Publié le 23 Oct 2015 - 16:48
ACHOURA OU "TAMXARIT"

Un événement controversé  

 

La Tamxarit, très connue au Sénégal grâce à la manière dont elle est célébrée, est loin de faire l’unanimité chez la communauté musulmane. Au-delà de l’opposition entre sunnites et chiites, il y a un écart entre les textes islamiques et la pratique des populations.

 

Le malheur des uns fait le bonheur  des autres. Cet adage est vérifié dans la célébration de Achoura ou 10ème  jour du mois de Muharram  du calendrier musulman. Cette  date  a coïncidé avec plusieurs événements heureux ou malheureux dans le monde musulman. C’est pourquoi cette communauté a une vision différente de ce jour. Si les sunnites fêtent l’Achoura en organisant des festivités, les chiites eux commémorent pour leur part  la mort de leur guide, Imam Hussein (Ousseynou), petit-fils du prophète. Au Sénégal, les experts en sciences islamiques sont unanimes sur la non-reconnaissance de cette fête par l’Islam.  Selon eux, la façon dont on célèbre cet évènement est purement culturelle et traditionnelle. Joints au téléphone hier par EnQuête, certains d’entre eux ont soutenu que Dieu et son prophète n’ont jamais recommandé la  célébration de l’Achoura. Mais elle relève de notre tradition.

D’ailleurs, ils expliquent que sa célébration est antérieure à l’islam. Au début, ce sont les juifs qui la célébraient en jeûnant le jour d’Achoura. Selon l’Imam Ismaëla Ndiaye, membre de l’association des imams et prédicateurs du Sénégal, c’est un jour historique car depuis l’époque du prophète Moussa (Moïse), les juifs le célébraient. Il marque la victoire que Dieu avait donnée à Moussa sur Pharaon. C’est ainsi que les juifs jeûnaient le 10ème   jour de Muharram ou "Tamxarit" pour marquer la commémoration de ce succès. Des explications de l’imam Ndiaye, il ressort que quand le Prophète Mouhammad (PSL) est venu, il leur a demandé : « Pourquoi vous les juifs, vous jeûnez ? » Ils répondirent : « C’est parce que c’est le jour où Dieu a donné la victoire à Moussa contre le Pharaon. » Le Prophète (PSL) leur rétorquera : « Nous croyons autant que vous à Moussa donc nous aussi, nous allons le jeûner l’année prochaine. » Mais il faut rappeler que ça, c’était avant que le jeûne du mois de ramadan ne soit obligatoire pour les musulmans.

Selon imam Ndiaye toujours, c’est un jour qui a aussi coïncidé avec le meurtre du petit-fils du Prophète PSL. C’est ce qui fait que pour les chiites, c’est un jour de deuil qu’ils célèbrent jusqu’à présent, même si l’islam ne reconnaît pas un deuil qui dépasse trois jours sauf pour la femme qui doit être en veuvage pendant quatre mois dix jours. Il y a les chiites qui perpétuent ce deuil en s’habillant en noir et en se flagellant le corps. D’autres ont dit : ‘’Comme l’islam interdit qu’on soit en deuil, nous on va fêter. Ils préparent à manger et font plaisir aux enfants.’’ Mais de l’avis de l’ancien imam de la grande mosquée de l’Ucad, tous les deux comportements ne sont pas réellement islamiques.  ‘’L’islam recommande seulement qu’on jeûne le neuvième et le dixième jour du mois de Muharram’’, renseigne-t-il.

Se prononçant sur la manière dont on célèbre la Tamxarit au Sénégal, il explique que nous, ce que nous faisons est une culture islamique ancestrale qui n’a rien à voir avec les recommandations de Dieu et son messager. ‘’L’Achoura ne fait pas partie des fêtes musulmanes car pour qu’il y ait fête en islam, il faut des textes législatifs venant de Dieu ou de son envoyé. Mais jusqu’à présent, on n’a vu aucun texte allant dans ce sens’’,  croit-il savoir.

Sur ce sujet qui ne fait pas l’unanimité au sein  des musulmans, l’imam Ahmadou Makhtar Kanté est plus nuancé que notre précèdent interlocuteur. Il explique qu’on peut bel et bien fêter  l’Achoura car c’est un jour qui symbolise la victoire de Moussa sur le Pharaon, ce qui est important pour les croyants. Selon lui, il faut éviter une lecture trop littéraliste des textes islamiques. ‘’C’est tout à fait acceptable qu’on soit content ce jour, qu’on prépare à manger car celui qui jeûne a besoin de bien se restaurer le soir. Dans beaucoup de pays, les gens le célèbrent à leur manière avec leur tradition’’, explique l’imam de la mosquée du Point E. Mais il précise : ‘’Le Taajaboon a été perverti. L’islam est contre le fait que des hommes s’habillent en femme et vice-versa, et condamne toute forme de folklore. Au début, c’étaient les talibés qui faisaient le tour des maisons des quartiers pour  prier et réciter des versets du Coran, et les gens leur donnaient du mil, du riz et de l’argent. Mais aujourd’hui, la situation a  complètement changé notamment dans les villes.’’

 Le célèbre prêcheur de la radio Sud FM, Oustaz Alioune Sall, partage l’avis de son homologue cité précédemment. Il soutient que ce qui est recommandé par la sunna du Prophète Mouhammad (PSL) est de jeûner le neuvième et le dixième  jour. Quant aux pratiques sénégalo-sénégalaises notamment le "Taajaboon", c’est tout simplement une forme de mendicité qui n’est pas interdite si elle est faite dans les règles de l’art. ‘’Les chiites disent que si on célèbre Achoura, c’est pour le meurtre de Ousseynou ; mais cette fête a précédé son décès. Ils peuvent être tristes, mais dire que personne ne doit fêter ou que le couscous n’est pas bon, c’est autre chose’’, explique-t-il.

 Assassinat de l’Imam Hussein

Les Imams Kanté et Ndiaye ainsi que Oustaz Alioune Sall recommandent aux Sénégalais d’apprendre leur religion pour mieux s’imprégner des ordres de Dieu. ‘’Je demande à tous les croyants de se rappeler que chacun d’entre nous a douze mois de moins dans sa vie. Jeûner le jour de Tamxarit comme le faisait le messager de Dieu PSL est une bonne chose’’, rappelle le célèbre prêcheur de la Radio Sud Fm.  

Mais  l’Achoura coïncide aussi avec un autre évènement douloureux, la mort de l’imam Hussein, guide des chiites. C’est pourquoi, il est considéré comme un jour de deuil chez ces derniers. "Achoura nous rappelle l’assassinat de l’imam Hussein. Il a été tué cruellement à Karbala par les partisans de Yazid Ibn Muawiya. Il luttait pour la conquête du Califat de l’islam’, a indiqué le chargé des affaires religieuses de  l’institut Mozdahir  international de Dakar, Taha Ahmadou Sougou. C’est pourquoi, le Mouvement chiite (les partisans du prophète et de sa famille) a exclu toute festivité pendant ce  jour. Selon  Sougou, c’est Yazid qui a déclaré ce jour comme fête après sa victoire sur le fils d’Ali.  

ABDOURAHIM BARRY  ET OUMAR BAYO BA  (STAGIAIRES) 

 

Section: 
ACCIDENTS DE LA CIRCULATION ROUTIÈRE : Diagnostic d’un phénomène polymorphe aux conséquences incalculables
KOLDA - USURPATION D’IDENTITÉ, ESCROQUERIE PORTANT SUR DES DENIERS PUBLICS… : Un faux enseignant condamné à 1 an de prison, après 5 ans de service
BLANCHIMENT DE CAPITAUX, DETOURNEMENT DE DENIERS PUBLICS… : Le Pool judiciaire financier ne traîne pas
LES EFFORTS DU NOUVEAU RÉGIME DANS LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION : Les organes de contrôle à l'épreuve de l'affaire Farba Ngom
Diomaye - conférence épiscopale
Hôpital Daalaal Jaam de Guédiawaye
Touba en deuil
ACCÈS À L’EAU POUR TOUS AU SÉNÉGAL : L’USAID lance les projets Gire et Wash-Services
ASSISTANCE JUDICIAIRE ET ORGANISATION DU CAPA : Le barreau réclame ses trois milliards, Diomaye exige la tenue de l'examen 
CRISE DU SECTEUR DE LA BOULANGERIE : Longue comme une journée sans pain
COURS ET TRIBUNAUX : Une rentrée spéciale
LUTTE CONTRE LE FAUX MONNAYAGE A KOLDA : Cinq individus condamnés à deux ans de prison
Journée ‘’setal sunu reew’’
SONAGED
Ahmed Bachir Kounta
PÉDOPHILIE ET DÉTOURNEMENT DE MINEURE : S. Sow et ses amis jugés à la Chambre criminelle
CLASSEMENT 2025 DES PUISSANCES MILITAIRES EN AFRIQUE : Le Sénégal occupe la 30e place, l’Égypte leader
VISITE DU PM EN MAURITANIE : Les promesses de Sonko à la diaspora sénégalaise
SAINT-LOUIS : CHAVIREMENT DE PIROGUES À LA BRECHE : Trois pêcheurs portés disparus et une partie du matériel perdue
Questions écrites GMS