Les pays face au risque de flambées de rougeole
Les pays africains doivent agir vite, pour éviter une quelconque épidémie de rougeole, en plus de la Covid-19. En conférence de presse hier, la directrice régionale de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour l’Afrique alertait sur le respect du calendrier vaccinal.
Quinze pays africains ont différé leur campagne de vaccination contre la rougeole au cours de l’année écoulée. Ce, afin de concentrer leurs efforts sur la riposte à la pandémie de Covid-19. Sept de ces pays ont mené à terme leur campagne, mais huit autres restent à la traîne et sont, de ce fait, exposés à des risques de flambées de rougeole de grande ampleur.
C’est du moins ce qu’indique la directrice régionale de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour l’Afrique, au cours d’une conférence virtuelle sur la Semaine africaine de la vaccination (24 au 30 avril 2021).
Selon le Dr Matshidiso Moeti, de nouvelles données préliminaires révèlent qu’environ 16,6 millions d’enfants n’ont pas reçu les doses supplémentaires de vaccin contre la rougeole. Ces doses auraient dû être administrées, en Afrique, entre janvier 2020 et avril 2021. Au cours de cette période, soutient-elle, huit pays africains ont notifié d’importantes flambées de rougeole qui ont touché des dizaines de milliers de personnes. Ces flambées épidémiques, à son avis, pouvaient être imputées, en grande partie, à une faible couverture de la vaccination systématique ou aux retards dans les activités de vaccination.
En outre, renseigne-t-elle, l’efficacité de la surveillance de la rougeole en Afrique est tombée au plus bas niveau, en sept ans, jusqu’en 2020. A tel point que seulement 11 pays ont atteint leur objectif.
De l’avis de la directrice de l’OMS pour l’Afrique, les récentes flambées de rougeole, mais aussi de fièvre jaune, de choléra et de méningite mettent en lumière les lacunes inquiétantes observées en matière de couverture vaccinale et de surveillance de la vaccination en Afrique. ‘’Tout en menant la riposte contre la Covid-19, nous devons veiller à ce que nul ne soit gravement exposé aux maladies à prévention vaccinale. J’invite instamment tous les pays à redoubler d’efforts dans la fourniture des services de santé essentiels, notamment en ayant recours aux campagnes de vaccination qui permettent de sauver des vies’’, demande le Dr Matshidiso Moeti.
Pour elle, la rougeole est une affection tellement contagieuse que l’on doit atteindre un taux de couverture vaccinale anti-rougeoleuse de 95 % de la population. Cela, pour éviter les flambées épidémiques dues à cette maladie.
Pourtant, dit-elle, la couverture par la première dose du vaccin à valence rougeole stagne autour de 69 %, depuis 2013 dans la région africaine de l’OMS. En 2019, seulement sept pays de la région ont atteint un taux de couverture de 95 % par le vaccin à valence rougeole. Cette faible couverture de la vaccination contre la rougeole, à son avis, révèle une lacune plus profonde. A savoir la stagnation de la vaccination systématique en Afrique, une situation exacerbée par la pandémie de Covid-19 et les restrictions qu’elle entraîne. ‘’La majorité des maladies, y compris le tétanos, la diphtérie et la fièvre jaune, doivent faire l’objet d’une couverture vaccinale de 90 % de la population. Or, les taux de couverture en Afrique oscillent entre 70 et 75 % depuis une décennie’’, déplore-t-elle.
En outre, le Dr Moeti informe que dans la région africaine, environ neuf millions d’enfants ne reçoivent pas leurs doses de vaccin d’importance vitale chaque année. En plus, un enfant sur cinq n’est toujours pas protégé contre les maladies à prévention vaccinale. Celles-ci coûtent la vie à plus de 500 000 enfants âgés de moins de 5 ans en Afrique, chaque année.
Malgré ces difficultés, soutient-elle, l’Afrique a été certifiée exempte de poliovirus sauvage en 2020. La vaccination a également un impact bénéfique considérable sur d’autres maladies comme le cancer du col de l’utérus, l’hépatite et la maladie à virus Ebola. Avant de reconnaitre que ces dernières années, la région a accompli des progrès considérables dans la lutte contre la méningite A et de nouveaux vaccins encore sous-utilisés ont été introduits. C’est le cas du vaccin antipneumococcique conjugué, qui est administré dans 40 pays africains. Néanmoins, souligne le Dr Moeti, des mesures intégrées s’avèrent nécessaires pour accroître et élargir l’accès à la vaccination, dans le cadre des systèmes de soins de santé primaires.
VIVIANE DIATTA