Les Nations unies s’opposent à toute idée de libération de Habré
![](https://enqueteplus.com/sites/default/files/styles/article-default/public/main/articles/39423726-33934813.jpg?itok=YzoomSwJ)
Le Comité des nations unies contre la torture s’oppose, dans une lettre adressée à l’Etat du Sénégal, contre toute velléité de libération de l’ancien président tchadien, Hissène Habré, condamné à perpétuité pour crime de guerre, crime contre l’humanité.
La libération agitée de l’ancien président tchadien Hissène Habré n’est pas du gout du Comité des nations unies contre la torture. Ce démembrement de l’Organisation des nations unies ne veut pas en entendre parler d’ailleurs. Dans une lettre adressée à l’Etat du Sénégal à cet effet, il s’oppose d’ores et déjà à toute idée de libération de l’ancien homme fort de Ndjamena, condamné à vie pour crime de guerre et crime contre l’humanité. En effet, près de deux mois après le remue-ménage médiatique sur l’état de santé de Hissène Habré qui serait incompatible avec son séjour carcéral, le Comité des nations unies contre la torture exige le maintien de l’ancien président tchadien en prison. En novembre dernier, ses avocats et son épouse ont alerté l’opinion publique sur son état de santé qui se serait détérioré, en raison d’une indifférence de l’administration pénitentiaire. Un fait que le Comité qualifie de ‘’campagne de pression pour obtenir sa libération’’, ajoutant que ‘’ces allégations ont été démenties par les autorités sénégalaises’’.
Dans la lettre adressée à l’Etat du Sénégal le 23 décembre dernier et rendue publique hier, le président du Comité des Nations unies contre la torture, Jens Modivig rappelle que ‘’la libération prématurée des auteurs des crimes internationaux les plus graves n'est pas conforme aux obligations de la Convention de l’Onu contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants’’. Il souligne par ailleurs que cette condamnation à perpétuité est prononcée par les Chambre africaines extraordinaires. De ce fait, le Sénégal ne peut décider de manière unilatérale de sa libération, parce que ‘’lié par la durée de la peine’’. Toujours en novembre 2019, le ministre de la Justice Malick Sall a reconnu le statut de Hissène Habré en affirmant qu’il ‘’n’était pas un détenu du Sénégal, mais celui de la communauté internationale’’.
Les victimes (7 396) des crimes de l’ancien président tchadien, de leur côté, demandent à Hissène Habré de payer les dommages et intérêts ordonnés par les Chambres africaines, d’un montant de 82 milliards de francs CFA. ‘’Des milliers de victimes de torture et des milliers de veuves et d’orphelins subissent toujours le traumatisme et les conséquences des crimes de Hissène Habré’’, a déclaré Souleymane Guengueng, un des fondateurs de l’Association des victimes. ‘’Avant que Habré demande de la clémence, il doit arrêter de cacher son argent et indemniser les victimes pour les souffrances que nous avons subies’’, fulmine-t-il.
En effet, Habré a été accusé par une Commission d’enquête tchadienne d’avoir vidé les caisses du Trésor public en 1990, avant de s’enfuir au Sénégal. A ce sujet, le Comité se dit à nouveau préoccupé par le fait que, jusqu’à présent, les victimes des crimes d’Hissène Habré n’aient pas été indemnisées. Le Comité des Nations unies contre la torture est composé de 10 experts élus par les 168 Etats membres qui ont ratifié la Convention contre la torture.
EMMANUELLA MARAME FAYE