Publié le 19 Sep 2015 - 03:54
MOMAR DIENG DIOP, PRESIDENT DE L’ASSOCIATION DES SENEGALAIS EN ESPAGNE

« On constate des cas de vol, d’agression par des personnes de nationalité sénégalaise »

 

Le Président de l’Association des Sénégalais en Espagne invoque le comportement des Sénégalais pour expliquer les meurtres répétés dont ils sont victimes. Selon lui, la fierté d’être sénégalais s’est réduit au plus bas niveau. Il a aussi relevé la politisation des dossiers à la fois par les autorités consulaires et les associations.

 

Depuis quelques années, on assiste à une série de meurtres de Sénégalais à l’extérieur. Comment expliquez-vous cela ?

On constate effectivement une recrudescence de Sénégalais morts en terre étrangère. La dernière en date est celui de Lamine Senghor mortellement poignardé. Il y a un phénomène, il ne faut pas qu’on se voile la face. Je dis toujours que lorsqu’on est dans un pays, on doit respecter les lois et règlements en vigueur, participer à l’effort de développement et travailler de la manière la plus saine. Pour le cas de l’Espagne que je maîtrise très bien, en 2006, si nous faisons une rétrospective des évènements, il y a eu les pirogues avec l’émigration, je ne dirais pas clandestine, mais irrégulière. Beaucoup sont venus par voie maritime. Il y a des bons, mais il y a aussi des personnes mauvaises.

Si le Sénégal avait une très bonne presse en Espagne, aujourd’hui la fierté d’être sénégalais s’est réduite au plus bas niveau, pour la bonne et simple raison qu’on constate des cas de vol, d’agression par des personnes de nationalité sénégalaise. Certes il est vrai que souvent, lorsque la police interpelle une personne, elle dit : ‘’Je suis sénégalais.’’ Et il a le passeport et la carte d’identité sénégalais, parce que nos documents ne sont pas sécurisés. Ce qui fait que tout le monde est sénégalais. Il est vrai que l’Etat est en train de faire des pas importants dans le sens de corriger.

Mais le problème, c’est qu’il y a beaucoup de Sénégalais qui sont tués sans qu’il y ait une suite judiciaire. C’est déplorable et c’est lamentable. Si le Ministère des Affaires étrangères avait fait son travail, on n’en serait pas là. On ne sait pas encore combien il y a de Sénégalais en Espagne, aux Etats-Unis, en France. Il faut d’abord une base de données pour connaître le nombre de Sénégalais à prendre en charge pour mettre en place des mécanismes de prise en charge de la sécurité des Sénégalais à l’étranger.    

Il n’y a pas donc une prise en charge de la question par l’Etat du Sénégal ?

C’est une coquille vide. On a mis le ministère des Affaires étrangères, le secrétariat d’Etat aux Sénégalais de l’extérieur et la direction des Sénégalais de l’extérieur. C’est une cacophonie dans la gestion des Sénégalais de l’extérieur. L’Etat du Sénégal a échoué dans sa politique migratoire. Il y a problème. Pourquoi le mutisme de nos autorités lorsqu’il y a mort d’homme ? Si c’était un Français ou un Américain, le Président lui-même allait monter au créneau pour dénoncer la situation. Mais nous, nous nous sommes dans le fatalisme. On dit toujours ‘’Yàllà mooko dogal’’ (c’est la volonté de Dieu). C’est vrai, mais nous devons sentir nos autorités derrière nous pour nous appuyer. Mais ce n’est pas le cas. Aujourd’hui, le Sénégalais à l’extérieur est vulnérable.

M. Sory Kaba disait que les dossiers judiciaires deviennent une affaire privée, dès l’instant que les familles acceptent de se constituer partie civile…

Je regrette. Je pense que nous sommes des Sénégalais à part entière, et nous sommes dans un Etat de droit. Et sous ce rapport, je pense que la responsabilité première incombe à nos autorités de s’autosaisir pour régler les problèmes des Sénégalais. Il y a certes la famille, mais il y a aussi la diplomatie, les autorités. Sinon ce serait l’anarchie. S’il y a problème, nous devons sentir nos autorités pour nous sentir en sécurité. Alors que le problème des Sénégalais est le cadet des soucis de nos autorités.  

Il est possible aussi que les autorités réagissent par voie diplomatique, sans que vous soyez au courant. N’est-ce pas ?

Non ! Non ! Franchement non !  Dernièrement, le consul a été hué. Cette réaction de nos compatriotes est une illustration parfaite du malaise qui couve au département des Sénégalais de l’extérieur. Par exemple, le consul du Sénégal à Madrid était bien parti pour faire du résultat, mais aujourd’hui il a déçu. Il était le seul consul qui n’avait pas besoin de faire une étude de terrain, parce qu’il n’était pas en terrain inconnu.   

A quel niveau pèche-t-il ?

Il confond la politique et la République. Il est vrai qu’en ma qualité de président d’association ou de fédération, lorsque je le saisis souvent, il règle les problèmes. Ça, je dois à la vérité de le dire. Lors de la venue du président de la République, il m’a privé de parole pour des raisons purement subjectives. Je demande que les capacités du consulat soient renforcées pour lui permettre de remplir sa mission de manière beaucoup plus efficace. Le consulat du Sénégal a un mal : il s’appelle Violetta Paloma. Il est le centre de gravité de tout ce qui se passe dans le consulat. Et pourtant nous avons Ndèye Marème Diallo qui a les mêmes diplômes, les mêmes aptitudes et les mêmes compétences, et qui est reléguée au second plan. Est-ce que vous verrez un Sénégalais au cœur de l’ambassade d’Espagne au Sénégal. Non, nous sommes toujours relégué au second plan, c’est le personnel subalterne.

Quelle est la nature des relations entre les associations d’une part et le ministère et le consul d’autre part ?

Depuis 2010, on a eu à rencontrer plusieurs ministres des affaires étrangères, mais de tous les ministres, seul Alioune Badara Cissé était à nos côtés. Il était très réceptif et très ouvert. Pour le consulat, c’est quelqu’un qui veut bien faire, mais il doit privilégier la République au détriment de la politique. Ce qu’il a eu à faire, c’est une politique pure et dure. Et je crois qu’on doit se départir de la politique pour travailler pour l’intérêt général de la communauté.

Vous avez parlé du gouvernement, mais vous, en tant qu’association, qu’avez-vous fait pour la protection et la promotion des Sénégalais ?

En 2010, nous avons dit que nous devons nous parler, en créant une fédération des associations. La fédération est arrivée à terme et j’en profite pour solliciter une audience auprès du président de la République, parce que c’est un relais entre la tutelle et la communauté. Souvent on fait des réunions de sensibilisation, d’information, parce que tous les Sénégalais ne sont pas des intellectuels. Mais je dois reconnaître que les associations sont en crise, la capacité de manœuvre est très réduite

Ce sont des divisions politiques ?

Oui ! Par moments, c’est le cas. Souvent quand un ministre vient, on privilégie la politique. Donc si la fédération a les moyens, on pourrait servir d’appoint au consulat.

Ce que vous êtes en train de dire, c’est que si les Sénégalais ont du mal à se faire assister, c’est parce que les dossiers sont politisés à la fois par les autorités et les associations.

Affirmatif !

En cas de décès, on entend souvent les émigrés demander l’aide de l’Etat. Y a-t-il une difficulté dans le rapatriement ?

Le rapatriement des corps est un véritable casse-tête. Si nous avons un cas de décès, il faut amasser au moins 4 millions. Et aujourd’hui, ce n’est pas vraiment chose facile, compte tenu de la crise. Aujourd’hui les collectes ont montré que les capacités financières de nos compatriotes sont carrément réduites. Il urge de mettre sur pied des structures opérationnelles pour rapatrier en cas de décès. Nous ne pouvons pas tout attendre de l’Etat, il faut trouver donc des alternatives en mettant sur place des mutuelles.

Il y a un fonds d’appui des Sénégalais de l’extérieur. Est-ce que les émigrés se reconnaissent dans ce fonds ?

Lorsque le Président est venu, il a eu à aider à hauteur de 152 000 euros. C’est une goutte d’eau dans la mer. Dans le cas de l’Espagne, ce n’est pas le fonds, mais c’est une subvention du Président pour les Sénégalais de la diaspora, mais ça a été pour les Sénégalais de l’Apr. Je le dis et si quelqu’un me traduit en justice, je suis prêt à le démontrer. Je pense qu’il faut donner plus de moyens et de capacités et se situer hors des contingences politiques. Dans ce cas, le fonds peut aider parce que le retour est dans l’agenda des émigrés. L’Europe n’est plus l’Eldorado. 

BABACAR WILLANE

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