Nuru Kane, Nouvel album, Exile
Sénégalais globe-trotter, artiste discret et très attaché au sens qu’il donne à sa démarche au-delà de la musique, Nuru Kane sort son troisième album baptisé Exile dans lequel il met encore davantage en pratique le rapprochement des cultures sans aucune aliénation.
Le mode de vie sédentaire n’est pas fait pour Nuru Kane. Le chanteur sénégalais, arrivé en France en 1998, est plutôt un adepte de l’incessante vadrouille. Il était ici, à Londres ; on l’a vu là, en Auvergne ; il passera là-bas, aux Pays-Bas... Cette itinérance est moins dans ses gênes que dans sa tête : au fond, il n’est question que de liberté, et de la façon dont le chanteur trentenaire entend la vivre.
Que son troisième CD s’intitule Exile n’est pas seulement une référence à cette situation vécue par tant d’Africains poussés à partir loin de chez eux pour des raisons économiques, même si les violons joués sur la chanson-titre dégagent un parfum de nostalgie. Nuru Kane donne à ce concept un contenu plus politique, pensant à ces grands hommes qui ont défendu des causes et ont été contraints de se couper des leurs. Et de citer le Dalaï Lama, Cheikh Amadou Bamba, ou même Nelson Mandela.
L’exil, enfin, se trouve parfois en fermant les yeux au détour d’une chanson. Pour faire naître ce "monde en couleurs", Nuru pratique sans retenue le mélange des cultures. Son groupe Bayefall Gnawa en est l’un des reflets : ses membres viennent du Maroc, du Mali, d’Algérie, de France…
Le patchwork se décline aussi en onze titres, composés pour une bonne moitié par son complice de longue date, Thierry Fournel. Bambala prend la direction de l’Afrique du Nord des Gnawa : le guembri – instrument fétiche du Sénégalais –pose le cadre, dessine ses motifs et petit à petit accélère la cadence que suivent les voix, les battements de main et les karkabou. Ambiance plus blues pour Niang Balo. Direction l’Espagne avec Coriendo et ses sonorités festives. Issoire, en hommage à cette ville où il est officiellement domicilié, est un reggae parfaitement exécuté comme Nuru en jouait à ses débuts dans son pays natal.
Lui qui appelle son continent à l’unité dans Afrika a su justement transcender les différences entre tous ces genres musicaux qui l’influencent pour donner à l’ensemble une cohérence, une identité. A l’instinct, sans calcul, et avec la volonté de montrer l’exemple, il prouve que changer les choses reste possible. Son message se résume en une chanson, où son patronyme se mêle au slogan du candidat Obama : Yes We Kane.
RFI