Publié le 5 Jul 2023 - 16:16
UNITÉ BBY

Une épreuve de feu !

 

 

Avec plus de 470 maires, 37 présidents de conseil départemental, 82 députés, près de 50 % de l’électorat aux dernières élections législatives, Benno Bokk Yaakaar demeure une force politique indéniable, dont le contrôle est devenu l’enjeu majeur en direction de la prochaine Présidentielle, surtout après le renoncement de son porte-étendard à une troisième candidature.

 

En rencontrant, samedi dernier, le président de la République pour le supplier de se présenter à la Présidentielle de 2024, la plupart des élus de la coalition Benno Bokk Yaakaar étaient loin de se douter que leur choix allait leur faire faux-bond. Même si certains avaient envisagé l’hypothèse. C’est le cas de Thérèse Faye Diouf, maire de Diarrère (département de Fatick). Sur un air triste empli d’inquiétude, elle s’interrogeait : ‘’Président, si vous nous quittez, vous allez nous laisser avec qui ? Oumar Youm l’a déjà dit : que peut-on faire d’ici 2024 ? Nous ne connaissons que vous ; c’est vous notre choix. Si vous décidez de partir, vous allez nous laisser avec qui ? Moi, c’est ça ma question.’’

Malheureusement pour elle, cette scène émouvante et triste ne fera pas reculer le président de la République, qui a déclaré avant-hier qu’il ne sera pas candidat en 2024. Depuis, la question qui se pose, c’est surtout qui pour le succéder au sein de son parti ?

Parmi les profils qui se dégagent, il y a le Premier ministre Amadou Ba qui serait un choix de raison ; le président du Conseil économique, social et environnemental Abdoulaye Daouda Diallo ou, dans une moindre mesure, le beau-frère Mansour Faye qui pourraient être des choix du cœur, sans exclure que Macky sorte une botte secrète qui pourrait être un choix d’opportunité pour limiter l’hémorragie.

Quel que soit le choix, il serait très difficile, pour ne pas dire impossible de préserver l’unité de son parti l’Alliance pour la République, a fortiori de la coalition Benno Bokk Yaakaar. Déjà, samedi dernier, Oumar Youm, président du groupe parlementaire de la majorité, se montrait très sceptique. ‘’Monsieur le Président, si vous voulez que la famille se disloque, il n’y a pas à chercher midi à quatorze heures. Levez-vous tout simplement et dites que vous ne serez pas candidat. Aujourd’hui même, la famille va se disloquer. Vous êtes le seul qui peut préserver l’unité de cette famille. Personne d’autre’’, lance-t-il tout de go, devant les applaudissements des plus de 500 maires et présidents de conseil départemental. Non sans préciser : ‘’Si on se dit la vérité, il n’y a même pas d’autres possibilités. Nous n’avons aucun autre candidat qui pourrait rassembler toute la famille BBY.’’

Il faut relever que le maire de Thiadiaye, ancien directeur de cabinet du président, Oumar Youm, a toujours été accusé de nourrir des ambitions de succéder au chef de l’État. D’ailleurs, beaucoup n’avaient pas hésité à expliquer son limogeage du gouvernement en 2019 par ses ambitions. À l’instar de plusieurs autres comme Amadou Ba devenu par la suite PM, Mouhamadou Makhtar Cissé, retourné depuis lors à l’Inspection générale d’État, Aly Ngouille Ndiaye redevenu ministre en charge de l’Agriculture à la faveur du dernier remaniement. Que sont devenues toutes ces ambitions ? Le temps pourrait sans doute édifier davantage l’opinion.

Oumar Youm prédit la dislocation, Thérèse Faye s’interroge sur la difficulté de trouver un remplaçant pour 2024

Une chose est sûre : le Premier ministre semble avoir une nette avance par rapport à ses concurrents. Selon des sources proches de la primature, quelques moments avant la déclaration du chef de l’État, lundi, une importante rencontre a été tenue au siège de l’APR en présence de la première dame et de certains militants de la première heure. ‘’La décision historique du président ouvre sa succession avec l’impérieuse nécessité de trouver un candidat capable de mener les troupes vers une victoire éclatante au soir du 25 février 2024’’, lit-on dans la note, qui ne manque pas de donner une idée sur le profil : ‘’Beaucoup d’observateurs pensent que le Premier ministre actuel a le meilleur profil. Ancien ministre des Finances et du Budget, ancien ministre des Affaires étrangères, Amadou Ba a aussi été maitre d’œuvre du Plan Sénégal émergent.’’

Au niveau de la coalition, l’heure semble plutôt à la résignation. Dans un communiqué, BBY salue une décision qui honore sa famille politique, ses alliés et sympathisants, mais aussi tout le Sénégal et toute l'Afrique. ‘’La coalition appelle tous ses responsables et militants à rester arrimés aux valeurs de solidarité et de respect mutuel qui ont toujours fait notre force. Il ne fait aucun doute que Benno dispose en son sein de toutes les ressources et capacités nécessaires pour continuer à bénéficier de la confiance de la majorité des Sénégalais. La coalition Benno Bokk Yaakaar appelle tous ses militants sympathisants et tous les Sénégalais épris de paix et de progrès à une mobilisation exceptionnelle autour du leadership du président Macky Sall et de son projet pour un Sénégal émergent à l'horizon 2035’’.

Le PS bat le rappel des troupes

Au Parti socialiste, on n’a pas perdu du temps pour convoquer le Secrétariat exécutif national, qui va se réunir dès ce jeudi. Ce sera sans doute l’occasion de discuter de ces questions. Interpellé, le porte-parole Abdoulaye Vilane précise : ‘’D’abord, permettez-nous de nous réjouir de la fierté que cette décision du président nous procure, même si nous avions souhaité en toute loyauté et en toute transparence qu’il soit notre candidat. Nous nous réjouissons de la décision et de son impact dans le positionnement du Sénégal au plan international.’’

À la question de savoir pourquoi ils n’avaient pas mis cet aspect en avant en demandant au président d’être leur candidat, il rétorque : ‘’Nous n’avons pas mis en avant parce que pour nous, ce n’est pas évident de trouver hic et nunc un autre candidat qui fait l’unanimité. Là, on va le faire parce que ‘ku amoul nday namp maam’. Quand on n’a pas ce que l’on veut, on se contente de ce que l’on a.’’

Revenant sur la stratégie du PS, il demande de prendre notre mal en patience et souligne que le Secrétariat exécutif national va sans doute se pencher sur la question demain jeudi. ‘’Nous allons nous réunir pour analyser la situation et envisager la conduite à tenir. Ce qui est certain, c’est que le Parti socialiste a toujours réaffirmé son ancrage à Benno Bokk Yaakaar. Nous pensons que tous les membres de la coalition vont en faire de même…‘’ Y aura-t-il un candidat issu des flancs du PS ? Voici la réponse du porte-parole : ‘’Prenez votre mal en patience. En tant que porte-parole, je ne peux pas me prononcer avant la décision des instances habilitées. Mais la vocation d’un parti, c’est de conquérir le pouvoir. Je ne serais donc pas surpris qu’il y ait des candidats à la candidature issus du parti. À ce moment-là, puisque nous sommes membres d’une grande coalition, nous allons dialoguer comme nous l’avons fait avec nos adversaires pour voir la meilleure solution.’’

Au-delà de la mouvance présidentielle actuelle, la non-candidature de Macky Sall va entrainer, à coup sûr, une redistribution des cartes dans la plupart des familles politiques. Il ne faut pas oublier que BBY, c’est plus de 470 maires, 37 présidents de conseil départemental, soit plus de 80 % des chefs d’exécutifs locaux, en plus des 82 députés à l’Assemblée nationale, pour près de 50 % de l’électorat aux dernières élections législatives. Un trésor de guerre qui ne laisse indifférent presque aucun parti politique.

 Jusque-là, le leader de Taxawu Khalifa Sall a manœuvré pour au moins accueillir les partis de gauche, membres de la mouvance présidentielle, en particulier sa famille politique le Parti socialiste.

Khalifa Sall et le PDS en embuscade

S’il appelle de tous ses vœux cette éventualité, M. Vilane tient à reformuler notre question qui portait sur une possible réponse du PS à la main tendue de Khalifa. ‘’La question n’est pas bien posée. Il faut souligner que nous, depuis 2019, nous parlons des retrouvailles, du vivant même d’Ousmane Tanor Dieng. Rappelez-vous, le 2 avril 2019, après la prestation de serment du président, Ousmane Tanor Dieng avait lancé un appel en interpellant directement Khalifa Sall. Donc, faites-nous justice pour ne pas nous faire parler de lui, qui connait notre adresse, qui connait nos numéros de téléphone, qui connait nos domiciles, qui connait ce qui nous lie dans le passé, qui sait ce qui peut nous mettre encore ensemble, c’est-à-dire l’idéal commun’’.

Abdoulaye Vilane : ‘’Khalifa Sall connait notre adresse, nos numéros de téléphone et il sait ce qui peut nous mettre encore ensemble.’’

Cela étant précisé, le président du Conseil départemental de Kaffrine se dit toujours favorable à ces retrouvailles, qui vont au-delà des deux forces politiques que sont Taxawu et le PS. ‘’C’est insensé de voir les libéraux se retrouver, les sociodémocrates le faire avec Pape Demba Sy, alors que nous rouge et vert nous ne cherchons pas à le faire. Si nous ne le faisons pas, nous en répondrons devant le tribunal de l’histoire. Maintenant, pour dialoguer, il faut au moins être deux. La réconciliation ne se proclame pas, elle se construit. Chacun de nous est interpellé. En ce qui me concerne, je précise que je parle en mon nom, de Robert Sagna à Moustapha Niasse, en passant par Souty Touré, Abdoulaye Matar Diop, je suis disposé à travailler à faciliter les conditions de retrouvailles. Je précise que cela n’engage que moi. Je le ferai sans me renier, sans vomir notre ancrage dans le cadre de BBY’’.

Contrairement aux sceptiques qui pensent que sans le président Sall comme candidat, c’est l’éclatement à coup sûr de BBY, Vilane, lui, veut encore y croire. Pour lui, vouloir c’est pouvoir. ‘’Puisque vouloir c’est pouvoir, insiste-t-il, nous allons travailler à avoir ce candidat consensuel. Ce qu’il faut retenir pour le moment, c’est qu’en se sacrifiant, Macky Sall entre dans le panthéon des grands hommes d’État, comme Senghor, Diouf et Wade. Et ce qui est plus charmant, c’est que pour la première fois, nous avons un président de la République qui va organiser une élection à laquelle il ne prendra pas part. Cela nous permet en même temps d’enterrer définitivement cette question de troisième candidature. Ce qui nous fait dire qu’en toute chose malheur est bon’’.

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‘’Unis, aucun parti ne peut faire face à BBY’’

Même s’il n’est pas candidat à sa propre succession, Macky Sall aura son candidat. Il l’a répété à toutes les occasions, en invitant la coalition Benno Bokk Yaakaar à s’unir et à taire les égos pour continuer à régner sur le Sénégal. Si nous sommes unis, personne ne peut nous faire face, disait le président à l’occasion de son audience avec les élus de la mouvance présidentielle.

Même s’il n’est pas candidat à sa succession, le président de la République n’a pas caché son intention d’avoir un candidat pour la prochaine élection. Et il a montré sa préférence pour la conservation de la dynamique Benno Bokk Yaakaar pour continuer à régner sur le Sénégal.

‘’Nous sommes sur la bonne voie et nous devons poursuivre sur cette voie, qui est la voie de la réussite, celle de la stabilité, celle de la sécurité, celle de l’avenir de nos enfants. Cette voie, nous n’avons pas le droit de la perdre ou de créer des situations qui pourraient faire regretter le pays. Parce qu’en réalité, le danger rôde autour de nous et en notre sein. Si on reste uni, personne ne peut nous faire face, mais si on est divisé on perd…’’, mettait-il en garde lors de la rencontre avec les élus.

L’enjeu du moment, selon Macky Sall, c’est d’abord d’être uni. ‘’Unis, il n’y a aucune force politique qui peut faire face à BBY. Cette assemblée en est une preuve exaltante. Plus de 85 % des maires et présidents de conseil départemental. Ce n’est plus une majorité, c’est une unanimité. Et vous êtes l’échantillon représentatif du peuple. Comme l’a dit quelqu’un, en politique, la seule légitimité qui vaille, c’est l’élection. Alors ceux qui s’agitent dans les médias ou les réseaux sociaux, ne croyez pas que leur avis peut m’affecter. Z24 ou Y25, ce n’est pas ce qui sera déterminant, quel que soit le schéma que je serai amené à prendre’’, relevait le chef de l’État, non sans inviter les siens à taire les différends et les égos.

L’année prochaine, informe-t-il, le budget sera à 7 000 milliards F CFA, ce qui va démultiplier toutes les possibilités en matière de construction d’infrastructures pour nos populations. Pour le président, les alliés n’ont pas le droit de gâcher par des désunions et des combats d’égos tous ces efforts accomplis. ‘’Là, enchaine-t-il, je m’adresse aux cadres du parti, sans exception. Personne n’a le droit de compromettre le travail qui est en perspective pour le bénéfice des populations. On doit mettre en avant l’intérêt général, l’intérêt de la coalition, l’intérêt du parti. Si nous sommes mobilisés, il n’y a pas de crainte, parce que le chemin est balisé avec le PSE qui est à l’horizon 2035’’.

Au cas contraire, semble prévenir le président Sall, c’est la porte ouverte aux ennuis. ‘’Si on est divisé, on perd ; et on perd tout. Nous sommes dans un régime présidentiel et il ne faut pas se faire d’illusions. Quand un président arrive, s’il le souhaite, il peut dissoudre toutes les mairies. Il suffit d’un simple décret ; il peut en faire de même pour l’Assemblée, pour tout le reste. Donc, la seule manière de conserver tout ça, c’est de s’organiser pour gagner la Présidentielle. Il ne faut pas se faire d’illusions. Il faut donc faire preuve de lucidité. C’est normal que chacun veuille être devant. Mais il faut en mesurer les conséquences’’.

 

Section: 
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