Publié le 10 Dec 2015 - 02:31
DIALOGUE INTERRELIGIEUX

 Les jeunes invités à se prémunir contre les extrémismes.

 

La Fondation Konrad Adenauer (FKA) est en conclave pour deux jours sur ‘‘Jeunesse et religion’’.  Une occasion de cerner les contours de la problématique de l’extrémisme religieux dans un monde qui a besoin du vivre-ensemble.

 

Le contexte de terreur et les acteurs essentiellement jeunes qui sont les principaux exécutants d’actes extrémistes ne pouvaient pas échapper au laser de la 7ème édition du dialogue interreligieux. Cette rencontre annuelle à l’initiative de la FKA a réuni hier la nonciature apostolique, imams et oulémas du Sénégal, universitaires, ambassadeurs d’Israël et d’Allemagne, évêché de Thiès, familles confrériques, ainsi que le ministre de la Jeunesse pour aborder le lien étroit entre la jeunesse et la religion.

Pour Mame Mbaye Niang, il est question de ne céder aucun pouce à l’extrémisme islamiste surtout dans le contexte sénégalais. ‘‘L’extrémisme religieux est une plaie de notre époque, le marqueur d’un déclin culturel, un mal de notre religion qui nécessite une mobilisation de toutes nos énergies créatrices et une union de notre désir de paix et de concorde. Il gagne une partie des jeunes dans le monde et se nourrit de la précarité, du chômage, des inégalités, de la perte des repères et valeurs, de notre incapacité à porter un dialogue franc. C’est dans celle-ci que s’engouffrent les marchands de mort pour prendre des vies, détruire des familles et imposer la terreur.

De Paris à Bamako, la jeunesse est la première victime du terrorisme religieux’’, s’est-il offusqué. Un discours sensiblement pareil à celui du secrétaire général des imams et oulémas du Sénégal qui dénonce ‘‘une ombre, un monstre qui n’a de solidarité à distribuer que la mort’’. Ce qui inquiète avant tout, c’est cette volonté de transmission de la terreur qui porte de plus en plus les habits d’une délinquance juvénile nouvelle. ‘‘Les jeunes sont une proie facile pour les théoriciens de l’extrémisme religieux. Ce qui représente une réelle menace pour la paix et la cohésion sociale’’, se désole la représentante-résidente de la FKA, Andréa Kolb, qui propose que le jeune soit instruit des bases de sa religion et connaisse les autres pour éviter toute forme de dérives. 

Si l’ambassadeur de l’Allemagne a salué l’exemple du cas sénégalais dont pourrait s’inspirer bien des sociétés du monde, il s’est interrogé sur la résonance décroissante du discours positif des Écritures Saintes. ‘‘Toutes les religions doivent se poser la question : pourquoi le message de pardon, de tolérance, de l’engagement caritatif ont un écho qui va se diminuant ?’’ s’est étonné Bernhard Kampmann.

Voie intérieure

La moyenne d’âge jeune, 20 à 31 ans, des kamikazes qui ont récemment perpétré les attentats en France ou au Mali ainsi que les ‘‘foreign fighters’’, ceux qui quittent leurs pays pour intégrer les rangs de l’EI, interpellent le chargé d’affaires de la nonciature apostolique, le révérend père Sebastiano Sanna. ‘‘Pourquoi les jeunes sont si sensibles à l’appel du fondamentalisme religieux ? N’aiment-ils pas le dialogue, le vivre-ensemble, la paix ? Quel est l’idéal poursuivi par la jeunesse du Sénégal ? C’est en répondant à cette question que nous trouverons les modalités pour proposer une éducation pertinente et compréhensible.

On évitera ainsi que la tradition pacifique du pays soit présentée de façon tellement éloignée des aspirations personnelles qu’elle soit finalement perçue comme étrangère ou dépassée’’, propose-t-il. Pour lui, il suffit de chercher un juste milieu car il est hors de question d’ignorer ou de contrarier cette soif de Dieu. ‘‘Chaque jeune devrait être aidé à trouver à l’intérieur de lui-même, notamment dans sa dimension religieuse, les raisons du dialogue et de la rencontre avec les autres.’’

Pour le professeur de philosophie Ramatoulaye Diagne, c’est l’éducation des esprits qu’il faut promouvoir comme panacée à cette avancée extrémiste. ‘‘L’un des défis majeurs est le vivre-ensemble. Nous devenons chaque jour davantage plus sourds les uns aux autres. Nous le sommes au sein des familles. Qui n’entend plus la voix de son prochain n’entendra plus bientôt la voix de Dieu. C’est l’esprit des hommes qu’il faut instruire puisque guerres, replis identitaires, haines y prennent naissance. Tel est le rôle de l’enseignement et de l’éducation’’, conclut-elle au nom de Mary Teuw Niane empêché.

OUSMANE LAYE DIOP

 

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