Carmello Sagna et Samuel Sarr renvoient la balle à la Sar
C’est sans doute un des rapports de l’Inspection générale d’Etat les plus renversants. Les inspecteurs généraux d’Etat ont établi qu’une quantité anormale d’eau se trouvait dans les réservoirs de la Société africaine de raffinage (SAR), 6682,389 m³, après déchargement dans le courant du mois de décembre 2008, du stock de brut par le MT/Olinda. Une affaire qui revient en surface, cette fois dans le cadre d’une enquête menée par la Brigade des affaires générales (Bag) de la Division des investigations criminelles (Dic). Le préjudice est évalué à plus de 9 milliards de francs Cfa.
Si les conclusions de l’enquête sur cette affaire d’eau et de combustibles sont en train d’être finalisées, il ressort bien que les deux personnes soupçonnées d’avoir pris part à ce qui est décrit comme un scandale par l’Inspection générale d’Etat, précisément Carmello Sagna, directeur général de la Sar et Samuel Sarr ministre de l’Energie en 2008 ont tous les deux nié les faits. Ce qu’on leur reproche est grave. C’est d’avoir cautionné le débarquement d’un navire chargé d’eau, alors qu’il était supposé du combustible à raffiner. Pour Carmello Sagna, ‘’l’incident rapporté est intervenu le 11/12/2008 bien avant le déchargement d’une partie de la cargaison OLINDA dans le T407 (Ndlr, un réservoir de la Sar). En effet le T407 a reçu sa quote-part de la cargaison = 23345,202 TM du 14/12/2008 à 09h25 au 16/12/2008 à 09h25. Donc l’eau qui est la cause probable d’incident ne provient pas du M/T OLINDA mais de celle qui se trouvait dans le T407 bien avant le déchargement’’.
Pour Carmello, le ver dans les réservoirs de la Sar
La ligne de défense de Carmello Sagna consiste à imputer la responsabilité de l’importante quantité d’eau retrouvée dans les réservoirs de la Sar, à des défaillances internes à la société elle-même. Devant les enquêteurs de la Dic, l’ex-boss de la Sar, nous dit-on, est revenu largement sur les explications déjà fournies par lui aux Ige. Lesquels arguments font état d’une impossibilité de décharger de l’eau à la place du combustible pour les incuber dans les réservoirs de la Sar. Comme il l’explique du reste dans le document intégré dans le rapport de l’Ige, citant l’état de déchargement de la Sar cosigné par la Société générale de surveillance, la Douane et la Sar, ‘’le sea-line était rempli de pétrole brut’’, alors que ‘’les réservoirs de la S.A.R contenaient 4265,66 m³ d’eau’’.
Carmello d’expliquer que ‘’la quantité de 2419,21 m³constatée le 16 décembre 2008 - c'est-à-dire bien après le départ de M/T OLINDA – peut s’expliquer soit par la décantation, soit l’imprécision de la mesure ou le fait que les réservoirs de brut ont pu recevoir des "slops" (mélanges d’eau et d’hydrocarbures provenant des installations) opérations courantes en raffinerie’’. En tout état de cause, poursuit-il, ‘’quelle que soit l‘explication, cette légère variation +2,491 m³ n’engage nullement la responsabilité du fournisseur’’. Ainsi, pour lui, ‘’les causes de la présence massive d’eau, au-delà des 1542,76 m³ apportés par le M/T OLINDA sont à rechercher au niveau de la S.A.R’’.
Conclusion : ‘’le coût des déboires techniques intervenus à la S.A.R avant, pendant et après le déchargement, ne peut être attribué à ce navire. Ces déboires techniques sont le seul fait de la S.A.R dans ses propres installations’’. Des dysfonctionnements évalués à…plus de 5 milliards de francs Cfa, dans sa réponse, mais à plus de 9 milliards par les enquêteurs. L’ex-dg de la Sar va jusqu’à accuser un de ses anciens cadres.
‘’Tout le développement fait autour de ces deux derniers aspects, avec des sous- entendus, insinuations allant jusqu'à faire penser à des collusions possibles, n’est que de l’amalgame qui frise l’incompétence, le manque de rigueur et la mauvaise foi de l’ex-directrice commerciale qui a toujours agité, sans preuve, ce qu’il est convenu d’appeler l’affaire OLINDA. Dans quel but et à quel fin a-t-elle agit ainsi? Je l’ignore. J’attendais de l’ex-directrice commerciale une collaboration franche et sincère, mais je dois avouer que ce ne fût pas le cas’’. Sans appel. En tout état de cause, se défend-il, ‘’il n’y a eu aucune collusion de ma part avec un quelconque fournisseur pendant toute la durée de ma mission en tant que Directeur Général de la S.A.R pour ne pas dire de ma carrière. Difficile quand même à croire… Dans tous les cas, on s’est retrouvé dans cette affaire avec une lourde ardoise, de plusieurs milliards de francs Cfa à honorer. Un préjudice que la Sar doit assumer seule, du fait qu’elle serait la seule responsable.
Bnp-Paribas convoquée dans l’affaire…
La ligne de défense de l’ex-ministre de l’Energie, Samuel Sarr n’est pas éloignée de celle de Carmello Sagna, mais insiste sur le montage financier et la tutelle de Bnp-Paribas qui a garanti la transaction. ‘’ Concernant la présence d’eau, je ne suis pas en mesure de l’attester, ceci relève des Dirigeants de la SAR, de la SGS, de BNP paribas. Mais à la lumière des documents (donnés par BNP sur la profitabilité du cargo) en ma possession, ainsi que le bilan en matière de la cargaison et les états financiers. J’émets une forte réserve sur vos propos de préjudice de 9, 796.769.077 FCFA. Si tel était le cas, ce chiffre aurait du être relevé par celui qui finance le cargo (BNP), le Conseil d’Administration de la SAR, et les commissaires aux comptes’’, indique-t-il.
Pour l’ancien conseiller financier de me Wade, ‘’l’appartenance de chaque cargo à BNP Paribas a permis un suivi rigoureux des activités de la SAR. Nous étions informés en temps réel par BNP, le Directeur Général de la SAR et le CNH dans nos réunions de coordination tous les mercredis avec mes autres collaborateurs’’. Ces arguments sauront-ils convaincre le Parquet qui suit, cette affaire avec la plus grande attention ? Dans tous les cas, l’enquête suit son cours à la lumière des auditions des deux éléments-clefs de cette affaire qui n’a sans doute pas révélé toutes ses vérités. Plusieurs cadres de la Sar ont déjà été entendus. Et selon des sources dignes de foi, la vérité ne devrait pas tarder à faire jour.
Fatou S Y
AVERTISSEMENT!
Il est strictement interdit aux sites d'information établis ou non au Sénégal de copier-coller les articles d' EnQuête+ sans autorisation express. Les contrevenants à cette interdiction feront l'objet de poursuites judiciaires immédiates.