Publié le 1 Mar 2014 - 23:19
EN PRIVE AVEC... BALLA NDAO (SCULPTEUR AUTODIDACTE)

«L'art n'est pas une bousculade, c'est une compétition»

 

Sculpteur autodidacte, Balla Ndao est natif de Linguère. Agé d’une trentaine d’années, il prépare activement sa 1ère biennale d’art prévue au mois de mai. Le ‘’1er succès africain à l’Ecole des beaux-arts français, Ousmane Sow’’ est le nom de l’exposition. EnQuête est allé le rencontrer dans son atelier à Dakar pour une découverte.

 

Vous êtes plasticien. Qui ou qu’est-ce qui vous a poussé à pratiquer l’art ?

Je n’ai pas d’artistes dans ma famille. C’est une attirance personnelle.

L’avez-vous appris ?

Non. Je suis autodidacte. Personne ne me l’a appris, je n’ai jamais fait d’études, ni participé à des ateliers de formation. C’est Dieu qui m’a donné ce talent et je l’en remercie.

C’est un don mais vous avez au moins essayé de le parfaire. Qu’en est-il réellement ?

Je l’ai parfait par moi-même en faisant beaucoup de recherches, beaucoup d’investigations.

Est-il facile d’être créateur en tant qu’autodidacte ?

Rien n’est facile. Dieu merci, on ne nous présente plus dans le milieu de l’art plastique. J’ai fait beaucoup de créations et participé à plusieurs programmes. Je fais des représentations (récréations). Quand je réalise une œuvre, on peut dire en la regardant qu’elle ressemble à une personne, mais en réalité elle parle d’un thème.

De manière explicite, c’est quoi la récréation ?

C’est une œuvre qui est créée et qui permet de créer la joie entre nous. Qu’une autre personne puisse en avoir une autre vision pour en faire son bonheur.

Comment peut-on qualifier votre récréation ?

Elle est calée sur le vide. Tout ce qui est vierge m’intéresse. Je préfère exploiter le vide.

C’est le vide qui fait parler alors votre muse ?

Oui, c’est exactement cela. Une image vierge que je prends pour y insérer quelque chose. Je ne ferme jamais mes œuvres. Je préfère que la personne qui regarde perce mon intention pour pouvoir aller dans ce vide et voir autre chose. L’art demande de la réflexion. Mes œuvres sont internationales.

Vous aimez le mot international. A quoi faites-vous allusion ?

Voyager à travers le monde peut ne pas être international. Pour moi, international veut dire toucher à un domaine qui intéresse le monde ou tout un chacun peut en profiter et s’identifier.

De la peinture, vous en faites ?

Oui, j’en fais mais ce n’est pas le plus important chez moi. Je ne fais pas de cadres ni de toiles. Je créé des tableaux qui n’ont pas besoin d’être peints. J’ai juste besoin de matières, ou de recyclages. Elle me sert de survie, à participer à certains programmes parce qu’elle ne me prend pas de temps. Je ne peux pas dire que je suis peintre, ou sculpteur ou autre. Je suis tout simplement créateur.

Vous n’êtes pas nombreux à pratiquer cet art au Sénégal, à part Ndary Lo, Ousmane Sow.

Il y’ a beaucoup de confusion dans ce domaine. Est-ce qu’on a même beaucoup d’artistes en Afrique ?

Pourquoi dites-vous cela ?

Parce que lors des compétitions, plus de 3 000 dossiers sont enregistrés. Nous travaillons, mais est-ce qu’il y a de l’évolution ? L’art n’est pas une bousculade, mais une compétition.

De quelles matières avez-vous besoin pour créer vos œuvres ?

Une matière propre à l’Afrique. Je travaille sur le fer. Je ne soude pas mais j’attache. Quand je voyage, je n’emmène rien à part ma trousse. 

Nous avons vu que  vos œuvres sont gigantesques, impressionnantes du point de vu hauteur. Visez-vous un public particulier ?

Je crée pour  le monde. Je ne fais pas de différence entre pauvres et riches. Mon souhait est que les gens puissent voir ou apercevoir mes créations partout où ils se trouvent.

Ces œuvres sont-elles destinées à la vente ?

Ce n’est pas une exposition de vente mais une exposition dont la mission est de voyager parce qu’elle a des messages à donner.

Feriez-vous des reproductions si quelqu’un voulait en acheter ?

Une œuvre ne se reproduit pas sinon elle perd l’essence de sa création.

Qu’attendez-vous de cette exposition alors ?

Représenter avec mon métier le Sénégal partout dans le monde. J’adore le succès mondial et veux aller au-delà d’Ousmane Sow.

Cette exposition est votre 1ère sortie officielle à titre individuel. Comment la préparez-vous ?

Je ne sors plus depuis quelques temps pour pouvoir présenter des œuvres d’exception.

Quel est le thème de l’exposition ?

‘’Africain debout’’. Il ne vise pas forcément les Africains. La mondialisation, le pouvoir, constituent aussi l’actualité à laquelle nous pouvons réfléchir pour nous mesurer par rapport à l’avancée de l’art plastique.

L’avez-vous matérialisé dans votre travail ?

Oui, le ‘’fauteuil du pouvoir’’ par exemple. L’africain pense que le pouvoir lui appartient. Pour y être maintenu, il faut créer la guerre. Pour s’y lever aussi, de même. La quête du pouvoir et son maintien sont un problème mondial et il est particulièrement accentué chez les Africains.

Cherchez-vous à conscientiser les Africains ?

Oui. Sinon les messages que nous matérialisons et lançons ne serviront à rien. Il ne suffit pas simplement de contempler, il faut comprendre le sens de la réflexion et son but.

A quel genre de pouvoir pensez-vous, l'étatique ?

Non. Le pouvoir ne s’arrête pas à l’Etat. Il constitue une actualité. L’homme aime le pouvoir qui est limité et personnel. Il appartient à Dieu.

Qu’apportez-vous de nouveau avec votre récréation ?

J’ai fait des œuvres axées sur le circuit d’alimentation de l’être humain des pieds à la tête.

Comment les avez-vous conçues ?

J’ai coupé du fer en des mesures d’un mètre, ou même plus. Faire ensuite une étude qui me permet de voir comment on peut alimenter une personne pour pouvoir l’équilibrer. Si vous regardez la sculpture, vous voyez mêmes les veines. C’est comme un laser qui permet de voir l’essentiel dans un corps humain. Une personne doit être équilibrée.

A quelle fin ?

Pour l’avancée de la technologie ! Si nous voulons faire un ordinateur ou une tablette, on voit souvent qu’il y a des lignes directrices qui ne sont rien d’autres que des circuits d’alimentation. J’ai insisté, à travers mes œuvres, sur le côté technologique.

Autodidacte, comment parvenez-vous à comprendre les maîtrises techniques ?

Je ne peux  pas vous dire exactement c’est quoi la maitrise technique, mais je peux vous dire la bonne voie que je dois suivre pour réaliser mon œuvre.

PAR ALMAMI CAMARA

 
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