chef du bloc opératoire du service d’urologie de l’hôpital Le Dantec, il faudrait aussi une mise à niveau des tailleurs et des commerçants qui les commercialisent. ‘’Il ne faudrait surtout pas laisser les gens venir tripoter les masques, les essayer et les abandonner sur place. Lesquels pourraient être utilisés par d’autres clients’’, soutient Dr Oumar B. Kh. Thiam. Autant de facteurs à éviter, selon lui, pour que le rempart que constitue l’usage des masques ne soit pas transformé en moyen de propagation de la maladie.