Le rêve brisé des Congolaises
Angèle Diabang est une jeune réalisatrice sénégalaise, auteure de quatre courts métrages. Elle a organisé hier une séance de projection de sa dernière œuvre cinématographique intitulée ‘’Congo, un médecin pour sauver les femmes’’.
‘’Je me sens perdue. Tout mon entourage me déteste parce que j’ai été violée par des militaires en rentrant de l’école ; mes amies ne me parlent plus à cause de ça…’’. Ces propos d’Annie-Françoise témoignent de l’ampleur des atrocités que des militaires ont exercées sur d’innocentes femmes sans défense. Cette jeune mineure de 17 ans n’est pas la seule à vivre cette barbarie des hommes armés au Sud-Kivu, en République démocratique du Congo (RDC). La jeune réalisatrice sénégalaise Angèle Diabang a projeté, hier, au Goethe Institut, un film sur ces innombrables femmes congolaises victimes de sévices sexuels.
Ce documentaire de 52 minutes intitulé ‘’Congo, un médecin pour sauver les femmes’’ donne la parole aux victimes admises à l’hôpital de Panzi, à Bukavu. Un centre hospitalier créé par le docteur Denis Mukwedge et qui accueille depuis 15 ans les femmes violentées de la région.
Après avoir échappé à plusieurs tentatives d’assassinat, ce médecin militant pour le respect des droits des femmes s’exile, avant de revenir s’installer dans sa région natale pour soigner et aider les femmes à reconstruire leur vie. Dans cette riche partie du pays, les violences sexuelles sont utilisées comme arme de guerre pour terroriser la population et détruire le tissu social. Ce film donne aussi la parole au médecin gynécologue et son équipe. En tant que personnel soignant, ils témoignent dans ce documentaire des séquelles physiques et psychiques des innombrables agressions subies par les femmes.
Le film d’Angèle Diabang évoque aussi dans des passages émouvants et tristes la question de l’avortement après le viol. Etant réprimées par la loi congolaise et sans moyens, les victimes sont abandonnées à elles-mêmes, sans savoir à quel saint se vouer. Les rares qui gardent leurs bébés sont discriminées et rejetées par la société. Le film met en scène le témoignage de plusieurs femmes victimes de viols collectifs avec comme autre conséquence des MST. Et comme un malheur ne vient jamais seul, certaines d’entre elles sont répudiées par leurs maris après leurs viols.
Faire cesser les atrocités en Afrique
‘’Tout est parti d’un article que j’ai lu dans un numéro du Monde diplomatique où le docteur racontait les viols faits aux femmes dans cette province du RDC. Cela a captivé mon attention et j’ai décidé de prendre ma caméra pour filmer et montrer au monde entier ce que ces femmes vivent’’, a expliqué la réalisatrice. A ses yeux, ce qui se passe au Congo interpelle tout le monde, pas seulement les Congolais. ‘’J’avais envie en faisant ce film de faire en sorte que chacun puisse se poser la question sur ce qu’il faut faire pour arrêter ces atrocités en Afrique’’, a-t-elle soutenu.
La jeune réalisatrice sénégalaise a quatre films à son actif. Elle travaille actuellement sur son premier long métrage, adapté du roman de Mariama Bâ, ‘’Une si longue lettre’’.
MAMADOU DIALLO (Stagiaire)