Ses 10 ans partagés entre le talent et le malheur
L'ancien capitaine de l'équipe nationale du Sénégal a très tôt vécu sa passion du football, au point de très tôt préférer les terrains vagues aux salles de classe.
Jules-François Bertrand Bocandé, décédé lundi à l'âge de 53 ans, a passé les premières années de son enfance au quartier Korentas (centre-ville de Ziguinchor). C’est à l’âge de 8 ans qu'il déménage avec sa maman pour aller s'installer au quartier de Néma, actuel Boucotte-Sud, à la Rue Insa Ndiaye. Depuis, il a évolué dans ce quartier. Il fréquenta l’école des Pères de Saint-Benoît de Néma. Mais le jeune «Fanfo» comme l’appellent ses intimes, avait très tôt un goût prononcé pour le football. Dès qu’il disposait d’une minute de liberté, il la consacrait au sport-roi. «A dix ans, il était déjà très talentueux», se souvient un voisin de la famille de Jules. C’est d’ailleurs cette passion pour le football qui a hypothéqué ses études. Au cycle primaire, il se consacrait presque totalement au football. Tout au début, Bocandé gardait les buts. Un jour, s’étant rendu compte que son latéral droit n’était pas à la hauteur, il décide d’occuper ce poste avant de se retrouver milieu de terrain où il évoluait à son arrivée au Casa-sport. Très tôt, il s’impose comme titulaire indiscutable et leader du club-fanion de Ziguinchor. Auparavant, en 1974, Bocandé «Essamay» (le Lion en diola) avait remporté le prix du meilleur jeune footballeur.
Le drame de ses 10 ans
Selon des témoignages recueillis auprès de ses amis d’enfance, Jules était généreux dans l’âme, il aimait partager et ne se ménageait pas dans l'effort : très endurant, il pouvait jouer tout un après-midi. Tout jeune, Bocandé «gueulait» lorsqu’il était mécontent. Il était à la fois craint et adoré de ses amis avec qui, et comme tous les enfants de sa génération, il allait souvent chaparder des mangues, oranges, mandarines et autres fruits dans le jardin de Paul Plouha, à l’actuel Cité Biagui sur la route de l’aéroport de Ziguinchor. Il aimait aussi, en compagnie d’amis, se baigner dans les marées ou rizières de Kantène à la périphérie de la capitale méridionale, au «Ciel Bleu», près de l’actuel Evêché de Ziguinchor ou encore à la «Poudrière», au quartier Goumel. Un jour, raconte son voisin Jean-Pierre Priera, un militaire à la retraite, par ailleurs grand frère d’un ami d’enfance de Bocandé, Gabriel Luciano Priera, directeur de Cabinet au ministère de la Jeunesse, un jeune garçon qui conduisait une mobylette, heurte leur grand-mère, à hauteur du stade Néma.
Bocandé et son grand frère «Poyo », qui sortaient du stade, tombent sur l’incident. Pris de panique, le jeune garçon tente de fuir mais très vite il est rattrapé et maîtrisé par Bocandé le temps que les parents de la grand-mère arrivent sur les lieux. Evacuée à l’hôpital, la grand-mère meurt suite à un traumatisme crânien. L’affaire atterrit en justice et Jules se constitua témoin. «Il avait seulement dix ans, c’était en 1968», se souvient encore Jean-Pierre Priera qui relève que Jules n’aimait pas l’injustice. Jean-Pierre Priera retient de lui le souvenir d'un «garçon très courtois et fidèle en amitié».
HUBERT SAGNA
(Correspondant, Ziguinchor)