Dakar, 15h45 : Wade : " Il y aura état d’urgence si..."
Abdoulaye Wade, candidat à sa réélection, a reçu le journal français JDD dans la nuit de vendredi à samedi à Dakar. Il ne doute pas de sa victoire. Extrait.
À 85 ans, vous briguez un troisième mandat. Celui de trop?
C’est l’Afrique, ça. Je suis âgé, certes, mais j’ai la forme physique. J’ai fait plus de 140 meetings et j’ai senti chez les jeunes une confiance et une adhésion. Mon âge est devenu un avantage. Je suis le président et le père de la nation. C’est ce que les Européens n’arrivent pas à se mettre en tête.
Des Sénégalais aussi disent que vous avez dépassé l’âge de la retraite…
Jamais un Sénégalais ne dira cela. Croyez-vous vraiment que si j’étais sénile, le peuple ne m’aurait pas fait comprendre qu’il était temps de partir? Ce n’est donc pas aux Européens de décider. Mais je sais que les Français et les Américains cherchent à m’embêter.
Vous répétez qu’il vous faut une victoire au premier tour. Auriez-vous peur d’un second tour?
Pas du tout. Par le passé, j’ai fait un deuxième tour contre Diouf et je l’ai battu. Mais, là, ce n’est pas possible. Ma majorité est si écrasante que je pense être élu avec un fort pourcentage dès le premier tour.
Craignez-vous des débordements?
Non, l’opposition est incapable d’organiser de telles choses. Une révolte des Sénégalais contre moi n’est pas pensable!
Envisagez-vous d’instaurer l’état d’urgence en cas de violences?
Il n’y aura pas d’état d’urgence, sauf si des mercenaires sortent dans la rue pour tirer sur les gens. À ce moment-là, je déclarerai l’état de siège. Mais cela n’arrivera pas.
Vous ne pouvez pas nier la contestation populaire, les six morts de ces dernières semaines…
Ces morts m’ont meurtri. Mais, au départ, ces manifestations, ce sont des jeunes qui protestent contre la grève de leurs professeurs. Ils sont manipulés par des politiciens machiavéliques qui n’oseront jamais mettre leurs propres enfants dans la rue.
Il n’y aurait pas de malaise social dans le pays?
Il n’y a pas de malaise social au Sénégal. Il y a eu des délestages électriques et c’est vrai que des gens sont descendus dans la rue. Or, ces problèmes je les ai hérités de mes prédécesseurs socialistes. À mon arrivée au pouvoir, les centrales étaient délabrées, j’ai réglé cette question.
Si vous gagnez au premier tour, êtes-vous prêt à travailler avec l’opposition du M23?
Je vais former un gouvernement de large union nationale où figureront ceux qui me soutiennent mais aussi des membres de l’opposition.
Y compris ceux qui demandent votre départ?
Ah non, ceux-là, je ne les prendrai pas. Je pardonne souvent mais pas cette fois-ci.