Mon analyse sur Trump et ses tarifs douaniers

Trump est dans une logique de guerre économique qui a comme finalité : déstabiliser les équilibres commerciaux mondiaux d’un côté et, d’un autre, relancer son économie, pousser à la délocalisation sur son sol et donc attirer les entreprises aux USA pour booster l’économie, l’emploi, la balance commerciale.
Son instrument stratégique est les droits de douane.
Quelques éléments d’analyse me semblent bien l’illustrer :
A) Déstabilisation des autres pays : Ses récents droits de douane élevés (par exemple, 34 % sur la Chine ou 46 % sur le Vietnam) augmentent brutalement le coût des exportations vers le marché américain, crucial pour de nombreuses économies de ces pays-là. Cela fragilise les industries exportatrices étrangères, notamment dans des pays dépendants comme le Vietnam (20 % de son PIB lié aux exportations vers les États-Unis) ou l’Allemagne (automobile). C’est une approche déstabilisante poussant au compromis stratégique de l’adversaire.
B) Incitation à la délocalisation : En parallèle, Trump a renforcé les incitations fiscales domestiques dès mars 2025, avec des réductions d’impôts pour les entreprises qui produisent aux États-Unis (taux d’imposition des sociétés abaissé à 15 % pour les relocalisations). Les surtaxes rendent les importations moins compétitives, poussant des multinationales – comme les fabricants asiatiques de semi-conducteurs (TSMC, etc.), les constructeurs automobiles européens – à envisager de déplacer leurs usines aux États-Unis pour contourner les droits et profiter des avantages fiscaux. Si jamais ça marche, c’est un souffle pour son économie. Cela pourrait aider à relancer ses exportations et donc sa balance commerciale par la réindustrialisation.
C) Forcer la négociation : Les taux de droits de douane punitifs agissent comme un levier diplomatique. Celui qui riposte sera encore plus taxé, d’après Trump. D’ailleurs, déjà, plus de 50 pays, dont l’Inde (25 % de taxes) et le Japon (16 %), ont entamé des pourparlers pour obtenir des exemptions ou des accords bilatéraux. Trump utilise cette pression pour exiger des concessions : ouverture des marchés étrangers aux produits américains, réduction de leurs propres barrières ou achats massifs (ex. : soja, énergie). C’est donc une stratégie agressive de « America First » qui instrumentalise la taxation pour renverser les rapports de force économiques, en matière de guerre économique. D'ailleurs depuis hier il a annoncé la suspension de l'application des nouveaux tarifs douaniers pour 90 jours, histoire de voir où vont mener les négociations avec les pays concernés sauf évidemment la Chine.
D) Dimension psychologique et pari stratégique : Trump joue aussi sur une projection de force et de contrôle. Par exemple, entre 2018 et 2019, ses tarifs sur la Chine ont réduit le déficit commercial américain avec ce pays (passant de 419 milliards de dollars en 2018 à 345 milliards en 2019 selon les données du Census Bureau), mais sans provoquer un retour massif d’usines aux États-Unis. En 2025, avec des taux encore plus élevés (34 % sur la Chine contre 25 % maximum en 2019), il mise sur un effet amplifié : si les autres pays cèdent sous la pression, il redéfinit les échanges mondiaux en sa faveur ; s’ils résistent ou s’unissent, comme lors des contre-mesures chinoises de 2019 (taxes sur 60 milliards de dollars de biens américains), l’effet pourrait s’émousser. C’est un pari risqué, mais cohérent avec son approche.
Cependant, y’a des conséquences non négligeables en matière de risques : inflation interne (hausse des prix des biens importés), représailles (l’UE, Chine, etc. préparent des contre-taxes sur le bourbon et les motos américaines) et perturbation des chaînes d’approvisionnement mondiales avec des impacts sur l’inflation dans d’autres pays dépendants des pays taxés.
En somme, il déstabilise les adversaires, les pousse à la négociation urgente pour redéfinir les règles du jeu économique des échanges mondiaux en sa faveur dans une logique de relancer l’économie américaine et, in fine, sa puissance.
Cette situation témoigne du niveau d'agressivité des compétitions stratégiques et les rapports de force géopolitique à l'échelle mondiale
Boubacar DIALLO