Une chronique média
Parler est difficile...titrer tout autant
Deuxième ou second…Troisième, quatrième mandat voire, pourquoi pas battre le record de Biya au pouvoir ? Boun Abdallah ne se pose pas la question et était à la Une de la presse du lundi. En infatigable feddayin du mackyland, son parti est pris et sans gants depuis longtemps et il ne se gêne pas de le proclamer ! Macky le bâtisseur, Sall le sauveur du Sénégal doit rester en place ad vitam aeternam. Ah teuss waye ! N'empêche ! Le débat sur le deuxième ou troisième mandat fait épisodiquement rage, chacun y allant de ses arguments. La télévision nationale RTS a-t-elle saisi toute la pertinence de son titrage de l'élément diffusé lundi 24 février en célébration de l'an1 de la réélection de Macky Sall ? "Second mandat : les coulisses de la réélection."
A mon avis non et il y a deux raisons pour l'affirmer. D'abord, le titre ne colle pas avec le contenu : l'expression "les coulisses" de quelque chose" se rapporte à un reportage qui raconte les dessous d'un fait. Il n'en est rien de l'élément présenté qui n'est qu'un ramassis de meetings et autres événements de la présidentielle 2019 bien réchauffés. Ensuite, parler de second mandat c'est se situer aux antipodes du discours de Boun Abdallah, renforcé quelque peu en cours de semaine avec des arguments juridiques par Mbaye Ndiaye. En français, quand il y a un second, c'est qu'il n'y a jamais de troisième ; ce dernier peut venir après un deuxième mais jamais après un second qui clôt toujours la marche ou le podium. Le français est difficile dé, aurait dit mon cousin Yao. Sans doute qu'une simple méprise sur le sens du qualificatif dans la titraille du JT est passée par là ce jour car difficile d'imaginer la RTS enfreindre la fatwa posée par Macky himself "Bu ko ken tudd" (Que personne n'en parle !) au point d'indiquer que la réélection de Sall en 2019 est un second mandat donc un ultime.
Un Président ne devrait pas parler comme ça ! Emmanuel Macron s'est fait traiter, dans les coulisses bien sûr, de jouvenceau par un de ses ministres, viré depuis pour problème avec l'éthique puisqu'il n'aurait pas déclaré des activités lucratives source de conflits d'intérêt avec ses fonctions de Haut-Commissaire aux Retraites.
Jean-Paul Delevoye, puisque c'est de lui qu'il s'agit, n'appréciait guère les gamineries du président français qui gênaient un peu trop sa gestion de l'épineuse question des retraites. Mais, à y regarder de près, n'a-t-il pas eu raison de penser que Macron, élu en 2017 à l'âge de 39 ans, se comporte en jeunot à la tête de l'exécutif français. Sa réaction, la semaine dernière, au Salon international de l'Agriculture de Paris, relayée par les chaînes de télé et réseaux sociaux, témoigne de ce que beaucoup seraient tentés d'appeler de l'immaturité diplomatique. Biya Paul n'est pas un exemple à plaindre ! 38 ans à la tête d'un Etat (presque l'âge de Macron) qui produit parmi les meilleurs intellectuels du continent mais auxquels il n'offre que le règne unique comme horizon...
Pour autant, son pays, le Cameroun, ne mérite pas de la condescendance comme le président français en a arrogamment fait montre. Un président responsable peut-il se permettre, simplement parce que interpellé par un déambulant dans les couloirs du Salon international de l'agriculture et dont on peut penser qu'il a savamment mûri son plan, de répondre spontanément à des questions de droits de l'homme et diplomatiques aussi sensibles, au point d'indiquer qu'il allait faire pression sur Biya ? Que non ! Il n'y a que Macron pour penser le contraire et aucun professionnel sérieux pour le conforter dans cette diplomatie du coup de sang qui ne peut qu'être improductive.
A Ouaga, ou en France face aux Gilets jaunes, les bourdes (dont la fameuse réquisition des chefs d'Etat africains, devant les caméras, après la mort de 13 soldats français au Mali), coups de sang et gaffes de tous genres auront été nombreux. Peut-être, comme on se résout à mettre des couches aux bébés qui ne peuvent se retenir quand l'envie leur en prend, il faudra bien en arriver à installer une muselière électronique à monsieur Macron qui verrouillerait ainsi automatiquement le caquet au choupinet toutes les fois qu'il ignorerait qu'un président ne devrait pas dire ça, pour paraphraser un livre dédié aux errements de langage de son prédécesseur Hollande.
Pépessou