Manifestations de mars 2021
Un an après les manifestations de mars 2021, dans l’affaire opposant Adji Sarr à Ousmane Sonko, le besoin de vérité et de justice reste ‘’urgent’’ pour les familles des 14 personnes tuées dont 12 à la suite de tirs par balles par les forces de défense et de sécurité, selon les organisations de droits de l’Homme. Dans un communiqué transmis hier, à EnQuête, Amnesty International, la Ligue sénégalaise des Droits de l’Homme (LSDH), et la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (RADDHO) lancent une campagne ‘’Ensemble, demandons justice pour les victimes de la répression violente des manifestations au Sénégal’’. “Il n’y a plus de temps à perdre.
La justice doit faire son travail en toute indépendance et rapidement pour établir les faits et les responsabilités et juger les éléments des forces de défense et de sécurité qui se sont rendus coupables d’utilisation excessive de la force et d’homicides illégaux”, déclare le directeur de la Section Amnesty International au Sénégal, Seydi Gassama. Lors des manifestations, souvent violentes, qui se sont déroulées du 3 au 8 mars 2021, 14 personnes ont été tuées dans les villes de Dakar, Bignona et à Diaobé. Parmi ces victimes, 12 ont été tués par balles par les forces de défense et de sécurité, dont certaines, au dos et au cou, dont 3 enfants âgés de 12, 16 et 17 ans. Près de 590 manifestants ont également été blessés au cours de ces 5 jours de manifestations dans plusieurs villes du pays.
... ‘’Les autorités sénégalaises doivent être transparentes sur l’évolution de l’enquête en cours, faire suite aux plaintes déposées par certaines familles de victimes et permettre aux victimes et familles de participer au processus judiciaire. L’impunité doit cesser pour l’usage excessif de la force au Sénégal, y compris l’usage illégal d’armes à feu’’, ajoute le Secrétaire général de la RADDHO, Sadikh Niass. Parmi les victimes, soulignent les défenseurs des droits de l’homme, Cheikh Wade, un tailleur de 32 ans, a été tué par balle aux Parcelles Assainies, par les forces de l’ordre.
La vidéo de sa mort a largement fait le tour des réseaux sociaux et des médias au Sénégal et dans le monde. Sur la vidéo authentifiée par Amnesty International, on peut voir un agent de Police viser et tirer sur Cheikh Wade. Une voiture de police vient ensuite au niveau du corps, puis le dépasse, sans lui porter secours. La famille de Cheikh a porté plainte devant la Cour d’Appel de Dakar et le dossier n’a, à ce jour, connu aucune suite. Sa famille attend toujours que justice soit rendue. ‘’Tout ce que nous voulons, ce sont des réponses sur la cause de la mort de mon frère. Nous voulons que justice soit faite pour lui et les autres victimes, et connaitre les raisons pour lesquelles la police lui a tiré dessus’’, affirme le frère de Cheikh Wade, Abdoulaye Wade, dans le texte.
...L’impunité pour les cas d’usage excessif de la force contre des manifestants risque de ‘’faire souche’’, selon les défenseurs des droits de l’homme, si les responsabilités ‘’ne sont pas établies’’ pour les manifestations de mars 2021 et que les réparations aux familles et la garantie de non-répétition ne sont pas garanties.
‘’Les autorités sénégalaises doivent garantir que les forces de défense et de sécurité respectent et protègent le droit à la vie et le droit à la réunion pacifique de la population sénégalaise en conformité avec les Lignes directrices de la Commission Africaine des droits de l’Homme et des Peuples pour le maintien de l’ordre par les agents chargés de l’application des lois, lors des réunions en Afrique. Lors de manifestations, celles-ci ne doivent avoir recours à la force que de manière exceptionnelle et proportionnée, et en particulier ne doivent avoir recours à l’utilisation d’armes à feu que lorsqu’il y a danger imminent pour leur vie ou la vie d’autrui’’, lit-on dans le communiqué. La même source, rappelle que toute violation par un membre des forces de défense ou de sécurité doit faire l’objet d’enquêtes, de poursuites et doit être punie.
‘’La liberté de réunion pacifique est clairement garantie par la constitution et le droit international. Les forces de sécurité et de défense doivent respecter et faciliter l’exercice de ce droit par la population’’, souligne la directrice d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre Samira Daoud. ‘’Les autorités judiciaires doivent diligenter l’enquête sur les violations commises par les forces de défense ou de sécurité durant les manifestations pour qu’elle arrive à son terme le plus rapidement possible, que les responsabilités soient clairement établies, et que des réparations soient envisagées pour les familles éplorées’’, ajoute le président de la LSDH, Alassane Seck.