Publié le 30 Dec 2024 - 20:45
MAISON DE FONCTION ASSEMBLÉE NATIONALE

Révélations sur un dossier sulfureux

 

C'est une affaire rocambolesque qui n'a pas encore livré tous ses secrets. À la suite de la révélation du Premier ministre Ousmane Sonko, lors de sa déclaration de politique générale devant les députés de l'Assemblée nationale, ‘’EnQuête’’ a essayé d'en savoir plus sur cette affaire aux allures d'un véritable scandale. 

 

Tout est parti de la déclaration du Premier ministre, lors de la déclaration de politique générale. Provocateur comme à son habitude, Ousmane Sonko a lâché la bombe qui n'a laissé personne indifférent. “Nous allons faire la lumière sur tous les dossiers. Par exemple, pour la vente d'immeubles relevant du patrimoine bâti, il faut nécessairement l'autorisation de l'Assemblée nationale. Mais ce n'est pas respecté. Aujourd'hui, savez-vous que la maison de fonction que devait occuper le président de l'Assemblée nationale a été vendue ? Elle a été vendue à trois cent millions F CFA, pour une maison de plus de 4 000 m2 sise à Fann. Voici ce qui s'est passé. Oui, nous voulons laisser les gens travailler, mais on ne peut le faire sans élucider certains dossiers”.

Cette version du Premier ministre a été battue en brèche par le député Abdou Mbow, ancien président du groupe parlementaire Benno Bokk Yaakaar, ancien vice-président de l'Assemblée nationale sous Moustapha Niasse. “La maison n'a pas été vendue à 300 millions comme l'a soutenu le Premier ministre Ousmane Sonko. Elle a plutôt été troquée par l'État qui voulait construire un lycée à Yoff. Il s'agit donc d'un échange avec un particulier qui a donné le terrain où est construit l'actuel lycée de Yoff. Quand le président Moustapha Niasse est arrivé, il a trouvé cette situation sur place. Il a alors saisi le président de la République Macky Sall et ce dernier a dit niet. Il s'est lui aussi totalement opposé à cette transaction, en disant que cette maison relève du patrimoine de l'État”, explique M. Mbow. 

À la question de savoir si la transaction a eu lieu sous Wade, il est un peu plus nuancé. “Je ne saurais répondre à cette question. Moi, je ne parle que de choses que je maitrise. Et ce que je peux assurer c'est quand le président Moustapha Niasse a saisi le président Macky Sall sur ce dossier qui était litigieux, le président Macky Sall n'était pas au courant et s'est montré contre une telle transaction”.

Le député nous apprend aussi que sous son magistère, Moustapha Niasse vivait dans sa résidence personnelle et que ce sont les gendarmes qui étaient chargés de sa sécurité qui occupaient la maison. 

Le secrétaire général de l'Assemblée nationale qui occupe la villa y a reçu avant-hier le Premier ministre

Une chose est sûre : c'est que Moustapha Niasse a été un fervent défenseur de cette maison de fonction qui a eu à accueillir plusieurs présidents de l'Assemblée nationale du Sénégal. Le dernier en date, qui a habité la maison, c'était Mamadou Seck, qui y organisait d'ailleurs souvent des cérémonies. Sous Niasse, comme l'a affirmé Abdou Mbow, la maison était laissée aux gardes du corps du président de l’Assemblée nationale. Nos sources confirment également qu'Amadou Mame Diop ne vivait pas non plus dans cette villa, qui était devenue la résidence du secrétaire général de l'institution, Amadou Thimbo. Interpellé, Amadou Mame Diop n'a pas voulu réagir à nos questions. 

Réagissant aux propos d'Abdou Mbow, Amadou Ba de Pastef a soutenu que ce dernier a donné une “version totalement biaisée”. À l'en croire, la transaction a bien été accomplie sous le régime du président Sall. Et la maison “grand luxe dont le prix estimatif était entre 6 et 8 milliards” a été troquée contre un terrain qui ne valait pas, selon lui, plus de 300 millions de francs. “Voilà le cadeau du régime Macky à un des grands protagonistes de l'affaire des 94 milliards”, peste-t-il sans donner de nom. 

La SCI Ding Ding accuse l'État d'occuper sans droit ni titre la maison qu'il lui avait louée

Selon certaines sources, la maison est toujours occupée par le secrétaire général de l'Assemblée nationale qui y aurait reçu, avant-hier, le Premier ministre. Ledit Sg est depuis longtemps harcelé par un huissier établi à Dakar qui est mandaté par la société civile immobilière Ding Ding, qui réclame la propriété de la villa. D'ailleurs, l'affaire est pendante devant la justice depuis plusieurs mois.

Dans un acte en date du 8 aout dernier, l’huissier susvisé sommait le président de l'Assemblée nationale de faire libérer les lieux qu'il accuse d'occuper sans droit ni titre la villa en question objet du titre foncier N 13 422/GR. “Il ne saurait ignorer ni disconvenir que la société requérante est propriétaire exclusive de l'immeuble objet dudit TF qu'elle avait mis à la disposition de l'État pour servir de logement de fonction au président de l'institution parlementaire, en vertu d'un accord synallagmatique”, écrivait le huissier dans l'acte de sommation. Selon lui, “l'État a manifestement enfreint en toute illégalité” cet accord. 

Il ressort de l'acte de sommation que “cette violation manifeste des termes du contrat a été sanctionnée par l'ordonnance rendue le 13 mai 2024 par le juge des référés du TGI de Dakar”.

Ce dernier, selon l’huissier, a ordonné à l'État du Sénégal “d'abord, de déterminer les conditions de l'échange portant, d'une part, sur les terrains objets des TF N 71DK et N 1633/DK et 1633/DK, en ses lots 6 et 7 lui appartenant ; d'autre part, sur la villa objet du TF 13 422/GR appartenant à la SCI Ding Ding ; et enfin de parfaire l'acte d'échange entre les parties et d'opérer les mutations des droits”.

Par un acte en date du 20 aout, l'officier de justice est revenu à la charge et a dressé un procès-verbal de remise des clés de ladite villa.  

Par Mor Amar 

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