L’universitaire Awa Thiam perce le mystère
‘’La sexualité féminine africaine en mutation. L’exemple du Sénégal’’. C’est le titre du nouvel ouvrage de la responsable du laboratoire d’anthropologie culturelle de l’Institut fondamental d’Afrique noire Cheikh Anta Diop (Ifan Cad), Mme Awa Thiam. Un ouvrage qui marque au point la ‘’reproduction sociale du côté des femmes, par le biais de marquage du corps, des scarifications, des mutilations sexuelles féminines, de l’habillement, de la coiffure, de la contraception, de l’avortement et de la sexualité féminine.
Après son dernier livre intitulé ‘’vous avez dit la parité’’, l’universitaire Mme Awa Thiam vient de publier un ouvrage qui met en lumière les maux qui entravent une sexualité épanouie de la femme sénégalaise, en dépit des mutations sociales. Et la cérémonie de dédicace qui s’est tenue à la librairie Harmattan a servi d’opportunité à des universitaires pour saluer l’éthique du travail de l’ancienne directrice du Centre national d’assistance et de formation des femmes (Cenaf) et des Centres départementaux d’assistance et de formation des femmes (Cedef). ‘’Une femme remarquable à tout point de vue’’ avec un cursus assez fourni.
Si l’ouvrage ne révèle pas, comme le fait penser le titre, le vécu sexuel des femmes ou de la sexualité à proprement parler, il offre une panoplie de pistes qui puissent circonscrire un mal qui ronge des femmes astreintes à des coutumes qui visent ‘’à l’origine la préservation de leur identité culturelle. Mais qui au finish, bafouent leur droit à une vie sereine et épanouie’’.
A travers une enquête approfondie menée de 1975 à nos jours, dans les 14 régions du Sénégal, ‘’ l’ouvrage propose une analyse extrêmement pointue de la situation. L’auteur montre que même si nous sommes dans un monde qui bouge, la société continue à reproduire certaines inégalités sociales. Ainsi, selon le sociologue M Abdou Salam Fall, cette démarche de l’anthropologue rend visibles les maux féminins de la sexualité et ‘’montre aussi comment les mutilations sexuelles contribuent au processus de socialisation du corps féminin.’’.
D’autres révélations sont contenues dans l’ouvrage. Dans ce sillage, Mme Awa Thiam de souligner que ‘’les mutilations se font dans la majorité des ethnies exception faite des Bambara et Diola, conservatrices, dans une discrétion qui tranche avec les festivités qui les entouraient par le passé.
De l’avis de la géographe, Mme Khadiata Fall, l’exigence à l’éthique du travail et le courage de l’anthropologue doivent servir d’exemple. ‘’Awa Thiam est une des pionnières de la lutte contre les violences faites aux femmes. Elle doit inspirer d’autres, car dans nos sociétés africaines, l’initiative ne vient jamais de nous. Nous portons les stigmates de la colonisation, il faut que cela cesse. En s’engageant dans le refus de la fatalité, Mme Awa Thiam montre l’exemple’’, a-t-elle dit.
Dans cette optique, l’islamologue Abdoul Aiz Kébé a magnifié ‘’cette lumière des intellectuels qui permet d’apporter toujours des éclairages et d’éveiller des consciences’’.
L’ouvrage, édité par l’Harmattan, est préfacé par l’économiste Amadou Aly Dieng.
Matel BOCOUM