Le duel aura bien lieu
En tête du premier tour de l’élection présidentielle malienne avec 39,23% des suffrages valablement exprimés, le candidat du Rassemblement pour le Mali (Rpm), Ibrahim Boubacar Keïta est envoyé en second tour par son adversaire de l’Union pour la République et la démocratie (Urd), Soumaïla Cissé qui est arrivé en deuxième position avec 19,44% des voix loin devant Dramane Dembélé de l’ADEMA (9,59%).
Après cinq jours de tergiversation, le ministre malien de l’Administration territoriale a rendu les résultats hier. Ainsi, sur les 6 829 696 inscrites, 3 520 242 ont voté, soit un taux de participation de 51,54%. Dans ce lot, 3 116 710 suffrages sont valablement exprimés ainsi que 403 532 bulletins nuls. Contrairement aux premières tendances avancées par le ministre de l’Administration territoriale qui donnaient déjà vainqueur le candidat Ibrahim Boubacar Keïta dès le premier tour, ces résultats révèlent que le leader du Rpm n’a pas obtenu la majorité absolue. Il n’a pu obtenir que 1 222 657, soit 39,23%. Il est suivi par son principal adversaire, Soumaïla Cissé qui a comptabilisé 605 901, soit 19,44%. Quant au candidat de l’ADEMA/PASJ, Dramane Dembélé, il est arrivé en troisième position avec 298 748 9,59%, suivi de Modibo Sidibé avec 151 801, soit 4,87%. Viennent ensuite les candidats Housseini Guindo (4,63%), Oumar Mariko (2,40%), Cheick Modibo Diarra (2,08%), Jeamille Bittar (1,74%), Me Mountaga Tall (1,52%) et Moussa Mara (1,50%), entre autres.
Coup de massue pour le camp IBK
Ces résultats rendus publics sonnent comme un coup de massue chez les militants de Ibrahim Boubacar Keïta. Peu de temps après leur publication, ils se sont donné rendez-vous à leur quartier général où la déception se lisait presque sur tous les visages. Toutefois, ils se veulent légalistes. ‘’Le ministère de l’Administration territoriale est l’institution habilitée à donner les résultats. Quel que soit ce qui s’est passé, nous sommes obligés en tant que républicains de nous soumettre à cette décision’’, a lancé la présidente des femmes du Rpm, Aïssata Lady Toué Diawara. «Nous ne sommes pas déçus des résultats. C'est le peuple malien qui s’est déterminé et nul ne peut aller contre sa volonté’’, ajoute-t-elle. Pour elle, beaucoup de Maliens n’étaient préparés à cette élection en particulier ceux des campagnes où certains votaient pour la première fois. Toutefois, elle reste convaincu de la victoire de son candidat au second tour et ne se soucie pas des soutiens dont bénéficie le camp adverse. ‘’Nous ne craignons pas le Fdr (coalition qui soutient la candidature de Soumaïla Cissé) car c’est une coquille vide. Nous allons partir au second tour avec le Rpm, ses partis alliés et le peuple malien dont le dernier mot lui revient’’, a-t-elle indiqué.
Dans la cour du domaine abritant le Qg de IBK, plusieurs militants se mobilisent arborant des tee-shirts, banderoles ou autres gadgets aux couleurs du parti. Se voulant républicain, Boubacar Touré, secrétaire à la communication et membre du directoire politique du Rpm appelle tout le monde au respect du verdict des urnes. ‘’Nous sommes respectueux des principes républicains sans nous priver de la possibilité que nous offre la loi pour au besoin saisir les institutions compétentes pour vérification’’, soutient-il. ‘’L’heure n’est pas au découragement car le peuple vient de manifester sa volonté de changement même si le taux n’est pas suffisant pour passer au premier tour’’, a-t-il ajouté
La double victoire de Soumaila Cissé
Autre lieu, autre réalité. Au quartier général de Soumaïla Cissé, l’on savoure une double victoire : celle d’avoir renvoyé IBK au second tour et celle d’avoir «rappelé à l’ordre» le ministre de l’Administration territoriale. ‘’Nous sommes heureux que le ministre de l’Administration soit revenu à de meilleurs sentiments’’, soutient un membre de son directoire de campagne qui l’appelle d’ailleurs à garder cette neutralité quel que soit l’issue du second tour.
Dans la cour du quartier général de l’URD, les militants viennent au compte-goutte. Ici, l’heure est à la remobilisation et à la redéfinition des stratégies de communication pour mieux faire adhérer les populations maliennes à leur cause.
REACTIONS
ABDOULAYE MAïGA, DIRECTEUR DE CAMPAGNE DE IBK
'’Le 11août, il n’y aura pas de contestation’’
Quand on considère les résultats qui viennent d’être proclamés, dans ce que nous appelons le district centre qui concerne les six communes du district de Bamako et le cercle de Katy, nous avons obtenu près de 71% des suffrages exprimés. Dans ce que nous appelons le district ouest, c’est-à-dire de Kayes à Ségou, nous sommes premiers dans toutes ces régions. Bamako on n’en discute pas. Dans le district Est, de Mopti à Kidal, nous sommes à égalité. Voila la réalité. Dans les communes rurales, nous avons fait un score en dessous de 40%. Voila ce qui explique pourquoi la victoire de Bamako à elle seule ne suffisait pas à remporter cette élection au premier tour. Mais je demande à tous les militants d’être sereins. Sereins parce qu’il s’agit de refaire la petite distance qui nous sépare de la victoire. C’est important de franchir ce pas, parce que le 11 août, il n’y aura pas de contestation aucune. Quand on fait 71% des suffrages le 28 juillet entre 28 candidats, alors le 11 août, la face à face, il n’y aura pas de difficultés majeures. Alors nous sommes sereins, nous pourrons faire 90%. Maintenant le reste c’est d’expliquer à nos frères, sœurs, nos enfants, la jeunesse de notre pays, que le peuple malien s’est exprimé en choisissant dans ce bassin, le district de Bamako, dans toutes les grandes villes, IBK comme le candidat du peuple, comme l’homme de la situation. Voilà pourquoi je dis que cela ne servirait à rien de s’agiter. Il s’agit de remobiliser tout le monde pour faire des résultats nettement meilleurs. Nous en sommes capables et nous en avons le pouvoir et les moyens. Ce second tour est une chance pour le Mali parce que c’est une victoire légitime qui va être déclarée. Mais il ne faut pas perdre de vue que c’est dans le calme qu’on doit conclure cette élection. Il faut y aller sans injures, sans invectives, sans manquement de respect à qui que ce soit. C’est une élection pour sortir de la crise.
SOUMAïLA CISSE, PRESIDENT DE L’URD
‘’Les faits m’ont donné raison…’’
''L’arbre de la grande mobilisation du peuple malien le 28 juillet dernier ne doit pas cacher la forêt de l’impréparation, la mauvaise organisation, de la fraude qui ont caractérisé le premier tour de l’élection présidentielle’’, a déclaré hier le président de l’Union pour la République et la démocratie (Urd). Face à la presse, quelques heures seulement après la publication des résultats provisoires du scrutin présidentiel malien, Soumaïla Cissé estime que les faits lui ont donné raison. Selon lui, ‘’le ministre de l’Administration territoriale, le colonel Moussa Sinko Coulibaly, a fait une très mauvaise communication sur les premières tendances’’.
Admis au second tour de l’élection présidentielle, Soumaïla Cissé va faire face à Ibrahim Boubacar Keïta le 11 aout prochain. En perspective de ces joutes, il a invité ‘’le gouvernement et les partenaires du Mali à prendre des mesures vigoureuses pour permettre l’expression claire et nette de la volonté du peuple’’. ‘’Je demande et j’insiste que les Maliens présents dans les camps de réfugiés ne soient pas privés de leur droit de vote. Je n’accepterai pas que des entraves soient délibérément mises sur pied pour empêcher le vote dans les ambassades et consulats’’, a déclaré le candidat de l'URD. Qui exige en outre que ‘’les droits de vote des Maliens de l’extérieur soient respectés’’.
Déplorant le fait que ‘’le 28 juillet dernier, des milliers voire des dizaines de milliers de Maliens ont erré pendant des heures à l’intérieur comme à l’extérieur, sans retrouver leurs bureaux de vote ou leurs noms sur les listes électorales’’, Soumaïla Cissé a demandé que ‘’ces ratés, ces dysfonctionnements et cette mauvaise organisation dont la responsabilité incombe au seul gouvernement soient corrigés avant le second tour’’. ‘’J’exige que des mesures concrètes soient prises pour juguler la fraude en mettant fin au système de bureaux de vote parallèles et officieux, en sécurisant les bulletins de vote et le processus de dépouillement’’.
Tout en estimant que sa victoire et celle du Mali est toute proche, il a réitéré ses engagements de restaurer la paix au nord, rétablir la stabilité et la sécurité dans son pays. ''Mais également combattre les bandits et les terroristes, protéger les frontières contre les narco trafiquants et les délinquants économiques, mettre en place un état fort, juste et respecté pour une reconstruction du Mali’’.