Publié le 11 Feb 2023 - 00:29
LICENCIEMENTS ABUSIFS, ARRIÉRÉS DE SALAIRE...

Sénégal, terre d'injustices

 

Appuyée par l'ancienne Première ministre Aminata Touré et le mouvement Frapp, beaucoup de collectifs sénégalais en lutte ont fait part de leur colère noire.

 

Hier, une dizaine de collectifs sénégalais a fait part de son mécontentement à l'opinion nationale. Parmi ces collectifs soutenus par l'ancienne ministre de la Justice et  ex-Première ministre Aminata Touré et le mouvement Frapp, figure celui des étudiants de l'université du Sahel orientés par l'État du Sénégal. Leur représentante, Mariama Sarr, s'est adressée directement au ministre de l'Enseignement supérieur Moussa Baldé. ''Nous vivons une situation déplorable, depuis mai 2021. Cela fait maintenant deux ans. Nous peinons à recevoir nos diplômes, parce que l'État du Sénégal n'a pas respecté ses engagements envers l'université'', fulmine-t-elle. La somme qui doit être versée à l'université tourne autour de 200 millions. Les étudiants demandent que ce problème soit définitivement réglé.

Les villages impactés par l'université Sine-Saloum El Hadj Ibrahima Niass de Kaolack, grognent aussi. Le président du collectif de ces impactés, Ibrahima Touré, souligne d'emblée qu'ils ne sont pas contre l'implantation de l'université. Seulement, au départ, elle devait être installée sur 50, voire 100 ha. Mais actuellement, elle occupe 300 ha. De plus, d'après lui, l'État leur avait promis une université de quatrième génération, à l'image de celle de Dakar, avec toutes les facultés.

''On nous a menti, parce qu'il a une seule faculté à vocation agricole'', peste Ibrahima Touré. Ainsi, ce collectif, qui englobe six villages, dénonce le fait que l'État prenne les 300 ha, alors qu'il n'a pas vu ce à quoi il s’attendait. Le collectif a, d'ailleurs, bloqué les travaux du mur de clôture. Il craint que, à l'avenir, des gens prennent ces terres pour les vendre.

Ciment du Sahel et Dangote au banc des accusés

Un autre collectif, un autre problème. Les Ciments du Sahel et Dangote sont pointés du doigt par un collectif de défenseurs de l'environnement. Ce dernier alerte sur les problèmes environnementaux et fonciers qui sévissent dans leur localité où sont installées ces entreprises.

''Les problèmes nous sont causés en grande partie par les carrières d'exploitation d'argile des Ciments du Sahel et de Dangote. Nous rappelons que malgré toutes les démarches que nous avons entreprises, notre localité continue à souffrir de l'impact négatif de ces carrières'', regrette le porte-parole Mouhamadou Ndour.

D’après lui, le non-respect des normes environnementales par ces carrières fait que l'économie du village, qui reposait essentiellement sur l'agriculture et l'élevage, soit aujourd'hui négativement affectée.

Et au mois de septembre dernier, un drame s'est produit. ''Un des nôtres est mort noyé dans l'un des bassins causé par les Ciments du Sahel. Une fois sur les lieux, nous avons constaté qu'il n'y avait ni panneau d'interdiction ni grilles de protection, encore moins de gardien'', déplore M. Ndour.

De son côté, l'Association des professionnels de la pêche industrielle exige l’application de la Convention de l'OIT n°188 qui parle de la pêche industrielle. Elle a été ratifiée en 2018 et est toujours en vigueur. ''Depuis deux ans, on court derrière le ministre pour l'application. Nous ne quémandons pas de l'argent, ne cherchons pas de subvention ; nous voulons le respect de cette convention'', demande le représentant Ibra Diop.

Ensuite, ce fut au tour des travailleurs d’une société qui vend du goudron aux entreprises qui construisent des routes d'étaler leurs doléances. ''L'entreprise gagne des milliards. Aujourd'hui, elle nous doit 500 millions F CFA. Cela fait des années qu'on nous doit des arriérés de salaire. On nous doit beaucoup d’argent ; les IPM ne marchent pas ; on ne nous a pas donné notre indemnité de logement et de transport'', dénonce le porte-parole du collectif Elimane Abdoul Kane.

Presque les mêmes problèmes à la Senta. ''Le Sénégal n'a qu’un seul problème : c'est l'injustice. Il y a plus de sept mois d'arriérés de salaire. La directrice fait ce qu'elle veut. Nous n'avons pas de couverture de maladie universelle, ni de versement d'Ipres. Et l'entreprise ne paie pas d'impôts'', dénonce Mamadou Lamine Guèye du Collectif des travailleurs de la Senta.

Arriérés de salaire, lenteurs judiciaires

De leur côté également, les employés de Baba Diop réclament à leur boss 31 millions 250 mille F CFA d'arriérés de salaire. Pourtant, Baba Diop avait donné une contribution à hauteur de 250 millions, dans le cadre du fonds de lutte contre la Covid-19. ''Nous avons gagné la bataille judiciaire. Mais deux ans après le verdict, nous n'avons toujours pas reçu notre argent'', fait savoir Anta Diop, représentante des travailleurs.

À la société ADS SA, les travailleurs disent être des victimes collatérales dans l’affaire Karim Wade concernant la traque des biens mal acquis. ''Un bon jour, on nous a demandé d'arrêter de travailler dans l'aéroport, alors qu'on avait des contrats à durée indéterminée. Nous avons fait tout notre possible pour que justice soit faite. Nous avons reçu une partie des arriérés de salaire : 2 millions F CFA chacun. Depuis cette avance reçue en 2016, il n'y a plus rien eu'', soutient le porte-parole Cheikh Alioune Wade.

Non aux détournements d’argent

À la société Matforce, 58 employés ont été licenciés, en 2021, avec sept mois d'arriérés de salaire. ''Nous avons tant attendu la justice. Nous avons usé tous les moyens, mais jusqu'à présent, rien de définitif n'a été réglé'', regrette Jacques Sarr, porte-parole du collectif des licenciés.

Pourtant, la justice avait déjà tranché. Ainsi, le collectif demande à la nouvelle législature et à la justice de faire tout pour que les lenteurs dans les procédures judiciaires soient revues. Il exige l’exécution des décisions de justice.

''Le PDG nous avait promis de nous faire souffrir plus que les employés de la défunte compagnie Air Afrique. On ne peut pas faire du tort à des gens puis brandir des menaces. Il dit qu'il a les moyens et les relations. Nous, en tant qu'employés, ça nous fait penser que la justice est dedans'', relate Jacques Sarr. ''Nous disons à Mamadou Sow que désormais, le collectif a décidé de mener une lutte beaucoup plus intense, parce qu'on a tant attendu la justice et il n'y a pas gain de cause'', poursuit-il, non sans annoncer des manifestations.

Mimi Touré a personnellement vécu ce genre de situation. Selon elle, depuis longtemps, il existe des contentieux non vidés au Sénégal ; ce qui n'est pas normal. ''J'étais cadre à la Sotrac. Turbulente, je faisais partie des membres du syndicat. Et j'ai été licenciée avec une dizaine de cadres. Le tribunal a reconnu que ce licenciement a été abusif. Le contentieux a duré 25 ans. Donc, ce n'est pas nouveau’’. Au sujet de la pêche industrielle, elle invite l'État à respecter la convention. ''Le Conseil supérieur de la magistrature doit être élargi pour que les représentants des travailleurs puissent être au courant de ce type de contentieux'', dit Aminata Touré.

Prenant la parole à son tour, Guy Marius Sagna a fait le constat que c'est la question de l'argent qui revient tout le temps. ‘‘C’est à cause de l'argent que le directeur de l’université du Sahel, ancien candidat à l'élection présidentielle de 2019, Cheikh Issa Sall, retient les diplômes des élèves. Donc, bien qu'il soit proche du président maintenant, il ne reçoit pas son argent'', peste le député qui dénonce les détournements d'argent.

BABACAR SY SEYE

Section: 
NOUVELLES LICENCES DANS LE SECTEUR DES PÊCHES : Priorité au marché local et aux conserveries sénégalaises
LANCEMENT DU RÉSEAU DES ENTREPRISES POUR L'ÉGALITÉ DES CHANCES : Simplon veut booster l'employabilité des jeunes
BUDGET 2025 : La feuille de route du gouvernement 
MODICITÉ DE LA CONTRIBUTION ÉCONOMIQUE LOCALE : Ngoundiane dans la tempête budgétaire
LOI DE FINANCES 2024 : Le régime engage la course contre la montre
GRÈVES DANS LE SECTEUR DE LA SANTÉ ET DANS LES UNIVERSITÉS : Le régime face à un front social en ébullition
3E ALTERNANCE : La gauche invitée à accompagner le nouveau régime
JOURNÉE NATIONALE DES DAARA : Le ministre de l'Éducation nationale en tournée dans les foyers religieux
SUPPRESSION DES VILLES : Diomaye-Sonko acte-t-il la volonté de Macky Sall ?
OUSMANE SONKO AUX DÉPUTÉS DE PASTEF : ‘’Cette Assemblée nationale doit réconcilier les Sénégalais avec l’organe parlementaire’’
ASSANE DIOMA NDIAYE SUR LE MANDAT DE LA CPI CONTRE NETANYAHU ET CONSORTS : ‘’Le Sénégal, en tant que signataire du Statut de Rome, a l’obligation de respecter ses engagements internationaux’’
LEADERSHIP PARLEMENTAIRE : Les alliances cachées et les ambitions dévoilées
CRISE POLITIQUE AU MALI : Le limogeage de Choguel Maïga, symbole des fractures au sein de la junte
RÉSULTATS PROVISOIRES DES LÉGISLATIVES : La suprématie de Pastef confirmée
GESTION DES RESSOURCES NATURELLES : Haro sur le pillage 
PR. ALIOU THIONGANE - CADRE PASTEF MATAM : ‘’La restructuration du parti s’impose à Matam’’
Moustapha Diakhaté convoqué
THIÈS : La coalition Pastef rafle toutes les 15 communes
ASSEMBLÉE NATIONALE : Le projet de loi de finances pour 2025 finalisé dans les prochains jours
MARCHÉS DE L’ARACHIDE : L’État cherche un consensus