Un gap de 4 000 à combler
La couverture du Sénégal en sages-femmes reste encore insuffisante et inégalement répartie. Actuellement, plus de 3 000 accoucheuses sont au chômage et le gap à combler est de 4 000 matrones. L’annonce a été faite hier au cours de la célébration de la journée mondiale de la sage-femme.
Le nombre de sages-femmes au Sénégal est très insuffisant. Ce, malgré le recrutement en 2014 par le gouvernement du Sénégal de 500 matrones. Le pays a un gap de 4000 accoucheuses à combler. ‘’Nous avons plus de 3 000 sages-femmes qui chôment. Nous avons besoin d’au moins 4000 sages femmes pour avoir un gap acceptable. Pas un gap à la hauteur des normes, mais acceptable. Nous sommes 1 716 sages-femmes et nous sommes dans un ratio de deux sages-femmes pour 1000 grossesses’’, a déclaré hier la présidente de l’association nationale des sages-femmes d’Etat du Sénégal, lors de la célébration de la journée internationale de la sage-femme.
Selon elle, il faut un grand travail pour atteindre au moins la norme de l’organisation mondiale de la santé qui est de 6 matrones pour 1000 naissances vivantes. ‘’Cette population de sages-femmes, en plus d’être insuffisante, est très mal repartie. 37% d’elles sont en milieu urbain. Le reste est reparti dans les autres zones. Quand je parle de milieu urbain, c’est surtout à Dakar où on a 33%. Mais Dakar fait 25% de la population sénégalaise. Et vue sous cet angle, même Dakar n’est pas encore couvert’’, a-t-elle souligné.
Vers le recrutement de 500 sages-femmes en 2015
Sur ce même registre, le Docteur Bocar Daff, représentant le ministre de la Santé et de l’Action sociale, a annoncé le recrutement prochain de 1 000 agents de la santé. ‘’ Si dans ce lot on recrute encore 500 sages-femmes, cela pourrait combler ce gap’’, a informé Docteur Daff. Ce dernier a par ailleurs dénoncé le manque de qualification et la pléthore d’écoles de formation. Mais pour Marième Fall, en 2001, avec l’avènement des OMD, les gens ont pensé qu’il fallait promouvoir la formation pour avoir une masse critique de sages-femmes. Malheureusement, dit-elle, c’est une direction bicéphale entre le ministère de la santé et celui de la formation technique. ‘’Nous avons des problèmes, toutes les personnes peuvent postuler pour ouvrir des écoles.
Le problème qui s’ensuit, c’est qu’on n’a pas assez d’enseignants qui ont le profil autant clinique, pédagogique que managérial pour gérer ces écoles. Et c’est ce qui fait que la qualité de la formation laisse à désirer d’une part. D’autre part en ce qui concerne la formation pratique, quand nous nous rendons à la supervision, nous voyons que la qualité de l’offre de service souffre d’insuffisance de qualité’’, a expliqué Mme Fall. Toujours, à l’en croire, ceci est lié à la formation, dans la mesure où les structures qui existent pour former ces prestataires sont minimes par rapport au nombre d’élèves qu’ils doivent prendre en charge. Il s’y ajoute que les malades se raréfient, que le privé ne prend pas d’élève, donc tout ceci fait que le nombre de sages-femmes qui sort est très sélectif. ‘’Sur les 9000 sages-femmes élèves qui se présentent, il y a à peu près 250 à 300 qui sont certifiées. Mais cette certification laisse à désirer parce que même certifiées, si on les trouve sur le terrain, nous avons des problèmes’’, a-t-elle soutenu.
S’agissant des sages-femmes affectées en zone rurale, la présidente de l’association soutient qu’elles ne peuvent pas ne pas y aller parce que c’est un problème de survie. ‘’On ne peut pas avoir une médecine à double vitesse. Toutes les femmes sont les mêmes. Elles ont besoin des mêmes soins. Maintenant, il faut que le ministère de la Santé ait un plan de mobilité des sages-femmes. Si ce plan de mobilité n’est pas effectif et s’il y a toujours des affectations arbitraires, le problème restera entier’’, a indiqué Marième Fall.
Beaucoup d’abus et d’incompétences
Elle a par ailleurs déploré les nombreuses plaintes. ‘’Il y a eu beaucoup d’abus et d’incompétences, j’ose le dire en tant que responsable morale parce qu’en fait, si les sages-femmes suivent les normes par rapport à la consultation prénatale, au suivi de l’accouchement, elles peuvent référer à cela. Et cette absence de référence conduit à des dégâts et c’est ce qu’on a vu au centre de santé Mame Abdoul Aziz Sy Dabakh des Parcelles Assainies et à Kolda’’.
Concernant la qualité de l’accueil, Mme Fall de déclarer que ‘’c’est une chaîne de responsabilités allant du gardien de la porte à la matrone en passant par l’ambulancier, et l’infirmier’’.
VIVIANE DIATTA