Publié le 18 Oct 2012 - 22:06
La Chronique de Magum Kër

 Macky cherche opposition

 

 

Le président Macky Sall a récemment décliné une préoccupation démocratique du temps de la première alternance : ''Il faut absolument donner un statut à l’opposition.'' Le problème pour lui, plus encore que pour son prédécesseur, est qu’il n’a pas d’opposition au sens strict du terme. Le clivage traditionnel qui délimitait les partis selon leur idéologie et leur programme n’a plus cours depuis son avènement au pouvoir, après le ralliement au second tour de toute l’opposition à sa bannière sans autre aspiration commune que la chute du régime de Me Wade. Mais sans doute, la question du statut de l’opposition est à l’ordre du jour dans un contexte qui peut être favorable à sa résolution.

 

Le coup de gueule du placide maire de Dakar, Khalifa Sall, se situe dans ce contexte quand il rappelait à l’ordre les alliés trop attentionnés du président et les exhortait à s’occuper de leurs partis politiques. Le conseiller spécial du président, Abou Abel Thiam, avait repris la balle au rebond pour annoncer avec un empressement suspect que le pays avait en effet besoin d’une forte opposition. Cet échange culmine avec un débat interne du Parti socialiste (PS) qui posait en amont de la succession éventuelle de son secrétaire général Ousmane Tanor Dieng, le nécessaire recentrage de la formation verte sur l’échiquier politique national, l’alliance présidentielle ne lui étant pas faste.

 

Le Parti démocratique sénégalais (PDS) n’est-il pas une opposition assez forte ? Cela peut se concevoir dans la mesure où sa représentation parlementaire, du fait d’une scission préélectorale, était moindre qu’aux jours de la prime opposition au régime de Senghor. Mais ce vœu vertueux pouvait-il couver le risque d’une jonction entre les socialistes et les libéraux dans l’opposition sans que ne se pose éventuellement entre eux l’inévitable question de préséance que ne manqueraient pas d’attiser les défections de leurs rangs que l’attrait du pouvoir néolibérale susciterait. Le président Macky pourrait alors arbitrer la querelle et choisir à sa guise le chef de l’opposition qui lui serait ainsi redevable, donc passablement affaibli et domestiqué.

 

Une autre interprétation de la déclaration du conseiller spécial de la présidence serait que le PDS, parti d’origine du président et de ses plus proches compagnons, exerce encore quelque nostalgie sur ceux-là qui n’en sont sortis que contraints et forcés. Alors, pourquoi lui réserver un statut de chef de l’opposition alors que la question du leadership précisément n’y est pas encore tranchée entre Omar Sarr et les autres chefs de factions à l’affût ? Un droit au retour non écrit devrait profiter aux ex-frères qui ne se sont pas trop compromis dans les purges du parlement et du parti libéral des actuels hommes forts du parti présidentiel où ils seraient les bienvenus : une opération ''Toxu'' comme en rêva Idrissa Seck, en vain.

 

Cette hypothèse prête quelque machiavélisme au camp présidentiel et suggérerait que sa main n’est pas étrangère aux remous qui déstabilisent le Parti socialiste. Car autant Moustapha Niasse semble rendu inoffensif par les égards que lui témoigne Macky Sall et la dérive de son parti vers la fusion, autant Ousmane Tanor Dieng maîtrise encore le sien, bien implanté malgré son score électoral relativement faible. L’avènement du parti frère français au pouvoir et la position éminente dans l’échiquier mondial conférée par sa place dans la nomenclature de l’Internationale socialiste, conforte son leadership que le chef de l’organe affilié ''Convergence socialiste'', Malick Noël Seck, a défié au mauvais moment.

 

Un prétendant circonstanciel au statut de chef de l’opposition serait Idrissa Seck que des secteurs de son parti ont appelé à l’autodétermination. Mais le chef de l’opposition face à une aussi large alliance au pouvoir devrait être un rassembleur constant. Or si Idrissa Seck peut consteller autour de sa personne une galaxie de compétences, il n’a jamais su utiliser cette force autrement que pour son ambition présidentielle têtue. Encore que l’opposition, par souci de cohérence, devrait être de gauche, ce qui donne quelque chance à Mamadou Diop dit Decroix, pour peu qu’il sache proposer une vision unitaire généreuse à la gauche qui se veut ''historique'', faute de s’imposer dans le champ réel où se fait l’histoire du monde.

 

 

 

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