Le Sénégal perd un Guéléwar
L'artiste comédien Thierno Ndiaye Doss qui a fait les beaux jours du cinéma africain et du théâtre sénégalais ne jouera plus. Il a été emporté, hier, par un cancer. Thierno Ndiaye Doss en Boubou blanc aux côtés du ministre Youssou Ndour, en mai dernier, lors du Fest’rire 2012
PAPE FAYE, PRÉSIDENT (ARCOTS DAKAR)
“Il avait une présence de jeu naturelle”
“Thierno Ndiaye Doss était un de nos icônes. Nous avons perdu un monument du théâtre et du cinéma. Il a su diriger l’Association des artistes comédiens du théâtre sénégalais (Arcots) avec caractère. On a joué ensemble dans différentes pièces dont Le choix de Madior ou encore Nder en flammes. Il y a eu des affinités entre nous, des complicités. Sa voix expliquait tout sur scène. Il avait une présence de jeu naturel. Il était multidimensionnelle et travaillait avec une
simplicité extraordinaire. Il se donnait corps et âme à son métier”.
GUEDEL MBODJI,
PROMOTEUR DU FEST’RIRE
“Il tenait à l’unité des artistes”
“Ce ne sont les artistes qui ont perdu aujourd’hui. Ndiaye Doss était un grand ami. Il était très simple. Il m’a fait découvrir énormément de choses dans la vie. Il était un monu- ment de la culture. Une icône du théâtre et du cinéma. Il tenait à l’unité des artistes. Nous avons monté l'Arcots ensemble. Il a réussi la communion et l’entente. On passait nos week-ends
ensemble à Kaolack, y aller était un retour aux sources pour lui. Le Fest’rire était une fierté personnelle. Il me disait qu’il était content, avec moi, d’avoir fait de Kaolack une capitale culturelle. Il était respectueux et respectable”.
MAKHÈTE DIALLO, CAMERAMAN
“C’était une école”
“Thierno Ndiaye était un homme complet qui avait le cinéma dans le commun chez tous ceux qui ont côtoyé l'artiste comédien, Thierno Ndiaye Doss décédé, à 72 ans, hier, juste avant 14h, chez lui à Kaolack où il a été inhumé ce jour même. sang. Il était un bras droit de Sembène. Il est un des grands pionniers et porte étendards du cinéma africain voire mondial. On l’a vu sur pas mal
d’écrans. Il complétait les castings. Sembéne était rigoureux dans le travail et ne choisissait pas n’importe qui pour être à ses côtés. Le cinéma c’est une équipe de complices, il faisait partie des complices de Sembène. Il a tout donné au cinéma. Ndiaye aurait aimé voir le cinéma africain, et particulièrement sénégalais, sur tous les écrans. Je l’ai vu dans un viseur et il occupait tota-
lement l’image, il s’accaparait du scénario et extérioriser l’âme d’un film. Il était mathématique. C’était une école. Je suis très surpris par son décès.” Selon son fils Ousmane Ndiaye, joint
au téléphone, hier, Thierno Ndiaye est tombé gravement malade depuis quelques mois, et s'était retiré dans sa ville natale avec sa famille. Il a été emporté par cancer et repose désormais au cimetière musulman de Léona, a confié Ousmane Ndiaye. Le talentueux interprète du film culte Guéléwar du défunt cinéaste sénégalais, Ousmane Sembène, était apparu affaibli début mai 2012 à la dixième édition du Festival du théâtre et du rire de Kaolack mais semblait aller mieux. Thierno Ndiaye Doss a malgré tout tenu à être aux côtés de ses collègues comédiens à l’occasion de la cérémonie de lancement officiel de cet événement. Drapé d’un ensemble basin blanc, il avait été très applaudi ce jour-là. “Il faisait ses adieux. Il a tenu à serrer la main à tout le monde ce jour là. Il a parlé aux comédiens, aux journalistes et même aux institutionnels. Il s’est déplacé du salon de la maison à la tente pour saluer le ministre de la Culture, Youssou Ndour”, se souvient Gué-
“J’ai prié pour lui hier matin. . .” “Je refuse de pleurer sa mort. Je ne le pleure pas je l’envie. Car si c’est faire du bien qui doit nous mener au paradis, je suis sûr qu’il est au paradis. Il n’y avait pas plus généreux que lui, il nous donnait à manger tout le temps. J’ai prié pour lui ce matin (hier) afin qu’il guérisse.”
TA MARIAMA, VOISINE À LA MÉDINA
“Il payait mes factures d’électricité depuis les années 70”
“Il était généreux et très serviable envers tous. Il est venu habiter à la Médina en 1950. Il nous considérait comme ses propres enfants. Il nous soutenait sur tous les plans. Quand je suis venue loger à la Médina, je cherchais un abonnement pour l’électricité. Il m’a dit : “Ne cherches plus. Je vais payer ta facture pendant toute la durée de ma vie.” C'est qu’il a fait, depuis que je suis là, c’est lui qui paie mes factures d’électricité, et cela date des années 1970”.
B. BOB