La blague de Washington

En échange de la paix et de l’arrêt du massacre, Trump propose un gouvernement transitoire qu’il dirigera lui-même avec Tony Blair et le démantèlement complet du Hamas.
Le duo Trump–Netanyahu a donc conclu son conclave tenu hier à la Maison Blanche. Le moins que l’on puisse dire, c’est que tout a été fait selon les priorités de l’allié israélien. Pour arrêter les bombardements et le massacre des femmes et des enfants, il faudra que le Hamas range définitivement les armes, mais surtout que Gaza soit mise sous la tutelle de Trump lui-même.
En effet, l’un des points saillants du plan de Trump et de Netanyahu porte sur la création d’une sorte de gouvernement de transition qui sera conduit – tenez-vous bien – par l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair, placé sous la tutelle du président américain. « Le plan Trump prévoit la création d’un `Conseil de paix‘ composé de superviseurs internationaux, dirigé par Trump lui-même et incluant l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair dans un rôle encore indéfini », précise Reuters.
D’après l’agence de presse, le plan de Trump prévoit que Gaza sera gouvernée par un comité « technocratique et apolitique » composé de Palestiniens et d’experts internationaux, supervisé par le Conseil de paix. « Ce groupe établira le cadre et gérera le financement du redéveloppement de Gaza jusqu’à ce que l’Autorité palestinienne ait mené à bien des réformes majeures », souligne l’agence internationale, sans préciser les modalités de choix des membres de ces instances.
Gaza sous tutelle : la condition de Trump et Netanyahu
Une chose semble sûre : Trump n’est pas encore dans les dispositions d’imposer quoi que ce soit à Netanyahu. Son plan prévoit néanmoins un arrêt immédiat des hostilités dès que l’accord sera signé. Aucun calendrier, en revanche, sur la fin de l’occupation israélienne. « Les Forces de défense israéliennes céderont progressivement le territoire de Gaza qu’elles occupent à la Force internationale de stabilisation », se borne-t-on à déclarer.
Concernant la création d’un vrai État palestinien, le plan de Trump ne propose rien de concret. Il assujettit cette forte proposition de la communauté internationale à des préalables que Trump et Netanyahu peuvent déterminer de manière exclusive : le réaménagement de Gaza et l’achèvement de la réforme de l’Autorité palestinienne.
« À mesure que le réaménagement de Gaza progressera et que l’Autorité palestinienne sera réformée, les conditions pourraient enfin être réunies pour ouvrir une voie crédible vers l’autodétermination et la création d’un État palestinien, que nous reconnaissons comme l’aspiration du peuple palestinien », rapporte le média, citant les termes du plan.
Flou sur le calendrier de retrait de Tsahal
Que prévoit donc le plan pour les Palestiniens, est-on tenté de se demander ? D’abord, Trump et Netanyahu promettent la libération de prisonniers détenus par Israël (y compris ceux condamnés à de longues peines) en échange de leur capitulation. En acceptant de se désarmer et de ne jouer aucun rôle dans la future Gaza, les dirigeants et militants du Hamas peuvent aussi espérer une amnistie dans les conditions fixées par l’État hébreu. Dans le même sillage, il n’y aura plus d’expulsion forcée des habitants de Gaza ; Israël renonce à annexer Gaza et la Cisjordanie…
Dans l’immédiat, Netanyahu et Trump exigent la libération de tous les otages détenus par le Hamas (vivants ou décédés), le désarmement du Hamas et le démantèlement de ses capacités militaires, tunnels, armes, etc.
Dans ce plan, aucune possibilité de négociation avec la partie palestinienne. Le Hamas n’a pas d’autre choix que d’accepter selon le plan Trump. « Si le Hamas refuse le plan ou ne le respecte pas, Israël se réserve le droit d’agir », avertit le duo, non sans menacer que cette fois ce sera avec un soutien non dissimulé de Washington.
Blair salue un plan audacieux et pertinent
Choisi unilatéralement par Trump et Netanyahu pour conduire le futur gouvernement de transition, Blair n’a pas tardé à réagir en saluant ce qu’il considère comme un plan audacieux et intelligent.
« L’ancien Premier ministre britannique Tony Blair, qui devrait faire partie d’un comité supervisant la transition dans la bande de Gaza présidé par Donald Trump si la proposition de la Maison Blanche est acceptée, a salué le plan `audacieux et intelligent‘ annoncé lundi par le président des États-Unis », rapporte Le Monde.
« Ce plan nous offre la meilleure chance de mettre fin à deux années de guerre », a déclaré Tony Blair, saluant le « leadership et la détermination » du président américain.
Les pays arabes magnifient la sincérité de Trump, le djihad islamique critique un plan taillé sur mesure pour Israël
Côté palestinien, les réactions ont été timides et nuancées. Pour l’Autorité palestinienne, hostile au Hamas qui détient le pouvoir à Gaza, les efforts sont à saluer. Elle « accueille favorablement » les « efforts sincères et déterminés du président Donald J. Trump pour mettre fin à la guerre à Gaza, et accorde sa confiance en sa capacité à trouver un chemin vers la paix ».
La même tonalité a été notée chez de nombreux dirigeants de pays arabes, dont l’Égypte, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Qatar, la Jordanie… La Turquie, l’Indonésie et le Pakistan abondent également dans le même sens, ce qui ne manquera certainement pas de flatter l’ego de Trump.
Mais pour le moment, on ne sait pas vraiment ce que ces pays pensent des propositions surréalistes comme : le gouvernement transitoire dirigé par Trump et Blair et les modalités de désignation de ses membres, le plan de retrait de Tsahal des terres occupées…
Des voix se sont toutefois élevées pour dénoncer un accord taillé sur mesure au profit d’Israël. « Ce qui a été annoncé lors de la conférence de presse entre Trump et Netanyahu est un accord américano-israélien et représente la position de l’ensemble de l’establishment israélien », a déclaré le djihad islamique dans un communiqué. Selon le mouvement, ce plan est une recette pour la poursuite de l’agression contre le peuple palestinien.
Mis à l’écart comme d’habitude, l’Europe également salue le traité de paix imposé
Chez les Occidentaux, on loue également les efforts et l’engagement du président Trump. « Je salue l’engagement du président Trump pour mettre fin à la guerre à Gaza et obtenir la libération de tous les otages », a réagi le président français Emmanuel Macron sur son compte X.
« Le Hamas, selon lui, n’a pas d’autre choix que de libérer immédiatement tous les otages et suivre ce plan. » Il appelle à une « discussion approfondie avec tous les partenaires concernés pour construire une paix durable dans la région, fondée sur la solution des deux États ».
Presque les mêmes observations ont été faites à Londres, Berlin, Rome et Bruxelles, ainsi que dans la plupart des capitales occidentales.
Mor AMAR