Joe Ouakam ressuscité
Il est décédé, il y a un peu plus d’un mois. Un premier grand hommage lui est rendu, à travers des installations, de la peinture, ‘’Alem, L’A-Venir’’ en somme. C’est le nom de l’exposition que reçoit actuellement la galerie Le Manège.
‘’Vous venez voir l’exposition ? Vous ne voulez pas qu’on vous accompagne ? Faites attention, le vieux est dans la salle’’. Ainsi taquinait l’une des personnes travaillant à la Galerie Le Manège de l’institut culturel français de Dakar. Ce sont les cimaises de cette dernière qui reçoivent, jusqu’en septembre prochain, une exposition hommage à Issa Samb dit Joe Ouakam.
Il avait parfaitement raison. Confortablement assis sur un tas de journaux rangé en forme de fauteuil, livre à la main gauche, lunettes bien vissées, hochant la tête, Joe Ouakam est là. Il trône au fond de la salle d’exposition. De loin, on croit vraiment que c’est Joe Ouakam qui est là. La sculpture semble tellement réelle. Le béret, le manteau, l’écharpe autour du coup, pantalon relevé, les éternelles ‘’bottes rangers’’, la moustache blanche, tout y est. Même sa philosophie est rappelée ici. Un texte de l’artiste est reproduit derrière en grandeur nature. Le titre résume la personnalité de l’homme : ‘’Xaliss du tuss’’. Du vrai Ramangelissa qui est installé dans sa cour, au cœur du laboratoire ‘’Agit’art’’.
En effet, c’est l’antre de l’artiste décédé qui est reproduit ici. On se croirait facilement au cœur du 17 rue Jules Ferry avec les lots de journaux jaunis rangés çà et là. Il ne manque que les vieux livres et la bibliothèque. Egalement, le vieux baobab qui détient sûrement tous les secrets du défunt n’y paraît pas. Mais cela ne change pas trop le décor. Les tableaux de Joe en noir et blanc avec du rouge ou d’autres couleurs vives comme le rose, le fait oublier aux visiteurs. Que dire de cette tête toute blanche avec une bouche rouge attachée à diverses cordes. Autant elle peut faire, autant elle peut fasciner et susciter des questionnements. A travers les peintures transparaît le caractère mystique de celui qui est célébré ici.
L’artiste, sous toutes les coutures
La mort, également, a sa place dans cette exposition. Elle est bien visible sur quelques œuvres. Ses convictions et ses amitiés sont partagées ici. Ainsi, est exhibée une invitation du cinéaste feu Djibril Diop Mambety à Joe Ouakam. Il tenait à ce qu’il voie les premiers rushs de ‘’Hyènes’’. L’hommage du maître de Bouna Médoune Sèye à Omar Blondin Diop fait partie des peintures exposées. Joe Ouakam, sous toutes les coutures. Ainsi, lui rendent hommage quelques-uns de ses ‘’héritiers’’ à travers cette exposition baptisée ‘’Alem, L’A-Venir’’.
‘’Alem, c’est une mappemonde, une nouvelle géographie du visible et de l’invisible dressée par Joe qui nous indique la voie d’un ailleurs, du A-Venir, d’une transmission, d’un après’’, explique les commissaires de l’exposition Delphine Calmette et Ican Ramageli. Elles précisent que ‘’comme une graine, l’exposition suivra un processus de croissance, une transformation permanente grâce à l’intervention d’artistes et d’amis du laboratoire’’. Il est difficile de croire qu’on peut mieux faire que ceux qui ont décidé de rendre hommage à Issa Samb Joe Ouakam à travers cette exposition ‘’Alem, L’A-Venir’’. Tout semble tellement parfait…
BIGUE BOB