Une transformation structurelle de l’économie à pas de caméléon
Après 4 ans au pouvoir, le président Macky Sall a encore du chemin à faire, selon l’inspecteur des impôts et domaines Ousmane Sonko, également président du parti Pastef. Le constat est pratiquement le même pour le Directeur exécutif d’Enda Cacid, Cheikh Tidiane Dièye. Le premier constate ‘’un passif économique’’. Tandis que le second trouve le rythme lent pour pouvoir déclencher une spirale de transformation profonde et durable de l’économie.
‘’4 ans déjà !’’ A travers cette exclamation, le Président du parti Patriote du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef, les patriotes) relève à quel point, les choses sont allées très vite. Sur le plan économique, Ousmane Sonko ne voit qu’un ‘’passif économique’’. Car, il est d’avis que le gouvernement de Macky Sall a perdu 4 bonnes années à chercher un programme, l’Appétant arrivé au pouvoir avec le Plan ‘’Yonnu Yokkute’’. Selon l’inspecteur des impôts et domaines, lorsque le Président Sall s’est rendu compte que ce plan n’était pas opérationnel, il s’est employé à trouver un autre programme. Ce n’est ainsi qu’en 2014 que le Plan Sénégal émergent a été ficelé.
D’ailleurs, Ousmane Sonko ne le considère pas comme un Plan, même s’il est le seul référentiel de la politique économique du gouvernement. ‘’C’est un plan qui manque d’ambition. C’est un plan qui ne touche pas aux questions structurelles de notre économie. Dans le Pse, nous avons une superposition de programmes’’, démonte-t-il. Par contre le Directeur exécutif d’Enda Cacid note, qu’après 4 années d’exercice, le rythme est déjà lancé. Mais Cheikh Tidiane Dièye trouve que ‘’ce rythme est un peu lent pour déclencher une spirale de transformation profonde et durable des structures’’.
‘’Le potentiel économique est là, mais…’’
Après 4 ans, le gouvernement du Président Sall peut citer des réalisations sur le plan des infrastructures, comme le prolongement de l’autoroute à péage de Diamniadio à l’aéroport Blaise Diagne de Dias, le centre international de conférence Abdou Diouf. Lors de son dernier discours de nouvel an, le président de la République, en citant ses réalisations, a révélé que son régime a construit un linéaire de 965 kilomètres de routes et 2 281m linéaires de ponts’’. Sur le Plan de l’énergie, des centrales comme Taïba Ndiaye sont déjà réceptionnées.
Mais, pour le président de Pastef, ce n’est pas en s’empressant de construire des autoroutes, des immeubles à Diamniadio que le Sénégal va atteindre son émergence. ‘’Structurellement, on n’a rien modifié dans la structure de notre économie’’, soutient-il. Cheikh Tidiane Dièye a lui l’impression que le projet de l’émergence se résume à ‘’une sorte d’obsession infrastructurelle’’. Le porte-parole de la plate-forme de la société civile Avenir ‘’Senegaal bi nu bëgg’’ est d’ailleurs d’avis que ‘’l’économie a été rattrapée par le politique et le politique ne se préoccupe plus de la rationalité et de l’efficacité dans le choix des hommes qui doivent conduire les projets de transformation. C’est là où il y a un problème’’.
‘’Le potentiel économique est là. L’ambition est encore là mais, c’est dans la mise en œuvre concrète des projets et programmes qu’on pèche ; soit, par un problème de gouvernance éthique soit par un problème d’organisation de la compétence et de l’expertise. Quand la politique prend trop le pas, les nominations et la gestion clientéliste prennent aussi le pas sur l’efficacité économique’’, constate Cheikh Tidiane Dièye.
‘’Un taux de croissance conjoncturel’’
En 2015, un taux de croissance de 6,4% a été atteint. Ce qui montre, selon le ministre de l’Économie et des Finances Amadou Ba, que l’économie sénégalaise s’est nettement revigorée. Le taux de croissance du Sénégal a évolué ces dernières années, ce qui est salutaire aux yeux de Cheikh Tidiane Dièye. Mais il déplore malheureusement que ‘’ce taux soit porté par deux ou trois secteurs qui, pour l’essentiel, sont dominés par des capitaux étrangers’’.
‘’5,2% de la croissance sort du pays’’, condamne Ousmane Sonko. L’inspecteur des impôts et domaines explique cela par le fait que ‘’l’économie sénégalaise est dominée par le secteur tertiaire à 60%. Et ce secteur tertiaire est constitué de capitaux étrangers’’. M. Sonko ajoute que cette croissance de 6,4% ‘’est conjoncturelle et non structurelle’’, parce qu’il suffit qu’il y ait un mauvais hivernage ou que le prix du baril de pétrole monte encore à 70 dollars ‘’pour que le Sénégal se retrouve, l’année prochaine, avec une croissance de 2,3% ou moins’’.
Après le groupe consultatif de Paris, de nombreux engagements de financements ont été pris par les bailleurs de fonds, de l’ordre de 3 729 milliards de F Cfa. Ces promesses ont été, pour la plupart, respectées. Car deux ans après cette rencontre, le Sénégal est à un taux de mobilisation de 3 077 milliards, grâce à la conclusion de 319 conventions. Selon Ousmane Sonko, ces conventions ne font qu’augmenter le taux d’endettement de notre pays. Il informe que la dette du Sénégal est à 54% en 2016. Même si elle reste toujours en deçà du seuil de l’Uemoa qui est de 70%, il trouve que cet endettement massif montre que le gouvernement de Macky Sall manque d’ambition. ‘’Le Sénégal n’a même pas entamé le 1/3 de ses mobilisations de ressources de financements internes’’, note le leader de Pastef.
Découverte de pétrole et de gaz
Ainsi, le Directeur exécutif de Enda Cacid conseille au président de la République ‘’d’améliorer la gouvernance économique’’, surtout avec les récentes découvertes de pétrole et de gaz. ‘’On a l’impression que ce qu’on a reproché à la gouvernance du président Abdoulaye Wade, notamment la gestion de Karim Wade, c’est un tel système qu’on est en train de voir. On voit une sorte de nébuleuse, de réseaux créés au cœur d’un pétrole qui n’est pas encore exploité’’, alerte M. Dièye. Il appelle le camp au pouvoir à démontrer de ‘’façon transparente’’ comment le pétrole qui a été découvert récemment est en train d’être organisé.
ALIOU NGAMBY NDIAYE