Le blues financier du hip-hop galsen
Le hip-hop sénégalais en a gros sur le cœur. Pindra, Dongo D, Thiat et Matador ont longuement dénoncé, mardi, le système étatique accusé de faire disparaître un à un les festivals sénégalais par défaut d’appui. A l’Institut français de Dakar pour la conférence de presse de lancement du 12e Festival international des Musiques Urbaines, appelé Yakaar, prévu du 27 novembre au 1er décembre prochain, ces quatre figures de proue du mouvement hip-hop galsen ont tiré ainsi la sonnette d’alarme sur les nombreuses crises que traverse leur domaine d'activité, dont la disparition progressive des structures d’événementiel.
Directeur de Yakaar, Safouane Pindra a fait savoir que l'événement ne dure que deux jours au lieu des cinq habituels. Le promoteur avancera que la programmation ''reste relevée'' malgré tout, annonçant la participation de Awadi, Daara J Family, Keur Gui, Matador, Bidew Bou Bess, Kaleef du Togo, Sam du Bénin, Instinct Killer de Guinée... Selon lui, les raisons de cette austérité seraient liées à la crise avec son lot de restrictions budgétaires mais surtout un gouvernement du Sénégal plus que jamais aux abonnés absents. ''Si ce festival, pourtant une institution dans ce pays, arrive aujourd’hui à se maintenir, ce n’est que grâce à la solidarité qui existe entre les acteurs du milieu du hip-hop. Malgré toutes nos démarches, nous n’avons toujours pas d’interlocuteur au niveau étatique. Et cela même si ce que l’on demande n’est pas de l’aide mais l’accompagnement qui nous est dû en temps que secteur créateur de vocation et d’emplois'', a déclaré Safouane Pindra.
Connu pour son franc-parler, le rappeur Thiat du groupe Keur-Gui, y est aussi allé de son clash. ''Le hip-hop est la seule musique au Sénégal qui, depuis 25 ans, fédère 3 à 4 millions de jeunes autour d’une même musique, d’un même idéal, en plus de les conscientiser pour en faire les citoyens de demain. Ce n’est pas rien. En cette qualité, l’État lui doit au moins un appui. On ne quémande pas, on attire juste l’attention sur cette tendance qu’a l’État à ignorer ces jeunes alors qu’en même temps, il prétend mener des politiques en faveur de la jeunesse. Il n’y pas de bonne politique de jeunesse sans politique culturelle et il n’y pas de politique culturelle au Sénégal sans les cultures urbaines'', a tonné le membre fondateur du mouvement Y’en a marre. ''Je pense qu’ils (NDLR : les tenants du pouvoir) ont peur de nous appuyer à cause de cette conception erronée qu’ils ont de nous voir comme d’éternels opposants au régime en place. Pour eux, [nous appuyer] serait nous donner plus de moyens de s’opposer à eux. Ce qui est totalement faux. On réclame un droit. Pourquoi toute l’aide à la jeunesse serait-elle absorbée par le milieu de la lutte ? Je ne serai jamais lutteur mais je suis un Sénégalais au même titre que les autres, je dois pouvoir compter sur le gouvernement pour m’appuyer en cas de besoin'', a renchéri le rappeur Matador.
Dongo D de Daara J Family s’est également exprimé sur la situation ''déplorable'' que vit le hip-hop sénégalais. Plus pondéré, il a choisi de se focaliser sur l’opportunité exceptionnelle qu’offrira le festival. ''Faada Freddy, toute la famille du bois sacré et moi-même serons là, samedi, pour répondre présent au rendez-vous de Yakaar. Ce sera un plaisir de participer à cet événement car ce n’est pas tous les jours qu’une telle audience se réunit pour un concert au Sénégal. C’est pour nous l’occasion rêvée de renouer avec la scène locale'', a dit Dongo D.
Sophiane BENGELOUN
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