Publié le 14 Oct 2012 - 10:29
ARRÊTÉ MINISTÉRIEL SUR LA ZONE TOURISTIQUE DE SALY

Macky Sall et Amadou Kane démantèlent la Sapco

 

 

L'État vient de couper l'herbe sous les pieds de la Société d'aménagement et de promotion des côtes et zones touristiques du Sénégal (Sapco-Sénégal) en la disqualifiant dans la gestion des terrains de Saly. Ce faisant, le pouvoir barre la route à des pratiques nébuleuses comme le blanchiment d'argent via le foncier et l'immobilier dans la zone.

 

C'est un véritable coup du tonnerre qui va secouer les milieux de l'hôtellerie et de la grande spéculation foncière à Saly. Suite aux instructions données par le Président Macky Sall, le ministre de l’Économie et des Finances Amadou Kane vient de prendre un arrêté ''portant résiliation du bail approuvé suivant acte administratif en date du 17 juillet 1978, au profit de la Sapco, sur un terrain de formant un lot de 577 hectares 17 ares 50 centiares, situé dans le secteur de Saly Portudal, à Mbour, à distraire du Tf N°3405/TH (devenu par voie de report le Tf N°638/MB)''.

 

L'arrêté, lapidaire, signé à la date du 03 octobre 2012 par le ministre de l'Economie et des Finances comprend deux articles dont le premier évoque la résiliation du bail, alors que le second ajoute que ''le Directeur général des Impôts et des domaines (Ndlr, Amadou Bâ) est chargé de l'exécution du présent arrêté...''. Bien concrètement, cette décision signifie que la Société d'aménagement et de promotion des côtes et zones touristiques du Sénégal (Sapco-Sénégal) est disqualifiée dans la gestion des terrains de Saly.

Le système de location des terres qu'elle avait installé devient désormais caduc. Elle ne pourra plus réclamer un quelconque droit aux entreprises surtout hôtelières, qui se sont posées sur la Petite côte sans bénéficier de titres fonciers, sur la simple base de baux. C'est donc ce système de location de baux qui prévalait, avec tout ce que cela implique comme nébuleuse en termes de malversations et de blanchiment de capitaux, qui est ainsi démantelé, sur la base d'une décision de l’État.

 

La Sapco, une vraie nébuleuse...

 

Il faut dire que les fonctionnaires des Impôts et Domaine se sont pendant longtemps étonnés qu'on puisse mettre à la discrétion de la Sapco une assiette foncière aussi élastique, qui en fait usage à sa convenance. ''C'est une série de nébuleuses qui entoure la gestion des terres de Saly. Par exemple, la Sapco a attribué sur le Tf 638/MB des sous-baux à divers bénéficiaires (hôtels, commerceS, résidences, etc), avec des actes injustement dénommés ''cession de droit au bail'' qui ne localisent pas de manière précise les superficies attribuées sur le Tf de l’État''. Les professionnels du secteur de l'hôtellerie ne manquent pas de leur côté de souligner le caractère précaire des actes de location délivrés par la Sapco qui ne confèrent à leur bénéficiaire qu'un droit d'usage éphémère qui ne dure que le temps restant à courir sur la durée du bail octroyé à la Sapco.

Il y a aussi le fait que même si la Sapco est à la tête d'un véritable empire financier avec des ramifications souvent à l'international, elle doit plusieurs centaines de millions aux services des Impôts et Domaine, au titre de redevances domaniales dues à l’État, qu'elle n'a pas tenu à honorer. L’État a aussi voulu mettre un nom derrière chaque terrain attribué, car le système des baux permet un blanchiment facile de capitaux. Une source à Saly laisse d'ailleurs entendre qu'''un Directeur général véreux peut vendre la Sapco sans apparaître, si ce système perdure''.

 

Une aubaine pour les grands hôteliers et les banques...

 

Pour comprendre le sens et la portée de la mesure, il faut savoir que l'acte administratif ''portant bail'' au profit de la Sapco a été signé le 17 juillet 1977. Vingt cinq (25) ans après, le pouvoir vient restreindre les compétences de la Société d'aménagement et de promotion des côtes et zones touristiques du Sénégal (Sapco-Sénégal), une structure qui dépend du ministère de la Culture et du Tourisme dirigé par Youssou Ndour.

Cette tendance, selon nos sources, va aller crescendo. Si en effet depuis le décret N°2004-1185 du 27 août 2004, les prérogatives de la Sapco ont été étendues à un niveau national ; ce qui a d'ailleurs justifié le changement de sigle de Sapco à Sapco-Sénégal, l’État compte bien reprendre son rôle primaire, pour gérer lui-même les terres. La Sapco pourra ainsi se concentrer sur ce qui constitue son premier rôle : l'aménagement.

 

Les effets attendus après l'arrêté du ministre de l’Économie et des Finances, c'est que les entreprises s'activant dans le domaine de l'hôtellerie et les secteurs connexes pourront directement contracter avec l’État. Ce qui devrait rapporter, selon nos interlocuteurs, au moins 40 milliards de francs Cfa, puisque le mètre carré pourrait facilement être cédé à 20.000 francs Cfa ; l'Etat ne pouvant pas vendre les terrains au même taux que les spéculateurs fonciers.

Comme un effet boule de neige, l'octroi de titres fonciers par l’État aux hôtels, dont certains, à l'image de Téranga, Lamantin Beach etc., se sont bâtis une solide réputation, devraient créer un certain renouveau dans le secteur touristique. ''Ce sera une très bonne opération pour les hôteliers qui pourront directement demander des financements aux banques qui, elles-mêmes auront des garanties plus sûres pour les besoins d'hypothèque, un bail n'ayant pas la même valeur qu'un titre foncier''.

 

La Sapco a été créée en 1975 sous la forme d’une Société d’économie mixte avec un capital de 1,2 milliard de francs CFA détenu à 98,75% par l’État du Sénégal et à 1,25 % par la SOFISEDIT qui s’est vue subroger par la Société nationale de recouvrement (SNR). Suite à une augmentation de son capital, la Sapco-Sénégal a été transformée en Société anonyme à participation publique majoritaire. Initialement mise en place pour mettre en œuvre l’aménagement touristique de la Petite Côte, la Sapco a vu son intervention étendue au niveau national depuis l’élargissement de ses compétences en 2004. L'arrêté 03 octobre 2012 est un tournant majeur.

 

Gaston COLY

 

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