Le Goethe Institut veut valoriser les artistes des terroirs
Combler les écarts causés par le manque d’offres culturelles et soutenir la création artistique dans les régions du Sénégal. C’est le pari que veut réussir l’équipe du projet ’’Les voix de la terre’’ à travers l’initiative ‘’Sunu talents’’.
L’équipe du projet ‘’Les voix de la terre’’ est à la recherche de jeunes créateurs (18-35 ans) du spectacle vivant (musique, danse, théâtre) pour leur donner l’occasion de mettre en lumière leurs créations artistiques à travers l’initiative ‘’Sunu talents’’. Elle compte ainsi changer la donne. Elle les cherche hors de Dakar. Thiès, Matam, Tambacounda (musique), Louga, Kolda (danse), Ziguinchor et Kaolack (théâtre) sont les régions ciblées.
En effet, les zones rurales du Sénégal regorgent de jeunes talentueux et créatifs ayant un fort potentiel dans le domaine des arts vivants. Potentiel qui reste largement inexploité, selon les membres de l’équipe de ce projet. Pour eux, les soutiens aux initiatives culturelles ont tendance à se concentrer principalement dans la capitale Dakar, alors qu’une bonne partie du patrimoine culturel national se trouve en région. C’est ce qu’a confirmé le chef de division à la Direction des arts, Mamadou Lamine Ba, en marge d’une conférence de presse tenue à Dakar.
‘’Souvent, on dit que Dakar cristallise beaucoup plus d’évènement que les autres régions. C’est normal, c’est la capitale. Mais aujourd’hui, la dynamique de la politique culturelle de l’Etat, c’est d’appuyer davantage les terroirs, mettre en avant leur patrimoine culturel’’, dit-il, saluant un projet ‘’très important, innovateur’’, qui cadre avec les axes d’intervention de la Direction des arts. ‘’Nous travaillons beaucoup au niveau des sous-secteurs musique, théâtre et danse. Et ce projet prend en compte ces trois sous-secteurs et participe à l’éclosion des talents. C’est maintenant un projet collaboratif. On aura certainement d’autres plateformes d’échanges avec le Goethe-Institut pour essayer de voir comment opérationnaliser ce projet’’, a-t-il ajouté.
Organisé sur une période de 10 mois (octobre 2020-juillet 2021), ‘’Sunu talents’’ a l’ambition de fournir des espaces et des ressources pour la réalisation de créations artistiques à un niveau professionnel contribuant à la formation de jeunes entrepreneurs, artistes et à la diffusion culturelle dans les régions, notamment avec une scène mobile qui permet une diffusion nationale. Ainsi, un appel à création a été lancé depuis le 5 octobre, permettant de sélectionner les plus prometteurs pour un accompagnement professionnel. A l’issue de ces sélections, les jeunes talents auront l’opportunité de se produire sur des scènes professionnelles avec des personnalités reconnues et une large couverture médiatique, selon les initiateurs. Cinquante créations seront sélectionnées, représentant environ 250 jeunes pour un premier soutien à la production d’une œuvre sous format numérique. Par la suite, 21 créations seront sélectionnées et bénéficieront d’une résidence artistique avec 7 centres culturels régionaux.
‘’Une soirée de restitution sera organisée à chaque sortie de résidence, permettant ainsi aux jeunes de présenter leurs œuvres scéniques face à une audience majoritairement jeune qui constituera également le jury de sélection avec des professionnels présents’’, souligne la coordinatrice du projet Camille Seck.
Elle précise qu’un projet par centre culturel sera retenu pour participer à la grande finale, amenant ainsi à 7 le nombre de créations finalistes : 3 en musique, 2 en théâtre, 2 en danse’’. Toujours selon la présentatrice du projet, l’ensemble des talents sélectionnés pour la grande finale bénéficieront d’une semaine de préparation ‘’intense’’ avec des coachings par experts locaux et internationaux, des rencontres avec des célébrités du secteur culturel et des formations en management artistique, connaissances de l’industrie culturelle, relations publiques.
De plus, les lauréats de ‘'Sunu talents’’ auront droit à un accompagnement financier et personnalisé pour la réalisation de leur production artistique et les outils de promotion nécessaires au lancement de leur carrière au niveau local et international. Ceci pour renforcer leur visibilité. ‘’Une tournée nationale sera organisée avec une scène mobile participant à l’accès à la culture pour tous et la valorisation de ces jeunes locaux incarnant l’image des possibles et de la réussite au Sénégal’’, explique-t-on. Et la grande représentation finale sera organisée à Dakar, ‘’pour un souci de qualité technique, en collaboration avec une télévision nationale’’, précise le directeur de Goethe-Institut, Philipp Küppers.
Cet institut qu’il dirige est l’initiateur du projet ‘’Les voix de la terre’’, avec le soutien de la coopération allemande Giz, dans le cadre du programme “Réussir au Sénégal”.
Par ailleurs, le projet ‘’Les voix de la terre’’ a lancé une plateforme web avec pour objectif de documenter et de cartographier la scène culturelle régionale sénégalaise. ‘’Quand je suis arrivé ici, ça fait trois ans déjà, j’ai passé beaucoup de temps à chercher des festivals culturels et des entrepreneurs culturels qui se trouvent dans les régions. Je trouve qu’il est important d’avoir un seul accès qui permet de voir ce qui se passe dans telle ou telle autre région’’, a relaté Philipp Küppers, soulignant la difficulté d’accéder à une cartographie globale des nombreuses manifestations culturelles existant au Sénégal. Pour l’équipe de ce projet, il n’est également pas toujours aisé, pour les acteurs des différentes régions, de créer des ponts, et donc de nouvelles opportunités interrégionales. Ses membres estiment que ‘’la plateforme web ‘Culture Sénégal’ permet de répertorier les évènements sur l’ensemble du pays par région et/ou par discipline, et s’avère être un outil essentiel pour connecter les auteurs culturels et apporter une visibilité au dynamisme culturel du Sénégal pouvant accroitre le tourisme et son économie’’.
BABACAR SY SEYE