Publié le 15 Jan 2019 - 02:16
RECENSEMENT ET ATTRIBUTION DE PARCELLES

La guerre des plaques 

 

Bornes déplacées, litige sur des parcelles appartenant à plusieurs personnes, occupation illégale de voirie. Dans les quartiers périphériques de la commune de Kolda, les conflits fonciers font rage. Une situation qui s’explique par une opération de recensement et d’attribution de parcelles entamée, depuis quelques semaines, par le service du cadastre.

 

Les problèmes fonciers sont récurrents, surtout dans les quartiers périphériques de la commune de Kolda, et font partie des difficultés quotidiennes qui animent la vie de tout un chacun.  Même si la gendarmerie, la police, la justice et la société civile s’emploient à faire respecter la loi foncière et coutumière, le problème reste toujours d’actualité. Selon certains propriétaires fonciers, le conflit est né du contrôle de la terre. ‘’La loi coutumière en vigueur ici lèse beaucoup de familles. Voilà l’origine du conflit qui coûte même la vie à des gens ici’’, explique-t-on.  

D’ailleurs, l’opération de recensement et d’attribution de parcelles dans les quartiers périphériques de la commune de Kolda, menée par le service du cadastre, a soulevé un engouement au sein de la population. Cette opération a déclenché au sein des populations une guerre des plaques. On voit parfois sur une même parcelle deux individus y implanter leur plaque. Par exemple, dans le quartier Bel Air et à Zone Lycée, le constat est palpable.

‘’J’ai acheté la parcelle, en 2000, auprès de Mamadou Dianfo. En ce moment, la mairie n’avait même pas encore commencé à lotir les lieux. J’ai fait des briques et j’ai planté des palmiers et un citronnier sur ce terrain. A la fin de l’année 2017, la mairie a pu lotir les lieux. A ma grande surprise, un jour, j’ai effectué un tour dans ma parcelle, j’ai trouvé que ma plaque a été enlevée et remplacée par une autre. J’ai aussitôt appelé le soi-disant propriétaire pour lui signifier qu’il vient d’acheter un terrain auprès du vendeur qui n’est pas propriétaire’’, explique Moussa Mané.

Pour en avoir le cœur net, Moussa a fait déplacement chez le nouvel acquéreur de sa parcelle.  ‘’Une fois à son domicile, il m’a fait savoir que c’est sa propriété. Car c’était le champ de son père. Après une discussion houleuse, je lui ai demandé de ramener ma plaque, sinon le pire allait arriver. Après quatre jours, ma plaque a été ramenée. Depuis lors, je fais la ronde sur ma parcelle, 24 heures sur 24. J’ai demandé à l’acheteur et à son vendeur de ne plus pointer leurs nez dans ma parcelle, sinon quelqu’un allait mourir. Et ça, je suis prêt à le faire. Car je ne peux pas cautionner qu’après 18 ans sans problème, quelqu’un vienne un bon jour se présenter comme étant le propriétaire de ma parcelle’’.

Non loin du terrain de Moussa Mané, Abdoulaye Traoré rencontre également le même problème. Il soutient qu’un jour, il a trouvé une plaque sur son terrain et un puits qui venait d’être entamé. Après investigation, il a fini par rencontrer les propriétaires de la plaque et du puits. ‘’Présentement, l’affaire est entre les mains de la justice. Chacun de nous n’a que l’acte de vente sur la même parcelle. Je ne sais pas quel sera le sort qui nous sera réservé par les magistrats sur cette parcelle. En tout cas, moi, je ne compte pas baisser les bras. Car mon espoir repose sur cette parcelle. Et je suis prêt à y laisser ma vie’’, dit-il.

Les éclairages du chef du cadastre

A la question de savoir quelle est la conduite à tenir, lorsque deux ou plusieurs personnes réclament la propriété d’une même parcelle, le chef du Service du cadastre de Kolda, Babacar Diouf, soutient que dans ce cas de figure, ils privilégient le dialogue. ‘’Par exemple, nous prenons les noms des protagonistes et leurs numéros de carte nationale d’identité. Nous les convoquons dans nos bureaux pour discerner le vrai du faux. Si nous ne parvenons pas à résoudre le problème, nous leur proposons de diviser la parcelle litigieuse, selon le nombre de personnes qui réclament la propriété. S’ils sont d’accord sur le principe, immédiatement, nous validons’’.

Par contre, ‘’si les antagonistes ne sont pas d’accord, nous les envoyons auprès de la mairie qui, à son tour, va régler le problème à sa manière. Mais si la mairie échoue, l’affaire est immédiatement envoyée au niveau du tribunal qui va trancher’’.

Ainsi, pour éviter tous ces problèmes notés çà et là, le chef du Service du cadastre de Kolda invite les populations à une franche collaboration avec la commission qui est composée des membres du cadastre, des délégués de quartier et la mairie, afin de faciliter la tâche des recenseurs.

Certains observateurs soutiennent qu’avoir ‘’des textes suivant l’évolution des mœurs est une bonne chose, mais il ne faut pas en abuser, c’est-à-dire que changer, de temps en temps, leurs dispositions est mauvais’’.

S’il y a autant de problèmes fonciers, c’est parce que les textes y afférant ne sont pas clairs et que la corruption sous toutes ses formes reste omniprésente, dit-on.

Nouveaux textes, nouveaux problèmes

Certaines populations interrogées indiquent que ‘’le changement de textes entraine de nouveaux problèmes comme le régime des preuves et la méconnaissance des droits des particuliers. Car le changement fréquent de textes rend le régime de la preuve très ardu. Tel est l’exemple de la mise en valeur d’un terrain qui reste difficile à prouver. Mais également les usurpateurs qui ont recours à de faux documents pour avoir la propriété du terrain’’.

Quoi qu’il en soit, la majorité des Koldois ignorent l’existence des textes en vigueur, qu’il s’agisse de ceux relatifs au foncier ou des textes de la loi en général.

EMMANUEL BOUBA YANGA (KOLDA)

 

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