Publié le 18 Oct 2019 - 20:29
EL HADJ MAMADOU DJITE, CHEF DE QUARTIER FANN HOCK

‘’J’ai été baptisé par Serigne Touba’’

 

Né le 15 janvier 1915, El Hadj Mamadou Djité a fêté ses 100 ans en 2015. Une longévité qu’il a héritée de sa mère et de son père morts respectivement à 115 et 110 ans. Toutefois, malgré cet âge avancé, le vieux Djité n’est pas encore à la retraite. Il consacre son temps à son atelier de menuiserie et à la lecture du Saint Coran. Baptisé par Cheikh Ahmadou Bamba, il continue, à 104 ans, d’honorer la devise du mouridisme ‘’Leggey, diamou Yallah’’. Ainsi, à l’occasion de ce 18 Safar, ‘’EnQuête’’ vous fait découvrir, à travers ce portrait, la riche histoire de cet homme devenu mouride dès le berceau.

 

Il fait partie des doyens des Sénégalais, en termes de longévité. A 104 ans, El Hadj Mamadou Djité n’a pourtant rien perdu de sa prestance. Dans son atelier de menuiserie installé devant sa maison à Fann Hock, le vieux Djité impressionne bon nombre de ses visiteurs par sa force et sa rigueur au travail, malgré son âge avancé. En cette matinée de mercredi 9 octobre, comme à l’accoutumée, il est assis sur sa chaise, en face de ses apprentis déjà à pied d’œuvre. En bon maitre, il ne tolère aucune erreur sur le travail. Après les salamalecs, il nous conduit dans son bureau pour l’entretien. A l’intérieur, la décoration de l’office renseigne aussitôt sur son appartenance religieuse. Des photos de Serigne Touba dominent le décor. Drapé dans un boubou bassin vert-clair, bonnet blanc sur sa tête, le crâne rasé, un peu voûté, le centenaire est d’une intelligence vive. Petit par la taille et par la forme, mais grand de l’esprit. Sa mémoire reste intacte.

Il raconte ainsi, pendant plus d’une heure, son parcours, son rôle de médiateur social en tant que chef de quartier, ses consécrations dans son métier de menuisier-ébéniste et surtout de la relation que ses parents entretenaient avec le fondateur du mouridisme.

En effet, l’on pourrait dire qu’il est devenu mouride dès le berceau. Ses parents étaient de fervents disciplines du fondateur du mouridisme. Sa mère faisait partie des premiers talibés qui ont initié des ‘’dahira’’ mourides à Dakar. Ce qui lui avait valu le surnom d’Adja Fatou Seck mouride. Quant à son père Pathé Djité, il partait de Ngaye Mékhé pour rendre visite, à pied, à Cheikh Ahmadou Bamba, en Mauritanie. Descendant de ces deux fervents mourides, El Hadj Mamadou Djité ne pouvait donc déroger à la règle confrérique.

Toutefois, ce qui le lie à Serigne Touba dépasse cet héritage familial. Le fruit du hasard y est aussi pour quelque chose. En effet, ‘’en 1915, alors que le fondateur du mouridisme revenait d’un voyage à Dahra Djolof avec ses disciples, il passa au village de Ngaye Djité pour voir ses talibés. Arrivé en fin de matinée, il rencontrait les notables du village au ’penc’. Présent sur place, mon père lui informa qu’il baptisait son fils ce jour. Le marabout a alors demandé qu’on lui emmène le bébé pour qu’il le baptise. C’est ainsi, de ce qu’on m’a raconté, que j’ai été baptisé par le marabout qui m’a donné le prénom de Mamadou’’, raconte le maitre menuisier avec fierté.

Ce privilège d’avoir été baptisé par Cheikh Ahmadou Bamba, le vieux Djité essaie de l’honorer, en consacrant toute sa vie à l’étude du Saint Coran et au travail, comme le veut la tradition mouride : ‘’Leggey, diamou Yalla.’’ Ainsi, c’est à l’âge de 19 ans qu’il a maitrisé le livre saint au ‘’daara’’ de Serigne Masseynou Guèye, à Diender où il partageait les cours avec des Mbacké et des Bousso, des petits-fils de Bamba. Après la maitrise du Coran, il rejoint Dakar où ses parents avaient déménagé après le retour de son père à la guerre 14-18.  

Sa maman, une grande amie de Serigne Modou Moustapha Mbacké, fonda le plus grand ‘’dahira’’ mouride de Dakar. ‘’A l’époque, il y avait deux ‘dahira’ mouride à Dakar. L’un était dirigé par ma maman Adja Fatou Seck mouride et l’autre par Serigne Birama Seck, qui habitait à la rue 22. Serigne Modou Moustapha Mbacké considère ma mère comme sa sœur. Ma maman faisait ainsi partie des femmes qui faisaient le linge pour Serigne Touba. D’ailleurs, le marabout lui avait un jour offert un tissu, une soie de couleur marron. Elle avait jalousement gardé le tissu en souvenir.  A sa mort, on en a pris pour la couvrir avant la toilette mortuaire. Jusqu’à présent, il y a un restant de ce tissu que je garde jalousement avec moi’’, raconte-t-il. 

Un régulateur social

Toutefois, malgré cette proximité avec le fondateur du mouridisme et de sa famille, au quartier de Fann Hock où est le délégué depuis plus de 20 ans, peu de gens sont au courant de cette histoire. C’est plutôt Pa Djité le centenaire et maitre menuisier que l’on connait. D’ailleurs, dans tout le quartier, étrangers comme résidents autochtones, quand on demande après un Djité, on indique aussitôt sa maison. Et si tout le monde maitrise plus son âge que sa riche histoire, c’est parce qu’à ses 100 ans, fêtés le 15 janvier 2015, tout le quartier s’était mobilisé pour lui rendre un vibrant hommage.  Hôteliers, notables et simples résidents s’étaient unis pour rendre un honneur mérité à celui qui, depuis plus 20 ans, dirige le quartier.  En plus d’y résider depuis 1935.

Cette longévité fait de lui un régulateur social incontesté. Il parvient ainsi à régler beaucoup de contentieux, avant qu’ils n’atterrissent à la justice et épargne, par la même occasion, bon nombre de ses administrés de la prison. C’est pourquoi dans le quartier, les témoignages à son égard sont unanimes. Pa Djité, comme on le surnomme affectueusement, est décrit comme quelqu’un de très pieux, généreux et respectueux de ses voisins, malgré son fort tempérament.

ABBA BA

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