Publié le 20 Sep 2015 - 23:55
L’ORCHESTRE DES AVEUGLES DE MOHAMED MOUFTAKIR

Une histoire entre un père et son fils

 

‘’L’orchestre des aveugles’’ est le deuxième long métrage du réalisateur marocain Mohamed Mouftakir. Comme le premier ‘’Pégase’’, il est une réussite et vaut à son auteur des prix dont le grand prix Ousmane Sembène de la 18e édition du festival de cinéma africain de Khouribga.

 

‘’Dans les premières années du règne de Hassan II, Houcine, fan de son nouveau roi, est le chef d’un orchestre populaire. Lui et sa femme, Halima, habitent dans la maison de famille de celle-ci, une maison animée, aux personnages hauts en couleurs qui vivent au rythme de l’orchestre et de ses danseuses traditionnelles, les Chikhates. Les musiciens-hommes de cet orchestre bien particulier sont parfois obligés de se faire passer pour des aveugles afin de pouvoir jouer dans les fêtes uniquement réservées aux femmes, organisées par des familles marocaines conservatrices. Houcine est également l’heureux père de Mimou. Il prend son rôle très à cœur et souhaite le meilleur pour son fils. Dès l’école primaire, il lui impose d’être le premier de sa classe. Mais Mimou va rapidement tomber amoureux de Chama, la nouvelle bonne de leur voisine, et pour ne pas décevoir son père, il va tricher en falsifiant son bulletin de notes’’. Ainsi, est libellé le synopsis du 18ème grand prix du festival de cinéma africain de Khouribga.

 ‘’L’orchestre des aveugles’’ de Mohamed Mouftakir a eu l’assentiment du jury qui l’a distingué. Cependant, ce que ne dit pas le synopsis est que Mimou ne fait pas que falsifier ses bulletins de notes. Il profitera d’une soirée hautement troublée pour passer la soirée avec sa belle princesse. Il l’embrassera même sur la bouche ce soir pas comme les autres. En effet, c’est ce jour que le Maroc a connu un terrible coup d’Etat. La fin de la monarchie est annoncée par les militaires, auteurs de cette forfaiture. Des rumeurs fusent de toutes parts et l’une d’entre elles dit que le roi est vivant et a la situation en main.

En outre, le film est bien construit dans la narration et l’auteur plonge son public dans un Maroc d’une autre époque. Même si lors du débat sur le film organisé au lendemain de sa projection à Khouribga, des critiques ont trouvé que certaines des tenues n’existaient pas à cette période-là. L’on note à travers des costumes une modernisation qui n’était pas à l’ère du Maroc des années 1970. Mouftakir avoue qu’il n’avait pas le choix dans certains des cas. Cependant, dans l’ensemble, ce film est celui qui a reçu le plus de critiques positives lors de son débat. Les cinéphiles et critiques semblent avoir pris du plaisir à le voir si l’on se fie aux différents discours tenus lors du débat sur le film.

Du drame il y a eu dans ‘’l’orchestre des aveugles’’ mais il y a eu aussi du rire à bien des moments. Aussi, tous ceux qui ont vu le film ont été conquis par le jeune Mimou. D’ailleurs le jury lui a accordé une mention spéciale pour sa brillante prestation. Son jeu a été orienté par son réalisateur qui l’a réussi parce que se voyant à la place de Mimou. Car comme il le dit lui-même concernant le film, "il s'agit d'une comédie sociale à 50% autobiographique’’. Il y voit sa relation avec son père  qui était un violoniste jusqu’au décès de ce dernier alors que Mouftakir avait 11 ans.  Et c’était plus pour raconter cette relation qu’il a fait ce film. C’est pourquoi le coup d’Etat en fond de toile n’est pas bien exploité ici. ‘’Je n’ai pas voulu raconter les années de plomb, c’est juste l’époque dans laquelle j’ai grandi. C’est plus un élément de narration qui m’a permis de raconter ma relation avec ma famille. Je ne cherchais pas à dénoncer une époque. C’est plutôt une réconciliation avec mon passé et une réflexion sur la société, sur la famille, sur ma culture et sur moi-même’’, confie-t-il.

Mohamed Mouftakir a plusieurs films à son actif et a reçu beaucoup de prix dans sa carrière. L’un de ses premiers courts-métrages, "Chant funèbre" (ndlr sorti en 2007) fut primé au festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO). En 2009, son premier long métrage "Pégase" fait parler de lui. Avec ‘’Pégase’’, il a décroché en 2000 l’étalon d’or de Yennenga au FESPACO. 

BIGUE BOB (ENVOYEE SPECIALE)

Section: