Mbappé à la conquête d’un nouveau monde
C’est la fin d’un feuilleton que l’on pensait éternel : Kylian Mbappé est officiellement un joueur du Real Madrid depuis ce lundi soir. En rejoignant le champion d’Europe en titre, un club plus puissant que lui, l’attaquant des Bleus s’offre (enfin) de nouveaux défis.
Après des années de rumeurs incessantes, de petites déclarations et d’un interminable feuilleton devenu plus pénible que passionnant, le conditionnel peut enfin être mis de côté pour conjuguer cette phrase au présent : Kylian Mbappé est un joueur du Real Madrid. Voilà, c’est fait, c’est bouclé et ce n’est même plus une surprise, tant le secret n’en était pas un ces derniers mois. Cette fois, l’attaquant français n’est pas resté sur le quai, grimpant dans le train merengue qui, paraît-il, ne passe qu’une fois, sauf quand il s’agit de mettre la main sur un joueur d’une autre trempe. Les meilleurs, ceux dont l’image dépasse le cadre du terrain, doivent passer par le plus grand club au monde, celui de Florentino Pérez. Le communiqué est tombé à 19h30, ce lundi soir, comme susurré par Mbappé à Emmanuel Macron, en visite à Clairefontaine plus tôt dans la journée. Il tient sur deux lignes : « Le Real Madrid et Kylian Mbappé ont trouvé un accord pour qu’il soit un joueur du Real pour les cinq prochaines années. » Un timing choisi par le club madrilène, moins de 48 heures après son 15e sacre en Ligue des champions, comme s’il fallait sans cesse qu’il ne rappelle sa grandeur et sa supériorité à tous les autres.
Le Real Madrid plus fort que Mbappé
Dans la capitale espagnole, où il aurait déjà trouvé sa maison luxueuse, Mbappé va découvrir un autre monde. Un autre club, surtout, dans lequel ce sera à lui de s’adapter plutôt que l’inverse. Le capitaine des Bleus avait peut-être besoin de ce changement et de ce nouveau défi pour donner un autre souffle à sa carrière, après des années passées à jouer au chat et à la souris avec le PSG, au point de laisser l’histoire entre les deux se terminer sur un divorce houleux. Mbappé va devoir adopter une mentalité différente, moins tournée vers lui et plus vers les autres, pour s’intégrer dans une institution (un mot pompeux qui a du sens quand on parle du Real Madrid) où un joueur qui ne la comprend pas ne peut pas pleinement réussir.
En arrivant avec l’étiquette de joueur le plus cher de l’histoire en 2009, Cristiano Ronaldo avait accepté de prendre le numéro 9 en attendant le départ de Raúl pour récupérer son 7 fétiche, comme Jude Bellingham n’a pas bronché en étant placé à un autre poste, un peu plus haut, par Carlo Ancelotti. Ce sera à Mbappé de faire des concessions, puis de faire ses preuves dans un club où ses accomplissements passés ne suffiront pas. Il lui faudra aussi se faire une place dans un vestiaire que l’on dit très sain, où il aura l’avantage de bien connaître quelques copains de sélection (Eduardo Camavinga, Aurélien Tchouaméni et Ferland Mendy). « Ils se rendent service l’un l’autre et s’apprécient sincèrement, racontait Ancelotti pour parler de son groupe après son nouveau triomphe européen. Je dirais simplement que le vestiaire actuel du Real Madrid est, certainement, le moins gangrené par l’ego de toute l’histoire du club. Tout part de là, de notre excellente vie de groupe. » Un équilibre que Mbappé ne devra pas perturber.
Quitter une zone de confort
Le rapport de force, s’il doit y en avoir un, est en faveur du Real Madrid, qui propose à Mbappé un cadre idéal pour faire passer sa carrière (en clubs) dans une autre dimension. L’attaquant, lui, n’aura pas grand-chose de nouveau à offrir à un club qui a remporté six des onze dernières éditions de la Ligue des champions. Il aura aussi du chemin à parcourir pour devenir une légende à un endroit où elles sont presque aussi nombreuses qu’au Panthéon, ou même une icône française en passant après des monuments comme Zinédine Zidane ou Karim Benzema, cinquième joueur le plus capé de l’histoire de la Casa Blanca (648 matchs, pour 354 buts et 165 passes décisives). Le premier était arrivé à 29 ans, avec sa double couronne de champion du monde et d’Europe ; le second avait débarqué à 22 ans comme une promesse, avant de partir en idole deux septennats plus tard. À 25 ans, Mbappé s’apprête à tourner une page pour en commencer une nouvelle.
Le challenge est excitant pour la très bonne raison que l’attaquant arrive avec une ribambelle de titres (16 entre Monaco et le PSG), des statistiques délirantes (283 buts et 124 offrandes en 368 rencontres), et l’image d’un joueur capable de planter un triplé en finale de la Coupe du monde, comme de s’imposer comme une marque en dehors des terrains, mais qu’il aura tout à prouver à Madrid. Dans une équipe championne d’Espagne, championne d’Europe, et dans laquelle Vinícius Júnior et Jude Bellingham ont déjà une place de choix.
Le mariage entre le Real Madrid et Kylian Mbappé devait être célébré un jour, c’est le sens de leur histoire et de celle de l’enfant de Bondy après lequel court le club madrilène depuis ses débuts, quand il avait eu le choix entre Paris et les Merengues. L’international tricolore quitte une zone de confort, la France, où il a tout gagné pendant plus de huit ans, où il a autant épaté qu’agacé son monde. En rejoignant l’Espagne, il fuit la routine et un championnat qui n’existe pas sur la scène européenne, avec quatre finales sur les 25 dernières années et aucun trophée, soit un de moins que la Grèce, les Pays-Bas ou la Turquie. Il suit des modèles, aussi. Les plus grands joueurs français de ce siècle – et même ceux d’avant, pour la plupart – ont traversé les frontières de l’Hexagone pour s’accomplir ailleurs et, souvent, conquérir les plus beaux trophées et les cœurs.
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