Dur, dur d’être conducteur de ''pousse-pousse''
S’il y a un métier bien difficile à exercer, en ce mois du Ramadan, c’est bien celui de conducteur de ''pousse-pousse''. Le travail demande de la force, une bonne résistance, et nourrit à peine son homme. EnQuête est allé vers cette frange pourtant incontournable du commerce, au marché Thiaroye.
Il fait déjà chaud, en cette matinée du septième jour du Ramadan. Au marché de Thiaroye, il y a déjà foule. L'étroitesse des allées, les concerts de klaxons, les appels incessants des apprentis chauffeurs à la recherche de clients renforcent cette impression de chaos qui se dégage des lieux. Le stationnement anarchique des cars rapides et bus n'arrange rien. Piétons et marchands ambulants se disputent ce qui reste des trottoirs.
Le légendaire marché accueille ses habitués. Parmi ceux-ci les conducteurs de ''pousse-pousse'', incontournables dans ce haut lieu du commerce de la banlieue dakaroise. 6 d'entre eux devisent, à l'écart, en langue peulh. Ils sont les auxiliaires indispensables des clients qui viennent s'approvisionner surtout en denrées de première nécessité et en légumes. Leurs engins de fortune leur permettent de parcourir de grandes distances avec de lourdes charges.
''Nous utilisons nos propres techniques pour nous en sortir''
Toutefois, la particularité des conducteurs de pousse-pousse de ce marché est qu'ils sont presque tous des étrangers. Difficile de discuter avec eux, à cause de la barrière linguistique. Ils baragouinent le wolof et ne parlent pas un traitre mot de français. Abdoulaye Soumah, dans un wolof débrouillé, accepte de se prononcer. Pour ce Guinéen de 22 ans, conduire un ‘’pousse-pousse’’ en cette période relève d’un parcourt du combattant. ''Notre travail est difficile, même en dehors du ramadan. Donc, imaginez lorsqu'on jeûne !'' ''Nous utilisons nos propres techniques pour nous en sortir'', confie-t-il en souriant. Ses forces commencent à décliner dés le début de l'après-midi. S’il continue à s’activer dans ce travail, c’est parce qu’il ne trouve pas autre chose. Le jeune homme doit composer avec la crise. ''Les clients, dit-il, se comptent sur le bout des doigts. Depuis le début, je peine à avoir 1 500 F Cfa par jour. Mais, heureusement qu'on est épargné des frais du petit-déjeuner et du repas de midi''. Il a foulé le sol sénégalais, pour la première fois, il y a plus de 2 ans.
''Certains peinent à 'descendre' avec 500 F Cfa''
Entre deux livraisons de marchandises, Mamadou Aliou Bâ accepte de se confier sur son gagne-pain. Il se veut optimiste. ''Ça marche à pas de canard. On ne fait pas beaucoup de va-et-vient en ce mois, car la vie est difficile partout. Mais après le Ramadan, la situation reviendra à la normale. C’est difficile, mais on va s’accrocher'', déclare le jeune homme suant à grosses gouttes. À quelques encablures de la police de Thiaroye se trouve un autre groupe de conducteurs. ''Il fait une chaleur torride et souvent, le client demande de faire un long trajet, sans y mettre le prix. Dans ces cas, le retour est infernal. C’est la raison pour laquelle, pendant le ramadan, on s’assoit ici en groupe jusqu'à vers 16h, pour ensuite aller dormir'', déclare Saliou Bah. Leur groupe est constitué de 9 individus dont certains peinent à gagner 500 F Cfa en fin de journée, alors qu’il y a parmi eux des pères de famille.