Publié le 30 May 2018 - 20:39
ANNIVERSAIRE ABDOULAYE WADE A LA MAISON DU POINT-E

Les militants en chants et en larmes 

 

Abdoulaye Wade a fêté, hier, ses 92 ans. Absent du pays, ses partisans ont tenu à le célébrer devant sa maison du Point-E qu’ils comptent préserver de toute tentative de saisie.

 

‘’Bégué, nioune dagnouy bégué, Président lanouy bégué ci diamono… Bégué, bégué, bégué, diko bégué, Président lanouy bégué ba aldiana’’… (Nous chantons le président Abdoulaye Wade. Nous le chantons dans la vie, nous le chanterons jusqu’au paradis). C’est le beau refrain entonné par l’ancienne maire des Sicap-Liberté, Gnagna Touré, la voix suave. Debout devant la grande bâtisse jaune des Wade sise au Point-E, la dizaine de militants libéraux enchaîne avec elle sur un ton plein de mélancolie... Ancienne secrétaire particulière de Wade, Mme Touré fond en larmes. Elle rend le micro sans prononcer le moindre mot. Aux journalistes qui attendaient son témoignage, elle dit : ‘’Je ne peux parler. J’ai mal au cœur. Je lui souhaite juste une très longue vie.’’

Lui, c’est le Pape du Sopi, Maître Abdoulaye Wade. Il a aujourd’hui (hier) 92 ans. D’où l’initiative du porte-parole du parti démocratique sénégalais, Babacar Gaye, d’organiser une cérémonie symbolique à son domicile objet de toutes les controverses. Ancien directeur de cabinet politique de Wade, il chante en même temps que le tube de Sidiki Diabaté : ‘’Joyeux anniversaire’’. Après les chants, les discours. Ils ont porté pour l’essentiel sur l’actualité chaude de la procédure en cours pour le recouvrement de biens appartenant à Karim Wade. Les libéraux s’érigent en bouclier.

A propos de la supposée saisie de la maison du Point-E, Babacar Gaye, dans son boubou traditionnel bleu,  affirme avec force : ‘’Moralement, c’est inacceptable. Politiquement, c’est incorrect. Nous ne l’accepterons pas. Nous sommes  déterminés à nous mettre devant les chars, les bulldozers, les huissiers afin que cette maison qui fait l’histoire du Sénégal reste un patrimoine pour cette jeunesse.’’ Une maison qui, selon Ndèye Gaye Cissé, a été acquise en 1967. ‘’Ces gens qui veulent la saisir n’étaient pas à l’école primaire’’, ajoute la responsable libérale. Sur les lieux, plusieurs ténors sont introuvables. A l’exception de Doudou Wade et les susnommés, la plupart des dignitaires du PDS sont absents. Une absence qui pourrait s’expliquer par l’improvisation du rendez-vous. ‘’C’était vraiment spontané, se justifie Babacar Gaye qui avait convié Macky Sall, Souleymane Ndéné Ndiaye, Samuel Sarr, Jean Paul Dias, Idrissa Seck entre autres leaders politiques. J’ai envoyé les invitations cet après-midi. Donc je me réjouis de la présence des responsables qui sont là avec moi, ainsi que de vous les journalistes.’’

Né en 1942, le vieux Alex Manga, originaire du village de Nyassia en Casamance, travaille chez les Wade depuis 1972. Après plus de 40 ans de ‘’bons et loyaux services’’, le jardinier dit considérer l’ancien président comme un père. ‘’Abdoulaye Wade, c’est comme mon père. Je connais aussi Macky Sall, Moustapha Niasse... Je les ai tous connus ici. Je n’ai jamais eu de problème avec qui que ce soit.’’ Par rapport à la visite de l’huissier qui a suscité la colère noire de son patron, il témoigne dans un wolof approximatif : ‘’Moi, je ne parle que des choses que je maîtrise. L’huissier, je n’ai pu le voir. Ce sont les agents de Sagam qui gardent le domicile qui m’ont dit que l’huissier est passé ici. Ne l’ayant pas rencontré, je ne peux m’avancer sur les raisons de sa visite’’, rapporte l’homme de 76 ans qui a vu Karim et Syndiély Wade grandir.

Un homme que connaît bien le neveu de l’ancien président, Doudou Wade. ‘’C’est lui qui, il y a des dizaines d’années, accueillait ici ma fille. Elle n’avait que deux ans. Cette maison, elle est témoin de pans entiers de notre histoire post-indépendance.  Macky Sall a un objectif : c’est d’humilier le président Abdoulaye Wade. Mais qu’il sache que c’est peine perdue. On ne peut semer du bien et récolter du mal’’, raconte l’ancien président du groupe parlementaire des Libéraux, nostalgique. Brandissant l’index droit en direction des caméras, s’adressant directement à son oncle, il dit : ‘’Président, Yalla guiss nala. Bilahi Yalla dinala faye. Nit dou def lou bakh am lou bone. C’est impossible’’.

Des hauts faits de Goor gi, il en veut pour preuves l’achat de la maison de Senghor pour en faire un musée à un moment où son héritage avait des difficultés ; un témoignage de l’actuel président fait devant ses défunts parents. ‘’Le président Macky Sall, rappelle-t-il, devant ses parents, avait dit ceci en parlant à Abdoulaye Wade : ‘’Vous avez fait pour moi quelque chose que même mon père n’a pas fait.’’ Donc, reprend Doudou Wade, ‘’vous pouvez ne rien faire pour cette personne, mais au moins laissez-lui sa maison. Il a offert une maison à ses anciens employés. Ce qu’aucune autre autorité n’a fait avant lui. Et vous voulez prendre à ces gens qui sont des cuisiniers et jardiniers ce bien. Pour en faire quoi ? Pour en faire quoi ?’’ s’interroge l’ancien député qui s’érige en poète, citant Lamartine : ‘’Objets inanimés, avez-vous une âme… ?’’ s’exclame-t-il avant d’enchaîner : ‘’Si les objets inanimés pouvaient s’exprimer, l’histoire de cette demeure vous serait racontée par ses pierres. Des faits importants du passé de notre pays se sont déroulés dans cette maison de cet avocat, Abdoulaye Wade, à un moment où il était le seul avec l’ambassadeur des Etats-Unis à disposer d’une Ford Mustang.’’

Quelques instants auparavant, sous la ferveur militante des quelques libéraux, au moment où le soleil se couchait sur le quartier résidentiel, un petit garçon de 5 ans environ soufflait les deux bougies posées sur le joli gâteau avec une photo du père de Karim Wade. ‘’Longue vie grand-père’’, ne cessait de prier le jeune public, pendant que Mouhamadou Lamine Massaly pleurait, à côté de Doudou Wade qui le consolait.

PRECISION DU GARDE DES SCEAUX, ISMAILA MADIOR FALL

‘’La procédure n’a rien à voir avec le patrimoine ou la personne du Président Wade’’

Si le camp Wade continue de soutenir bec et ongle que la volonté du régime est de ‘’spolier’’ l’ancien Président de son domicile du Point-E, le gouvernement, lui, se veut formel. Le ministre de la Justice, Ismaila Madior Fall, précise : ‘’La procédure engagée n'a rien à voir avec la personne du Président Wade ou son patrimoine.  Son domicile n'est ni saisi ni ne fait l'objet d'une procédure.

Il s'agit simplement d'un commandement de payer envoyé à Karim Wade dont le dernier domicile connu est la maison de son père.’’ Cela dit, l’Etat semble bien déterminé à aller jusqu’au bout de sa logique dans le cadre de la procédure en cours pour le recouvrement de biens appartenant à Karim Wade.

Il n’exclut pas la contrainte par corps sur la personne du candidat du parti démocratique sénégalais. Le Garde des sceaux : ‘’C’est  sous peine de saisie de ses facultés mobilières délivrées en exécution de la CREI avec l'éventualité d'une contrainte par corps. L'ancien président de la République n'est donc en rien concerné’’, déclare Ismaila Madior Fall, en vue de lever toute équivoque.

MOR AMAR

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