Dakar change de décor en 24 heures
Au centre ville, la circulation est d'une fluidité inhabituelle. Mais la sécurité des lieux est si intransigeante que les rares chauffeurs de transport sont obligés d'en payer le prix fort...
Dakar arbore un visage attrayant. De la Corniche à l’avenue Ponty, du Boulevard de la République à la Place de l’indépendance, les forces de sécurité y trouvent leur place. Non loin du Palais présidentiel, les portraits des Présidents Barack Obama et Macky Sall meublent le décor. A côté de chaque drapeau, des affiches sur les murs et poteaux attirent l’attention des passants. Tout le monde devine que le Sénégal reçoit un hôte de marque.
En plein centre ville, les piétons circulent librement, comme ils n'en ont pas toujours l'occasion. Sans embouteillages, ni klaxons, ni bruits de véhicules... La devanture de l’hôtel ‘’Café de Rome’’ est orpheline des taxis jaune-noir. Sur place, on vaque à ses occupations, sauf quelques curieux qui forment des groupes de deux à trois, sur l’allée qui mène au Palais où se signale un nouveau dispositif sécuritaire. Un agent de la sécurité de ‘’BSI sécurité’’, trouvé devant la porte d’entrée de son service, en est comblé. ‘’La vie est dure mais c’est acceptable, d’autant plus que notre invité fera un court séjour», avance-t-il. Ce qui le charme le plus, c'est le choix du Sénégal. ‘’Ça devrait être une fierté pour nous les citoyens, car c’est un grand succès pour notre pays que nous devrions même fêter.»
En attendant, l'agent veille sur la banque où les activités semblent au ralenti. ‘’En général, nous recevions 200 à 300 clients par jour, mais aujourd’hui (hier), nous en sommes à 100 clients seulement», dit-il pour confirmer l'impression. Mais Obama est indépassable. ‘’Cet homme n’est pas petit, nous devons l’accueillir avec une très grande sécurité», en dépit des répercussions attendues sur les entreprises des environs.
Place...indépendante
Les mesures de sécurité sont claires : aucun véhicule n’a le droit de stationner dans les parages de la place de l'indépendance, d'après l'arrêté du préfet de Dakar. Sur les deux voies parallèles, les policiers soignent la circulation, sans excès, sans faiblesse. Rien n’est négligé : avant même d’arriver devant les «feux rouges», un agent de police aide à dégager la piste. Les volontaires de la ville de Dakar, naguère très visibles et remuants, ont plus ou moins disparu. L'une d'entre eux explique : «Nous avons des relais, tout ce qu’on devait faire, les forces de l’ordre l’ont fait à notre place. Nous sommes ici pour les appuyer, nous pouvons dire que nous n’avons pas trop de boulot ces jours-ci», dit la jeune fille qui préfère garder l’anonymat...
Chauffeurs et clients se plaignent
Devant l’immeuble Axa Assurance, seuls les bus sont autorisés à se garer pour prendre des clients. Les ‘’taxis bokk‘’ (taxi en commun) qui ralliaient Rufisque, Keur Massar, Colobane, Liberté 6, Hlm et qui stationnaient à l’arrêt de la société Dakar Dem Dikk sont obligés de se rabattre sur la rue derrière l’immeuble pour prendre des passagers. Mais l'attente est longue, ce qui exaspère les chauffeurs de taxi, entre autres.
Sagement installé dans son véhicule, habillé en Lacoste jaune assorti d’un jean, Mame Balla crache sa vérité. ‘’La vie est dure et nous ne pouvons pas concevoir qu’on nous chasse partout ou nous allons», râle-t-il. «Personne ne nous donne à manger, nous travaillons pour subvenir à nos besoins», clame le chauffeur. Certains de ses collègues, découragés, ont préféré rentrer, bredouilles ou presque. Mais Modou Fall, lui, espère encore arrondir financièrement sa journée. ‘’Nous n’avons rien gagné aujourd’hui, alors que nous avons acheté du gasoil qui coûte excessivement cher», se lamente-t-il.