Publié le 30 Sep 2012 - 16:15
FONCTIONNEMENT DES PARTIS POLITIQUES

Quand l’exception devient la règle

 

Au Sénégal, les partis politiques sont devenus un moyen d’accéder (vite) à des postes de responsabilité. Des leaders usent d’astuces pour rester à la tête de leur parti… Ad vitae aeternam

 

«Ce que l’on attendait, c’est qu’Ousmane Tanor respecte sa parole et annonce qu’il ne sera pas candidat pour diriger le Parti socialiste. Il s’était engagé à ça dans une interview de Jeune Afrique quelle que soit l’issue des élections.» Dans une interview accordée au journal EnQuête, Malick Noël Seck, leader de Convergence socialiste, a remis au goût du jour le débat sur la succession du secrétaire général du Parti socialiste. Selon lui, son parti «a perdu 75% de notre électorat en 12 ans».

 

Mais ce débat posé par Malick Noël Seck n’est que le symptôme d’une maladie qui touche quasiment toutes les formations politiques au Sénégal. Estimés à plus de 150, ces partis politiques sont comme une entreprise dont le fondateur se sert à sa guise pour arriver à ses fins. Ce type de management dit tropical a pour conséquences : immobilismes, frustrations, implosion. Le Parti socialiste qui est le seul parti à avoir survécu à son fondateur malgré les nombreux départs enregistrés (Moustapha Niasse, Djibo Kâ, Robert Sagna, Abdouharim Agne, Abdoulaye Moctar Diop), se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins. Car, l'échec de Tanor Dieng à la présidentielle de février 2012, contraint le PS à aller en congrès, une instance «suspendue à cause des deux rendez-vous électoraux».

 

Mais Cheikh Sèye, Secrétaire permanent du vieux parti senghorien, tempère les ardeurs. «Le processus de renouvellement se fait de manière normale, dit-il. A partir de demain (NDLR : aujourd’hui, voir page 3), le calendrier du PS va démarrer. Nous avons commencé la vente des cartes. Ensuite nous allons renouveler les comités, les sections, les coordinations, les mouvements affiliés». Une fois franchies ces étapes, poursuit-il, «le Comité central recevra les déclarations de candidature au poste de secrétaire général national». Chaque militant pourra alors postuler.

 

A l’Alliance des forces de progrès(AFP), la succession de Moustapha Niasse, le secrétaire général, n’est pas à l’ordre du jour. Candidat malheureux à la présidentielle dernière, le président de la Assemblée nationale (72 ans) qui avait déclaré ne plus se représenter à une élection présidentielle s’il n’était pas élu, n’est apparemment pas prêt de prendre sa retraite politique. Mais Malick Guèye, leader du Mouvement nationale des jeunesses progressistes (MNJP), soutient le contraire. «Lors du dernier congrès de l’Afp, rappelle-t-il, Moustapha Niasse avait demandé à son parti de lui proposer un jeune pour lui succéder». Même si aujourd’hui, «il n’y a pas de décision formelle», M. Guèye pense que la succession de Moustapha Niasse est «inévitable». «D’ici la présidentielle de 2017, on va choisir le candidat du parti».

 

«La succession de Niasse est inévitable»

 

Le Pr. Madior Diouf, lui ne compte pas rester jusqu’à cette date à la tête du Rassemblement national démocratique (RND). Il le dit sur un ton et avec des mots purement classiques. «Je suis tout à fait disposé à passer la main, dit-il. Mais c’est au parti d’en décider». Allié politique de Moustapha Niasse, l’ancien ministre de la Culture est à la tête du RND depuis Mathusalem jusqu'à l'explosion d'un conflit interne. Depuis, le RND est un parti a deux têtes, dont celle dirigée par le Dr. Dialo Diop, et les camps sont à couteaux tirés.

 

 

La Ligue démocratique (LD) semble loin de ces tumultes, mais la succession de son leader actuel, le Pr. Abdoulaye Bathily, reste d’actualité. Porté à la tête de la LDM/PT en 1984 en remplacement de Babacar Sané, l’actuel ministre d’Etat auprès du président de la République ne semble pas frappé par l’usure du pouvoir. Et cela est d'autant plus vrai que la LD est, avec le PIT, l'une des rares formations politiques qui lave son linge sale, s'il y en a, en interne. Ce qui ne surprend pas Nicolas Ndiaye, un de ses responsables. «Nos instances travaillent de manière démocratique. Nous tenons nos congrès tous les 4 ans. Si le parti pense qu’il faut changer de leader, ils vont décider».

 

Me Doudou Ndoye lui se veut nuancé. Dans une interview récente accordée à EnQuête, le leader l’Union pour la République (UPR) avait déclaré qu’il ne briguera plus la présidentielle à venir mais qu'il reste à la tête de son parti «pour accompagner les jeunes». Au PDS, un parti avec qui il avait fusionné avant de reprendre sa liberté, ce débat semble clôt avec le retrait annoncé de Me Wade de la scène politique... nationale. Toutefois, sa succession ne sera pas aisée au regard des ambitions affichées par les uns et les autres. Alioune Sow , ancien ministre, qui a crée le Mouvement des patriotes-Liguèye, annonce déjà la couleur. A une condition :«Si les commissaires sont choisi et non désigné par la base, je serai candidat.»

 

Les jeunes vieux

 

 

Mais, il n’y a pas que la direction de partis à être convoitée. Les instances de jeunes aiguisent aussi des appétits. Elles sont même sources d’affrontement du fait de son caractère stratégique. Les enjeux sont si grands que certaines formations politiques peinent à renouveler les instances de jeunes. C’est le cas des Jeunesses socialistes dont le leader, Barthélémy Dias, est frappé par la limite d’âge(35 ans). Ce que l’intéressé n’a pas nié non sans ajouter : «le Parti socialiste n’est pas un parti comme les autres. On se base sur des textes», déclare le député maire de Mermoz-Sacré-coeur.

 

Ceci est valable pour son collègue député, Abdou Mbow. Le coordonnateur des jeunesses républicaines (COJER) est également au-delà de ce qui est permis en terme d'ancienneté. A sa décharge, l’Alliance pour la République (APR) à laquelle il appartient fonctionne avec des structures provisoires, quatre ans après sa création. Une situation qui sera rectifiée sous peu, selon le député. «La décision a été prise de renouveler les structures de jeunes. J’ai fait ce que j’avais à faire, le moment est venu de passer la main.» Puis d’ajouter. «Je ne fais pas de fixation sur les postes. Mon objectif est de créer des structures solides».

 

DAOUDA GBAYA

 

 

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