Le Sénégal contraint de reprofiler ses emprunts
Le ministre de l’Économie et des Finances sortant, Amadou Kane, n’a cessé de théoriser le reprofilage de la dette du Sénégal. Il a même fait l’objet de plusieurs attaques, pour avoir lancé un nombre important d’emprunts obligataires sur le marché financier régional. Il se trouve qu’il avait raison, si on en croit des experts du ministère des Finances.
Aujourd’hui, de nombreux emprunts lancés par le précédent régime arrivent à échéance. Et selon des experts de la direction de la Dette publique du ministère sénégalais de l’Économie et des Finances, ''le portefeuille de la dette extérieure du Sénégal court un risque de refinancement élevé et un risque de taux de change (les montants sont en devises)''. Car 60% de la dette intérieure qui s’élevait à 798,5 milliards F Cfa, à la date du 31 décembre 2012, doivent être payés dès l’année prochaine. Ce qui constitue des sommes astronomiques. En effet, le précédent régime a emprunté des sommes colossales pour combler le déficit budgétaire et financer ses réalisations. Cependant, les échéances de cette dette n’étaient pas éloignées. Avec le possible refinancement, le pays va devoir payer plus cher.
Selon ces experts, si on en est là, c’est parce que cette dette n’a pas été bien utilisée. Donc, sans un reprofilage qui va faire en sorte ''de diminuer le poids du court terme pour privilégier le long terme'', le pays va vers un ralentissement de la croissance, dans la mesure où ''la commande publique va diminuer au profit du paiement de cette dette''.
A la date du 31 décembre 2012, la dette conventionnelle, qui regroupe aussi bien l'encours intérieur que celui extérieur, était de 3 070 milliards F Cfa. L’idée est d’améliorer sa qualité, en privilégiant la dette concessionnelle contractée sur le long terme.
Toutefois, le nécessaire recours aux marchés obligataires ''augmentent le risque de refinancement''. Pour amoindrir ces risques, ''les autorités ont misé sur le reprofilage qui consiste à allonger le maximum possible la maturité des instruments utilisés, mais également à des conditions financières plus favorables''. D’où les récentes émissions de titres publics sur une période de 10 ans, car le Sénégal n’a pratiquement pas de ressources naturelles, et est contraint de veiller à la qualité de sa dette, puisqu’il aura toujours à financer son déficit, donc son développement.
Les experts de la direction de la Dette sont convaincus que si ces ressources sont utilisées à bon escient et investies dans des secteurs porteurs de croissance, elles boosteront le développement et ainsi accroîtront les ressources de l’État qui pourra faire face à sa dette, sans problème.
Les emprunts du Sénégal sur les marchés obligataires sont, dit-on, le signe de la confiance dont jouit le pays sur le marché financier sous-régional. ''Un pays ambitieux peut s’endetter selon sa capacité de rembourser'', a souligné Souleymane Sène, inspecteur du Trésor. Il renseigne que ''la dernière analyse de la dette faite en mai montre que la dette publique du Sénégal est toujours viable''. L’inspecteur du Trésor a également précisé que le Fonds monétaire international (Fmi) a procédé aux mêmes vérifications, au cours d’un séminaire sur les émissions de titres publics dans l’espace Uemoa, avec le Collectif des journalistes économiques du Sénégal (Cojes).