Publié le 5 Mar 2015 - 22:46
SINTHIAN

Là où le mariage précoce des filles résiste aux droits-de-l’hommistes

 

Village situé dans l’arrondissement de Missirah dans le département de Tambacounda, Sinthian hésite à s’ouvrir à la modernité. Dans ce village, les populations demeurent conservatrices et continuent toujours à donner leurs filles en mariage dès le bas âge entre 10 et 15 ans. Une situation qui impacte négativement sur le taux de scolarisation des filles qui reste très faible dans cette contrée.

 

La région de Tambacounda regorge d’une diversité culturelle qui fonde sa richesse. Peuplée de plus de 300 000 âmes, avec une densité géographique de 17 habitants au kilomètre carré, Tambacounda compte quatre départements dont Bakel, Goudiry, Koumpentoum  et Tambacounda. Dans ce dernier département, se trouve l’arrondissement de Missirah qui regroupe les villages de Nguene, Sale et Sinthian. Situé à 17 km de Gouloumbou, Sinthian est niché en pleine brousse où la mobilité des biens et des personnes constitue le premier handicap de la localité. Il est 12h passées, la voiture nous menant dans cette contrée, caracole et avance comme elle peut. La route, loin d’être un fleuve tranquille, est constituée de latérite. En plus d’être sinueuse, elle est chaotique et poussiéreuse. Et pour combler le tout, il règne une chaleur infernale. Dans cette contrée perdue de la brousse de Tambacounda, la nature regrette la saison des pluies. La verdure cède progressivement du terrain. Les feuilles des arbres jaunissent. Mais Sinthian n’a pas que ce problème de mobilité. Il traîne les tares du mariage précoce qui impacte beaucoup sur la scolarisation et le maintien de ses filles à l’école.

En effet, le phénomène du mariage précoce des filles y constitue une réalité douloureuse. Si dans les autres grandes villes du pays, le mariage précoce a beaucoup reculé, à Tambacounda, le phénomène demeure plus qu’une réalité. Les populations du Sénégal oriental continuent toujours à donner leurs filles en mariage, alors qu’elles n’ont pas encore atteint l’âge de la majorité, ou tout simplement de la procréation. Même si dans la ville de Tambacounda le phénomène a beaucoup reculé, il n’empêche que dans les campagnes, l’on s’adonne toujours à cette vieille pratique depuis longtemps décriée par les organisations de droits humains et de défense des droits des femmes. Ici, le mariage précoce constitue un faux débat, une simple banalité qui ne dérange pas beaucoup de gens.

Sauf les enseignants et l’inspection d’académie de Tambacounda qui n’ont de cesse de tirer sur la sonnette d’alarme pour sensibiliser les parents. ‘’Nous n’insisterons jamais assez sur la nécessité de laisser nos filles poursuivre leurs études scolaires, avant de les donner en mariage. Ici à Sinthian, sur 35 filles qui entrent à l’école, moins d’une dizaine arrive en classe de CM2, parce que les parents donnent souvent leurs filles en mariage précoce’’, déplore l’adjoint de l’inspecteur d’académie de Tambacounda. Mais il n’est pas le seul à combattre ce phénomène, puisque les filles qui sont les principales concernées s’en mêlent à travers des séances de sketchs traduits dans les différentes langues parlées de la localité, à savoir le Pulaar, le Wolof et le Français, pour sensibiliser davantage leurs parents. Qui ne semblent souvent pas se soucier des dangers d’une telle pratique sur l’avenir de leurs progénitures.

ASSANE MBAYE

 

 

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