Le CDEPS dénonce une réouverture “cavalière” du fonds par le ministère

La réouverture de la plateforme d’enregistrement des médias suscite la colère du CDEPS. L’organisation parle d’une procédure « illégale et cavalière » menée sans concertation, à la veille de la clôture budgétaire de l’État.
Le climat de tension entre la presse privée et le ministère de la Communication, des Télécommunications et du Numérique (MCTN) s’est à nouveau ravivé hier. Dans un communiqué rendu public, le Conseil des Diffuseurs et Éditeurs de Presse du Sénégal (CDEPS) accuse le ministère d’avoir violé la loi en procédant, sans concertation ni information préalable, à la réouverture de la plateforme de déclaration des médias pour le Fonds d’Appui et de Développement de la Presse (FADP).
Selon l’organisation patronale, les entreprises de presse ont appris par voie de presse l’ouverture de cette plateforme, sans aucun communiqué officiel ni précision sur la durée, les modalités ou les différentes étapes du processus. Une attitude que le CDEPS juge « cavalière » et « méprisante » envers les acteurs du secteur. L’organisation rappelle que le décret n° 2021-178 du 27 janvier 2021 fixe clairement les règles de gestion du FADP et prévoit la convocation d’un Conseil de gestion avant toute répartition. Ce conseil, instance délibérative chargée de définir les orientations et les critères d’attribution, n’aurait jamais été convoqué.
Le CDEPS estime que le ministère a choisi délibérément d’écarter cet organe, violant ainsi la loi et trahissant les principes de transparence et de bonne gouvernance. Le moment choisi pour lancer la procédure renforce, selon le CDEPS, les soupçons d’irrégularité. En effet, cette réouverture intervient à moins de deux semaines de la clôture de l’exercice budgétaire de l’État, prévue le 15 novembre, alors que le processus d’attribution du FADP s’étale habituellement sur trois à quatre mois. « Il s’agit d’un passage en force, d’une manœuvre précipitée pour engager des dépenses avant la fin de l’année », confie un membre du bureau exécutif du CDEPS, sous couvert d’anonymat.
Le Conseil s’inquiète également d’un changement majeur dans les critères d’attribution. Désormais, les fonds devraient être distribués uniquement sur la base de projets déposés par les entreprises de presse, sans considération pour leurs difficultés financières immédiates. « Les maisons de presse privées font face à des défis structurels dont les arriérés de salaires, les dettes fiscales et sociales, les loyers impayés. Ce fonds a été créé pour les aider à respirer, pas pour financer des projets théoriques », déplore le communiqué.
De son côté, le ministère de la Communication justifie sa démarche par un souci de rigueur et de transparence. Habibou Dia, directeur de la Communication, a récemment rappelé que le secteur devait être assaini. « Sur plus de 600 entreprises de presse déclarées au Sénégal, environ 400 ne sont pas conformes. Il faut assainir le milieu et encourager ceux qui respectent les règles », a-t-il déclaré lors d’une récente intervention. Selon lui, la gouvernance des médias doit être « vertueuse et exemplaire ». Mais ces arguments peinent à convaincre le CDEPS, qui y voit plutôt une tentative d’affaiblir la presse privée par des moyens administratifs.
L’organisation estime que le ministère cherche à « placer les acteurs devant le fait accompli » pour mieux contrôler la répartition des ressources. « Après les campagnes de dénigrement, voici maintenant les manœuvres économiques », dénonce le communiqué. Pour le CDEPS, le gouvernement a perdu toute crédibilité dans sa relation avec les entreprises de presse. Face à ce qu’il considère comme une dérive grave, le CDEPS annonce son intention de saisir les instances compétentes pour faire respecter la loi et garantir la transparence dans la gestion du FADP. « Nous n’exigeons ni privilèges ni faveurs, seulement le respect des règles et des procédures », conclut le communiqué.
MAGUETTE NDAO







