Publié le 19 Jun 2025 - 15:57
APRÈS AVOIR PARTICIPÉ AU DIALOGUE

L'opposition demande à Diomaye de créer un comité inclusif de suivi

 

La mise sur pied par le président de la République d'un Comité inclusif de suivi, comprenant les principaux acteurs du dialogue, est le souhait de l'opposition qui a pris part au dialogue national

 

L'opposition, qui a participé au dialogue national, a fait face à la presse hier. Selon le porte-parole du jour, en décidant de participer au dialogue national, ils ont voulu exprimer sans "ambiguïté" leur attachement au principe de concertation, qui est l’un des piliers fondamentaux de la démocratie. En effet, a expliqué Samba Sy, la démocratie ne fonctionne pas seulement sur la base des décisions de la majorité ; elle prend également en considération les points de vue de l’opposition et de la société civile. ‘’La démocratie, a-t-il dit, se nourrit en conséquence, de l’écoute, des échanges et de l’inclusion’’.

Il se félicite que le Sénégal ait toujours eu recours au dialogue pour construire des consensus forts autour de questions majeures. Ce qu’il a d’ailleurs fini par institutionnaliser à travers une Journée nationale du Dialogue, le 28 mai de chaque année. "Nous avons donc tenu à nous inscrire dans la fidélité à cette bonne pratique, en dépit de l’acharnement répressif du pouvoir contre l’opposition, la presse et toute autre voix critique. Nous sommes allés au dialogue, nonobstant les arrestations arbitraires, les emprisonnements intempestifs d’activistes, de députés et d’anciens ministres, les violations répétées du droit de manifestation, ainsi que les écarts de langage de certains des principaux dirigeants du pays. Nous n’avons même pas été découragés par le rejet de nos amendements aux termes de référence visant principalement à inscrire à l’ordre du jour les difficultés sociales, économiques et financières qui interpellent l’État et les populations, dont la dernière sortie de nos partenaires du FMI atteste de l’étendue et de la gravité", a confié le patron de la LD.

Selon lui, à l'heure d’un premier bilan, il estime que les discussions menées et la mise en débat de problèmes importants pour le devenir de notre pays justifient largement leur participation au dialogue national. Et ceci, en dépit du fait que des questions essentielles demeurent irrésolues, tandis que le pouvoir persiste, selon lui, dans son refus de respecter les libertés inscrites dans la Constitution et dans sa logique de judiciarisation de ses différends avec l'opposition, comme en atteste l’emprisonnement arbitraire du Président Moustapha Diakhaté.

"Pourtant, à la fin de la cérémonie de clôture du dialogue, nous avions lancé un appel à l’apaisement au Président de la République, nous fondant sur sa propre déclaration lors de la séance solennelle d’ouverture du dialogue. Ne disait-il pas : « Mon rôle, en tant que garant de l’unité nationale, est de tendre la main à toutes et à tous, pour rassurer, rassembler, apaiser et réconcilier afin de conforter la paix et la stabilité indispensables au développement économique de notre pays » ? Que vaut ce discours confronté à la réalité des faits ?’’, se demande-t-il.

En effet, fait-il remarquer, les données figurant dans les rapports provisoires disponibles révèlent que les commissions « Processus électoral » et « Réformes institutionnelles et organes de gestion des élections » ont enregistré d’importants accords de principe, dont les modalités d’application ne sont toutefois pas encore précisées, mais aussi des divergences nettes sur des questions sensibles. En ce qui concerne la commission « Démocratie, Libertés et Droits humains », souligne-t-il, un constat d’échec a été fait avec un long relevé de divergences non surmontées.

Processus électoral

La question de la commission sur le processus électoral a également été au cœur des débats lors de ce face-à-face avec la presse. Pour Samba Sy, la question essentielle portait sur la modification du mode de scrutin aux élections législatives et territoriales ; les autres questions ayant été déjà débattues dans des dialogues antérieurs, avec des accords qui ne nécessitaient, pour la plupart, que des études complémentaires pour leur faisabilité.

L’opposition, selon lui, estime qu’il est venu le moment de modifier le mode d’élection des députés et autres élus territoriaux de telle manière que la composition de l’Assemblée nationale et celle des collectivités territoriales correspondent davantage au vote des citoyens. "Comment, en effet, peut-on avoir 54 % des voix aux élections législatives et obtenir plus de 80 % des députés ? Comment comprendre qu’un groupe parlementaire puisse s’octroyer des postes indus dans les bureaux et les commissions, alors que la loi est précise sur ce point ? Comment peut-on perdre d’une voix une collectivité territoriale aux élections municipales ou départementales et se retrouver sans aucun membre de bureau ni diriger une commission ?", s’est-il interrogé.

S’agissant des réformes institutionnelles, souligne-t-il, ils ont eu le sentiment d’une meilleure écoute et ont obtenu quelques accords de principe. Cependant, l'opposition pense qu’il était temps de procéder, très clairement, au bilan des organes de gestion des élections et de faire progresser, de nouveau, la démocratie. "L’essentiel étant, non pas de nous entendre sur le nom d’une structure, mais plutôt de définir, avec précision, ses tâches et de montrer en quoi elle va rendre les élections davantage transparentes, en empêchant notamment toute immixtion de l’Exécutif national dans le processus électoral’’.

Ainsi, revenant sur la commission Démocratie, libertés et droits humains, l’opposant indique que l’accord de principe sur la rationalisation des partis, qui était déjà acquis lors des dialogues antérieurs, impose de travailler à l’élaboration d’une loi générale, conforme à la Constitution, qui préciserait les conditions de création d’un parti, d’une coalition, ainsi que les droits et les devoirs des partis, ceux de l’opposition en particulier, tant au niveau national que territorial.

‘’Cette loi porterait aussi sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales, financements qui seront plafonnés et partiellement ou totalement remboursés en fonction de certains critères. Cette loi traiterait aussi du statut du chef de l’opposition relativement à ses droits et devoirs", déclare l'ancien ministre. Qui ajoute que cette loi générale, devant être discutée avant d’être écrite, est acceptée dans son principe par les parties prenantes au dialogue, sauf pour ce qui est du statut du chef de l’opposition.

Au total, à ses yeux, le résultat des discussions, qui demeure, à ce stade, ambivalent, fonde l’absolue nécessité de la mise sur pied, par le Président de la République, d’un Comité inclusif de suivi comprenant les principaux acteurs du dialogue. Sa mission serait, d'après lui, d’une part, de définir consensuellement les modalités de mise en œuvre des accords de principe obtenus et, d’autre part, de poursuivre les discussions sur les points de divergence.

"C’est pourquoi nous invitons le Président de la République, que nous saisirons prochainement par voie épistolaire sur cette problématique et sur d’autres, à se conformer à son engagement de mettre en œuvre uniquement les points de consensus. Nous le disons sans équivoque : toute prise de décision unilatérale serait contraire à l’esprit de nos récentes assises et équivaudrait, pour nous, à la caducité de toutes les conclusions du dialogue national sur le système politique", avertit M. Sy.

CHEIKH THIAM

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