Une problématique insoluble ?
La main d’œuvre jeune, 15 à 34 ans, va continuer de croitre suivant la trajectoire démographique du pays, selon les données de l’ANSD (2023). D’un effectif de 4 620 844 en 2013, elle atteindra 8 527 948 en 2035 avant tripler en 2050, pour atteindre 13 549 769. Selon Recensement Général de la Population et de l’Habitat (RGPH-5, 2023), la population résidente totale du pays était de 18 126 390 personnes en 2023 (50,6% d’hommes et 49,4% de femmes) et composée de à plus de 58% de jeunes âgés de 15 à 34 ans. Entre 2013 et 2023, elle a augmenté de 2,9% par an avec une espérance de vie à la naissance au niveau national est passée de 64,7 ans en 2013 à 68,9 ans en 2023 (70 ans pour les femmes et 67,7 ans pour les hommes). En outre, la moitié de la population résidente a moins de 19 ans et les moins de 15 ans représentent 39% de l’effectif total. Les moins de 35 ans constituent 75% des résidents en 2023 (RGPH- 5, 2023).
À ce rythme, l’effectif de la population va doubler dans 25 ans, même si le nombre le nombre moyen d’enfants par femme à la fin de sa vie procréative est passé de 5,3 enfants en 2002 à 4,2 enfants en 2023. Or, cette croissance démographique rapide qui a dépassé la croissance économique pendant de nombreuses années n’a fait qu’accroitre le ratio de dépendance, se présentant ainsi comme l’un des principaux points de déséquilibre pour le développement socio-économique durable du pays. Le sous- secteur de l’emploi constitue un facteur essentiel de croissance économique pour atteindre les objectifs du « Plan Sénégal 2050 ». Pourtant, depuis quelques années, l’État du Sénégal a fait de la problématique de l’emploi des jeunes l’une de ses priorités, compte tenu de la persistance du niveau élevé du chômage et du sous-emploi dans cette composante de la population.
Pour le troisième trimestre de l’année 2024, le taux de chômage élargi a atteint 20,3%, enregistrant une légère hausse par rapport à 2023 à même période (19,5 %), soit une augmentation de 0,8%. Le taux de chômage au Sénégal était en moyenne de 18,01 % entre 1994 et 2024 avec un pic historique de 26,10% atteint au deuxième trimestre 2020(2023). Au Sénégal, 44,5% des ménages sont des ménages agricoles dont la majorité (67,7%) réside en milieu rural. Un niveau d’activité légèrement plus élevé en milieu rural où il est ressorti à « 58,8% contre 58,0% en milieu urbain ». Selon le sexe, poursuit l’étude, « il (le niveau d’activité) est plus élevé chez les hommes que chez les femmes avec des taux respectifs de 68,7% et de 47,7% ».
La répartition selon le milieu de résidence de la population en âge de travailler montre qu’elle est majoritairement concentrée en zone urbaine avec 52,9%. Les jeunes âgés de 15 à 24 ans qui ne sont ni en emploi, ni en éducation, ni en formation représentent 34,4% de cette tranche d’âge. Ce taux est plus élevé en milieu rural (43,8%) qu’en milieu urbain (27,5%), et affecte davantage les jeunes femmes (43,0%) que les jeunes hommes (25,9%).
Lors de l’enquête nationale sur l’emploi au Sénégal, une répartition de la population des chômeurs par tranche d’âge montre qu’il affecte plus cette composante1. Plus de 6 chômeurs sur 10 (62,6%) sont dans la tranche d’âge 15 à 34 ans. Les taux les plus élevés sont observés chez les jeunes âgés de 20 à 24 ans et de 25 à 29 ans, soit respectivement 18,8% et 16,3% ; alors qu’il n’est que de 10,2% dans le groupe 35-64 ans. Ainsi, l’accroissement rapide de la population de jeunes appelle à la mobilisation d’importantes ressources pour faire face à cette problématique. Or, le taux de croissance de l’économie sénégalaise qui a tourné autour de 6-7% sur la période 2017-2020 n’a pas permis de renverser la tendance.
Dans l’objectif d’accélération de la relance de l’économie nationale, de l’intensification de l’exécution du PSE/Jeunesse, du financement et de l’emploi des jeunes dans le cadre du PAP2A/PSE, l’État entend
remanier profondément le budget du pays en prenant en compte les nouveaux impératifs, enjeux en faveur de la jeunesse2. Dans cette perspective, sur la période 2021-2023, outre les emplois salariés et les recrutements importants prévus dans plusieurs secteurs, c’est 350 milliards FCFA au moins, qui seront mobilisés pour le financement des jeunes et des femmes. Avec ces ressources publiques exceptionnelles, il est prévu de financer dans la première phase le Programme d’urgence pour l’emploi et l’insertion socio-économique des jeunes, à raison de 150 milliards de FCFA pour l’année 2021, 100 milliards de FCFA pour 2022 et 100 milliards de FCFA pour 2023. Or, ces initiatives n’ont pas permis de résorber la problématique. Ainsi, contrairement à ce qu’on a l’habitude de voir, il est important d’explorer d’autres pistes avec un encadrement adéquate pour permettre aux jeunes sénégalais de sortir de sortir du marasme qui ne cesse de se complexifier d’années en année avec l’arrivée massive de cohortes entiers sur le marché de l’emploi à travers des mécanismes de financement et les formations adaptés afin de lutter de façon efficace et efficiente contre le chômage et le sous-emploi des jeunes. Car si pour certains, cette tendance peut être prise comme une « dividende démographique », cependant elle peut être aussi le révère de la médaille en se présentant comme une bombe sociale dont l’éclatement pourrait avoir des conséquences incalculables pour la stabilité du pays.
Quels outils pour lutter contre le chômage des jeunes au Sénégal ?
Certes, depuis plusieurs années, à travers différentes initiatives, l’État du Sénégal a voulu prendre à bras-le-corps la question. Mais chaque année, ce sont presque 200 000 à 300 000 nouveaux demandeurs d’emploi qui arrivent sur le marché du travail, alors que l’offre estimée est d’environ 30 000 tout au plus, soit juste seulement 10 à 15% de la demande. Parmi ces demandeurs, 31% sont diplômés de l’enseignement supérieur, alors 46% qu’aucun n’a suivi aucune formation ni ne dispose d’une qualification. Il faut noter aussi que 24% d’entre eux ont un niveau d’instruction qui ne dépasse pas le cycle élémentaire3. En effet, parmi les chômeurs, seuls 32,2% sont instruits, alors que les chômeurs instruits présentent des niveaux d’instruction relativement bas. Car près 85% ont un niveau inférieur ou égal à celui du deuxième cycle de l’enseignement secondaire. Les taux les plus élevés sont observés chez ceux qui ont un niveau secondaire (16,5%) et supérieur (16,7%). Pour ceux qui qui n’ont aucun niveau d’instruction, le taux de chômage était estimé à 12,6% en 2018, selon l’ANSD. Conséquemment, on assiste à un développement rapide du secteur informel où on note une forte présence des jeunes (49%), en particulier dans les centres urbains.
Sous le magistère du Président Abdoulaye Wade (2000-2012), plusieurs structures ont été créées pour donner une suite aux demandes d’emploi des jeunes tels que le Fonds national de promotion de la jeunesse (FNPJ), l’Agence nationale de l’emploi des jeunes (ANEJ), l’Agence de l’Emploi des Jeunes (AJEP) et l’Agence nationale pour les marchands ambulants (ANAMA), l’Office pour l’emploi des jeunes de la banlieue (OFEJBAN) et l’ANREVA (Retour vers l’agriculture), qui deviendra ANIDA (Agence nationale d’insertion et de développement agricole) avec l’arrivée du président Macky Sall au pouvoir en 2012.
À la fin des deux mandats du Président Wade, on dénombrait au Sénégal une pléthore d’agences qui avaient toutes comme principal champ d’action, la question de l’emploi des jeunes, mais avec toutefois des résultats très mitigés. Cette même volonté politique est notée dès l’arrivée au pouvoir du Président Macky Sall en 2012. Elle sera concrétisée par la création de l’Agence nationale pour la promotion de l’emploi des jeunes (ANPEJ) par le décret n°2014-26 du 09 janvier 2014.
Les autorités ont justifié la nécessité de mettre en place l’ANPEJ qui, au-delà de limiter la bureaucratie administrative, devait se charger de donner une réponse efficace à la lancinante question de l’emploi des jeunes. En effet, l’ANPEJ est née dans un contexte particulier. C’est à la suite des missions d’évaluation des impacts des politiques de jeunes qu’il a été retenu de créer une agence faitière pour mieux améliorer la question de la gouvernance de l’emploi des jeunes. Par la suite, toujours dans l’optique de trouver une solution à la lancinante question de l’emploi des jeunes, le Président Macky Sall va initier ou renforcer plusieurs programmes et instruments pour favoriser l’emploi et l’entreprenariat chez les jeunes et les femmes. Nous allons passer en revue quelques-uns.
Le Programme des domaines Agricoles Communautaire (PRODAC)
Le Programme des domaines Agricoles Communautaire (PRODAC) avec le décret n°2014-498 du 10 avril 2014. En effet, l
des lieux d’insertion de jeunes (diplômés ou non) avec une contribution significative à la création d’emploi dans la chaine de valeur agricole.
par le développement de l’entreprenariat agricole à travers des aménagements hydro-agricoles, communément appelés Domaines agricoles communautaires (DAC). Par ailleurs, l’objectifs du PRODAC est de fixer les jeunes dans leur terroir en leur offrant un cadre propice à la réalisation d’activités économiques. À ce titre, il se voulait une réponse pertinente face à la précarité sociale en milieu rural mais aussi une contribution significative à la création d’emploi dans la chaine de valeur agricole.
Près de 50 milliards, ont été mobilisé depuis la mise ne place de ce programme qui avait suscité beaucoup d’espoir lors de son lancement en 2014. En effet, le Programme des Domaines Agricoles Communautaires devrait apporter rapidement une solution concret dans le solutionnement de la problématique du chômage le sous-emploi des jeunes, notamment avec les aménagements des quatre DAC : Keur Momar Sarr (Louga), Keur Samba Kane (Diourbel), Itato (Kédougou) et Séfa (Sédhiou). Or, les DAC tardent toujours à sortir de terre après des investissements à coups de milliards FCFA.
Le Fonds de Garantie des Investissements Prioritaires (FONGIP)
Au Sénégal, l’offre de crédit destinée au secteur privé est très faible malgré une très forte demande des entreprises, et en particulier des Petites et Moyennes Entreprises (PME), qui représentent plus de 90% du tissu économique. Le gap entre l’offre et la demande de financement des PME a été estimé par la concertation nationale sur le crédit femme en 2010 à plus de 500 milliards de Francs CFA. Ainsi, pour permettre aux PME représentant 90% du tissu économique d’absorber les financements nécessaires, l’Etat du Sénégal a créé par décret, en 2013, le Fonds de Garantie des Investissements Prioritaires (FONGIP) par le décret n°2013-691 du 17 mai 2013.
Le FONGIP a été mis sur pied pour agir en complémentarité avec les autres entités publiques de l’écosystème financier afin de mobiliser les ressources financières publiques et privées destinées aux MPME en apportant un meilleur confort aux institutions financières. Il constitue dès lors une réponse innovante et adaptée à la demande sociale en permettant : d’atténuer les risques liés à l’octroi des crédits aux PME par des établissements financiers généralement réticents; de compléter le dispositife PRODAC se veut une réponse à la problématique de l’emploi des jeunes en particulier . Le concept se veut procéder d’une double démarche de création de pôles de compétitivités économiques et d’aménagements structurants, permettant la mise en valeur de grands domaines agricoles, allant de 1 000 à 5 000 ha
Il s’agit de véritables agropoles, lieux d’insertion de jeunes ruraux, de diplômés d’écoles de formation (aux métiers de l’agriculture et disciplines connexes), mais également de promoteurs privés désireux d’investir dans le secteur, aussi bien dans ses activités de production que dans celles de transformation et de services agricoles. Ainsi, le PRODAC envisageait de créer plus de 300 000 emplois en 5 ans d’intervention des institutions financières en faveur des MPME ; de bonifier les taux d’intérêts appliqués actuellement par les institutions financières.
Le FONGIP poursuit trois missions principalement , notamment garantir des crédits bancaires pour le financement des projets porteurs de croissance dans les secteurs prioritaires ; refinancer des institutions de micro finances pour leur permettre d’accorder des crédits aux Micros Petites et Moyennes Entreprises (MPME), aux groupements de femmes et de jeunes à des taux d’intérêts bonifiés et mettre en place un dispositif permanent d’accompagnement et de suivi des porteurs de projets sur tout le territoire. L’intervention du FONGIP permet ainsi de promouvoir la compétitivité des MPME et de contribuer au renforcement des filières porteuses de croissance. Le FONGIP constitue dès lors un levier de compétitivité pour l’économie sénégalaise en plaçant l’entreprise nationale sénégalaise, quelle que soit sa taille, au cœur de la stratégie d’émergence économique du Pays.
Le renforcement du capital humain constitue un axe stratégique majeur du Plan Sénégal Emergent (PSE)
qui vise à mettre en place d’ici 2025, un ensemble de projets structurants à fort contenu de valeur ajoutée et d’emploi. La hausse de la productivité souhaitée dans ce PSE est tributaire en grande partie de la qualité des ressources humaines employées. En effet, pour passer à une économie plus compétitive, dynamique et diversifiée, et optimiser l’impact sur l’emploi, la mobilisation d’importants moyens et la mise en place d’un cadre institutionnel adéquat en matière de financement de la formation professionnelle et technique sont nécessaires pour apporter une réponse pertinente en quantité et en qualité aux besoins en ressources humaines. C’est dans ce cadre que le Gouvernement du Sénégal avec l’appui de la Banque Mondiale et de l’Agence Française de Développement (AFD) a créé par décret n° 2014-1264 en date du 07 octobre 2014 le Fonds de Financement de la Formation professionnelle et
technique (3FPT).
Le Fonds de Financement de la Formation professionnelle et technique (3FPT)
Créé par décret n°2014-1264 du 7 octobre 2014, le Fonds de Financement de la Formation professionnelle et technique, communément appelé 3FPT prend en charge la formation initiale et continue des travailleurs des entreprises et des organisations professionnelles, des jeunes en quête de qualification, des centres et institutions de formation mais aussi l’assurance qualité du dispositif de la formation professionnelle et technique. Ainsi, il est mis en place, dans le cadre du Projet de Formation professionnelle pour l’Emploi et la Compétitivité au Sénégal (PFEC) et avec l’appui des partenaires au développement tels que la Banque Mondiale et l’Agence Française de Développement, le Fonds de Financement de la Formation professionnelle et technique, communément appelé 3FPT.
Placé respectivement sous la tutelle technique et financière du ministère de l’Emploi, de la Formation professionnelle et de l’Artisanat et du ministère des Finances et du Budget, le 3FPT a pour missions de mobiliser les ressources nécessaires au financement de la formation professionnelle et technique; financer les actions de formation initiale ainsi que les actions de formation continue des personnels d’entreprises, des demandeurs d’emploi et des porteurs de projets d’insertion ; contrôler l’utilisation des financements attribués ; veiller à l’efficacité des actions mises en œuvre; conduire des études prospectives sur l’environnement du développement économique, de l’emploi et de la formation professionnelle ; accompagner les entreprises et les établissements de formation professionnelle et technique dans l’identification et la formulation de programmes de formation.
Le Fonds de Développement de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle (FONDEF)
Le Fonds de Développement de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle a été mis en place par le Président Wade. Il a été créé par le décret n°2005-204 du 03 mars 2005, est un instrument au service de l’entreprise mis en place par l’État pour l’appui technique et le financement de la formation professionnelle continue. Il dispose aujourd’hui d’une expertise avérée dans l’accompagnement des entreprises à l’élaboration et à l’exécution des projets de formation professionnelle.
La promotion de la formation continue et l’insertion socioprofessionnelle des jeunes constituent deux objectifs majeurs que le FONDEF s’est fixé dans sa mission de développement de la formation professionnelle au Sénégal. Le FONDEF a pour mission de : contribuer au développement de la formation professionnelle continue en vue de répondre à la demande de l’économie (soutenir l’adéquation des profils des employés au poste de travail) ; promouvoir la structuration de l’offre et de la demande en formation professionnelle continue ; financer les projets de formation professionnelle continue ; faire de la recherche et développement sur la formation professionnelle continue.
Le FONDEF finance les projets de formation issus des entreprises ou des branches professionnelles. Lorsque ces dernières n’ont pas de projet de formation, elles exposent dans leur requête une vue globale de leurs besoins. Il met à leur disposition, une expertise en ingénierie de formation qui permet de cheminer avec elle tout le long du processus de formalisation de leur projet.
Par ailleurs, pour favoriser la promotion féminine, le Fonds national de promotion de l’entreprenariat féminin (FNPEF) a été aussi mise sur pieds. Les femmes entrepreneurs peuvent bénéficier d’un financement du Fonds national de promotion de l’entreprenariat féminin (FNPEF) Qui peut entreprendre la démarche ?
L’Agence nationale d’Insertion et de Développement agricole (ANIDA)
Dans le domaine de l’agriculture, secteur pourvoyeur d’emplois par excellence, les modèles développés par l’Agence Nationale d’Insertion et de Développement Agricole (ANIDA) pour la promotion d’une agriculture moderne, diversifiée, basée sur la maîtrise de l’eau et pourvoyeuse d’emplois durables et rémunérateurs pour les jeunes notamment, se présentent incontestablement comme une piste à ne pas négliger. En effet, ses cibles sont en priorité les jeunes de moins de 35 ans avec une discrimination positive en faveur des femmes. Ainsi, face au grand défi qu’est l’atteinte de la souveraineté alimentaire, et surtout nourrir la grande masse de citadins à venir avec l’exposition urbaine imminente, l’insertion de la jeunesse dans le secteur agroalimentaire (production, conservation et transformation des produits agricoles) doit être bien intégrer dans toutes les politiques visant à réduire le chômage et le sous-emplois chez les jeunes.
L’Agence nationale d’Insertion et de Développement agricole (ANIDA) est placée sous la tutelle technique du Ministère de l’Agriculture et de l’Équipement rural (MAER). Elle a été créée en 2006 sous le nom d’Agence nationale du plan de retour vers l’agriculture (ANREVA) par le décret n° 1336 du 29 novembre 2006 abrogé et remplacé par celui n° 2011-1028 du 25 Juillet 2011 qui intègre les dispositions relatives à la loi 2009-20 du 4 mai 2009 portant loi d’orientation des Agences d’exécution. Par le changement de dénomination intervenue en mai 2012, ANREVA est devenue ANIDA à la suite du décret n°2012-543 du 24 mai 2012 portant répartition des services de l’État avec objectif entre autres : la réduction de la pauvreté et de l’insécurité alimentaire en combinant aux cultures irriguées, les productions céréalières sous pluie prioritairement pour l’autoconsommation et l’organisation et la formation les producteurs pour pérenniser les infrastructures et les activités de production à travers des modèles de fermes ANDIA (Naatangué) sont devenus une référence au Sénégal.
L’année 2021 a été un tournant décisif avec la décision hautement stratégique prise par l’État d’allouer un budget exceptionnel de 24 milliards de FCFA à l’ANIDA sur la période 2021-2023 pour la mise en œuvre du Projet d’aménagement de fermes intégrées valorisant les énergies renouvelables et développement des filières horticoles (PAFIVER-FH) ». Cet important projet qui entre dans le cadre du Programme d’urgence pour l’emploi et l’insertion socioéconomique des jeunes Xëyu ndaw ñi.
Les agropoles
Par ailleurs, l’autre orientation majeure du PSE en matière agricole est la création de zones de transformation agro-industrielle à travers la mise en place d’agropoles au Sud, au Centre et Nord avec comme objectif majeur, le renforcement de la valeur ajoutée des produits agricoles et réduction de la dépendance aux importations des produits agroalimentaires à travers une industrialisation durable et inclusive. Placés sous la tutelle du ministère du Développement industriel et des petites et moyennes industries, la coordination des Agropoles est confiée à une Cellule d’exécution du projet à travers le Bureau opérationnel de suivi du Plan Sénégal émergeant (BOS/PSE). Le financement de « l’Agropole Sud » (Kolda, Sédhiou et Ziguinchor) est bouclé depuis 2019 avec l’appui de la Banque africaine de développement (BAD) et de la Banque islamique de développement (BID) Avec la BAD (43,1 millions d’euros, 49 %), la BID (27,8 millions d’euros, 31,5 %) et l’État du Sénégal (16,8 millions d’euros, 19 %). Sa réalisation devra permettre la création et la consolidation d’environ 14 500 emplois directs (dont 50% femmes et 60% jeunes) et de 35 000 emplois indirects. Également, 65 000 ménages seront impactés, soit environ 365 000 personnes. En 2020, c’est autour de la structuration de « l’Agropole Centre » couvrant les régions de Kaolack, Kaffrine, Fatick et de Diourbel de démarrer en collaboration avec l’Organisation des Nations-Unies pour le développement industriel (ONUDI), l’Agence belge de développement (ENABEL) et la Banque africaine de développement. Enfin, les études de faisabilité de « l’Agropole Nord » qui couvre les régions de Louga, Saint-Louis et Matam ont été lancées en 2022 avec l’appui et la collaboration de l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA).
L’Agence d’assistance à la sécurité de proximité (ASP)
En s’inspirant de l’expérience française en matière de sécurité de proximité, le Sénégal, précurseur dans la sous-région, a instauré une approche originale à travers le concept de « gouvernance sécuritaire de proximité » avec la création de l’Agence d’assistance à la sécurité de proximité (ASP) par décret n°2013- 1063 du 05 août 2013. Ce concept qui trouve son fondement dans la participation citoyenne avec comme objectifs le décloisonnement des pratiques institutionnelles, favorise la synergie entre les forces de sécurité et les autres institutions locales, la proximité et la contractualisation à travers un partenariat avec les acteurs locaux pourrait être une alternative crédible à la difficulté d’opérationnalisation des polices municipales au niveau des collectivités territoriales.
Cette nouvelle politique sécuritaire s’articule autour de trois composantes que sont l’Agence d’assistance à la sécurité de proximité (ASP), les Comités départementaux de prévention et de lutte contre la délinquance (CDPLD) et les Contrats locaux de sécurité (CLS). Ainsi, en 2013, 10 000 assistants à la sécurité de proximité ont été recrutés et mis à disposition dans différents services et collectivités territoriales à travers le pays, dont 2000 au niveau de la Police et 1000 à la Gendarmerie pour palier la carence en personnel de ces dernières années, mais aussi au niveau des préfectures et des collectivités territoriales et structures parapubliques.
La Délégation générale à l’entrepreneuriat rapide des jeunes et des femmes (DER/FJ)
En tout cas, c’est face au constat d’échec que, pour être plus efficace contre le chômage des jeunes, l’État a mis en place la Délégation générale à l’entrepreneuriat rapide (DER) par le décret n° 2017-2123 du 15 novembre 2017. Lancé, le 07 mars 2018, la DER a pour mission de promouvoir, d’encourager et d’accompagner l’entreprenariat des femmes et des jeunes du pays. Ainsi, elle accorde des financements directs et rapides aux jeunes entrepreneurs, assure la garantie auprès des institutions financières et bancaires, fait la promotion d’investissements innovants et assure un accompagnement financier de projets catalyseurs et à fort effet de levier auprès des partenaires du Sénégal. Principalement, il s’agit d’accorder des prêts subventionnés afin de baisser le taux de chômage chez les jeunes et d’un système de garanties permettant aux jeunes et aux femmes de pouvoir emprunter sans apport et de rembourser avec un effet de levier. Quatre types de financement sont prévus dans son portefeuille: un modèle d’autonomisation économique appui à l’entreprenariat : il s’agit d’un financement adéquat pour les populations avec des projets économiques simple octroyé à titre individuel ou collectif ; un modèle de financement classé par métier : c’est un appui à l’initiative économique national où le financement est destiné à la création, à l’extension et à l’animation de pôles regroupant des corps de métier ou d’activités pouvant être structuré en chaine de valeur ; un modèle de financement incubateur : ce sont des jeunes ou des structures qui sont regroupés avec plusieurs programmes ; un modèle de financement en entreprise qui vient en appui aux meilleurs projets qui seront validés par ses partenaires.
À travers ses financements et ses appuis, la DER vise l’autonomisation économique des femmes et des jeunes. Au total, 10 milliards de FCFA ont été décaissés lors de la première phase de financements. D’un budget initial de 30 milliards de FCFA son budget devra passer à 100 milliards. Sur 300 000 demandes reçues, la DER à financer 189 000 dans plusieurs domaines. Le montant du financement varie selon les projets présentés entre 500 000 à 1 million de FCFA pour les PME. Et, pour des projets plus structurants, il peut aller de 200 à 300 millions de FCFA.
Le programme Xëyu ndaw ñi
Le Programme d’urgence pour l’insertion socioéconomique et l’emploi des jeunes Xëyu ndaw ñi, élaboré en avril 2021, a permis de créer 90 000 emplois durables et de promouvoir l’entrepreneuriat des jeunes, a déclaré le Premier ministre, Amadou Ba, lundi à Dakar. Ce programme a permis la création d’emplois et l’amélioration des conditions de l’entrepreneuriat sur le territoire national. Après deux ans d’exécution, le programme a permis de créer plus de 90 000 emplois durables dans tous les secteurs de la vie économique. Il a favorisé la formation de plus de 31 000 jeunes à différents métiers ».
En présidant, présidait la cérémonie d’ouverture de la deuxième édition du Salon de la jeunesse, de l’emploi et de la mobilité, le Premier ministre Amadou Ba. « Durant cette même période, des financements ont été octroyés aux femmes et aux jeunes, avec 45 milliards de francs CFA en 2021 et 2022, au profit de plus de 140 000 bénéficiaires ». estime que le programme Xëyu ndaw ñi n’a pas seulement créé des emplois. Il incarne un « véritable engagement envers l’autonomisation de nos jeunes et leur offre non seulement des moyens de subsistance, mais aussi une voie vers l’indépendance, la confiance en soi et la dignité » à travers des initiatives menées par l’État du Sénégal, telles que l’Agence nationale pour la promotion de l’emploi des jeunes (ANPEJ), le Fonds de financement de la formation professionnelle (3FPT), la Délégation générale à l’entrepreneuriat rapide des jeunes et des femmes (DER/FJ).
Initié par le Président Macky Sall, le Programme Xëyu ndaw ñi une initiative de Macky Sall mise en œuvre depuis avril 2021, est financé avec 450 milliards de francs CFA pour la période 2021-2023, soit
150 milliards par an. Son objectif était de créer 65 000 emplois. Le projet repose sur cinq piliers, dont le recrutement spécial, les projets publics d’intérêt communautaire, les projets d’investissement public à haute intensité de main-d’œuvre (HIMO) et les mesures de soutien à l’initiative privée.
Lors du Conseil des ministres du 15 janvier 2025, le Président Bassirou Diomaye Faye a donné des directives au Premier ministre d’engager avec les ministres impliqués, toutes les diligences nécessaires à l’évaluation et au recadrage du Programme avant fin mars 2025 en faisant évoluer vers un nouveau concept « Emploi des jeunes » plus efficient et fortement intégrateur pour toutes les cibles, notamment dans ses composantes et ses objectifs sectoriels en termes de création d’emplois et de promotion de l’entreprenariat à travers l’optimisation des financements alloués aux différentes activités génératrices de revenus.
Les Pôle emploi et entreprenariat (PEE) ou Espace Sénégal Services (ESS)
Néanmoins, si la masse de demandeurs d’emploi peut se représenter comme une bombe sociale, car le manque d’emploi peut conduire à une instabilité sociale difficile à gérer, les jeunes offrent au Sénégal aussi une belle opportunité pour renforcer sa croissance et ainsi diminuer rapidement le taux de pauvreté dans le pays. En effet, cette situation démographique est un atout pour la vitalité de l’économie, car elle est susceptible de favoriser une hausse de l’offre de travail, l’innovation et la créativité dont les jeunes peuvent être porteurs. Autrement dit, la jeunesse de la population sénégalaise représente un atout majeur en terme de bonus démographique (dividendes démographiques) pour soutenir une croissance inclusive et assurer le développement équilibré du pays si des actions pertinentes sont engagées en sa faveur. Pour ce faire, le Sénégal doit mettre en avant très rapidement des mécanismes et des moyens pour renforcer un capital humain productif sur la base de ses atouts et promouvoir activement la création d’emplois à forte valeur ajoutée en s’appuyant sur sa jeunesse dans des secteurs porteurs.
La solution pour diminuer le taux de chômage est d’accompagner les entrepreneurs. En plus, des secteurs négligés ou perçus comme peu prestigieux obtiennent un retour sur investissement plus élevé. La coordination de la politique de l’emploi est assurée par le Haut Conseil pour l’Emploi et la Formation institué par le décret n°2009-1406 en date du 23 décembre 2009 placé sous la présidence du Premier Ministre. Ce haut Conseil chargé de la définition des objectifs et stratégies et programmes est appuyé par un Conseil interministériel sur l’Emploi regroupant les différentes institutions de l’Administration publique directement concernées. Ce Conseil interministériel est chargé de la coordination administrative et technique des interventions des différentes parties publiques impliquées dans la mise en œuvre de la politique de l’emploi et du suivi des objectifs annuels. La politique gouvernementale de promotion de l’emploi s’inscrit aussi dans un cadre global tel que décliné dans la Nouvelle politique nationale pour l’emploi (NPNE) pour la période 2015-2019. Ainsi, sur la période 2015-2019, à travers le PSE, le Gouvernement prévoyait d’augmenter les opportunités, afin de créer chaque année entre 100 et 150 000 emplois décents, productifs et rémunérateurs à travers notamment la promotion des investissements publics à Haute intensité en main-d’œuvre (HIMO) et l’amélioration du suivi du marché du travail.
Les Espaces Sénégal Services (ESS) sont des lieux de dématérialisation phygitale sur les démarches impactant quotidiennement les citoyens, les entreprises du secteur privé ainsi que les administrations. Les Espaces Sénégal services pour contribuer au désenclavement numérique des territoires font partie du programme Smart Sénégal entrant dans le cadre du PSE et les plateformes digitales proposent un
contenu dont l’authenticité est vérifiée régulièrement par les autorités compétentes.
Toutefois, malgré ces efforts, il restait encore beaucoup à faire pour répondre à la forte demande d’emploi des jeunes qui, chaque jour, se complexifie un peu plus. Les faibles résultats obtenus dans la promotion de l’emploi des jeunes ne sont-ils pas attribuables à l’absence d’un cadre de concertation harmonisé entre les différents acteurs (administrations, secteur privé, société civile, etc.), d’un système d’information unifié sur le marché du travail, à la pluralité des acteurs institutionnels en charge de l’emploi des jeunes, la faiblesse de de l’employabilité des jeunes face aux emplois offerts, l’insuffisance de mesures incitatives favorables à la promotion de l’emploi, entre autres ? Il se pose certainement la nécessité de mieux articuler les financements aux besoins du marché de l’emploi au Sénégal. Toutes question de le Plan Sénégal 2050 devra intégrer dans les stratégies initiées pour enfin trouver des solutions idoines à cette lancinante de l’emploi des jeunes au Sénégal.
Dr Djibril Diop