Publié le 20 Dec 2019 - 21:02
RAPPEL A DIEU DU PERE GAETANO DE SANCTIS

Les ‘’fous’’ perdent leur prêtre 

 

Le révérend père Gaetano De Sanctis, qui prenait bien soin des malades mentaux de Thiès, entre 1980 et 1989, a été rappelé auprès de son Seigneur le mercredi 11 et inhumé le vendredi 13 décembre 2019, en Italie. L’initiateur du pèlerinage des malades de Popenguine ‘’abandonne’’ à jamais ‘’ses enfants’’ avec lesquels il avait fini de tisser une complicité énorme.

 

‘’Je suis heureux de m’adresser à vous. Je salue tous ceux qui me connaissent. Je vous garde dans mon cœur et dans mes prières. Que le Seigneur soit toujours avec vous. Qu’il vous bénisse et vous accorde la paix et un avenir meilleur. Je salue les malades. Je salue les confrères que j’ai connus et avec qui j’ai travaillé. Que la Sainte Vierge demeure toujours en vous et vous protège’’. Ces mots sont du père Gaetano De Sanctis.

Dans cette vidéo datée du mois de juillet dernier, le révérend père s’adressait à ses ‘’compatriotes’’ thiessois pour la dernière fois. Car, cette voix célèbre qui s’élevait et raisonnait tout le temps et en tout lieu dans la ville de Thiès, pour défendre les malades mentaux, s’est éteinte à jamais. Le ‘’prêtre des fous’’, comme l’appelaient affectueusement certains Thiessois, a quitté ce bas monde, le mercredi 11 décembre 2019, en Italie.

Dans cette ville, tout le monde ou presque retient de l’homme d’église l’amour qu’il portait aux malades mentaux. Épaulé par une équipe de jeunes Thiessois très dynamiques, père Gaetano trouvait dans les rues des ‘’fous’’, leur donnait à manger du matin au soir et s’occupait aussi de leur santé. Prêtre italien et membre de la congrégation Saint Camille de Lellis (Italie), le père Gaetano De Sanctis a vécu dans la ville du président-poète Léopold Sédar Senghor pendant neuf ans. Après Thiès, il est passé par les paroisses Marie-Reine de l’Univers, Sainte Anne…

Initiateur du pèlerinage des malades qui a lieu chaque année au mois de février à Popenguine et grand artisan de la mise sur pied du centre de santé mentale Dalaal Xel de Thiès, le ‘’prêtre des fous’’ avait, dit-on, le sens de la pastorale et portait dans son cœur les déficients mentaux.

Fidèle accompagnateur du père dans toutes ses œuvres et ses neuf années passées à Thiès, Gustave Gaye retient toujours les qualités intrinsèques de l’homme d’église. Il le peint comme un homme ‘’très pieux’’, qui avait une ‘’confiance inouïe en la providence divine’’ et avait un ‘’courage impossible’’. Un homme qui, ajoute-t-il, s’est battu corps et âme pour la cause des malades mentaux. ‘’A Thiès, les gens se rappellent encore et se rappelleront toujours du père Gaetano. Nous organisions et servions les repas tous les jours, en passant dans toutes les rues de Thiès où nous trouvions ces malades mentaux qui n’avaient pas de domicile. Je me rappelle encore de la familiarité qu’il y avait entre ces malades et le père. Quand le père devait voyager, malgré lui, nous avions des vélos où nous chargions des marmites pour faire ce service avec l’élan de jeunesse que nous avions à l’époque’’, se remémore, le cœur plein de tristesse, le natif de Mont-Rolland.

Gardien des aumôneries des hôpitaux

Mieux, Gustave Gaye rappelle qu’à chaque fois que certains malades le désiraient, ils les emmenaient au centre de Peycouck, dans la commune de Fandène, pour les laver, les habiller et les restaurer. Ainsi, le père Gaetano De Sanctis ne s’occupait pas uniquement des malades mentaux. Il avait fait de l’amour du prochain son véritable sacerdoce, confie à ‘’EnQuête’’ son ‘’fils’’ adoptif qui a failli devenir prêtre. ‘’Le père Gaetano a assuré aussi l’aumônerie des hôpitaux, notamment celui du Xe, le pavillon des tuberculeux où il était le dernier à quitter. Nous servions ces malades atteints d’une maladie très contagieuse. Avec lui, nous avions bravé ce risque et soigné beaucoup parmi eux. Il a assuré également l’aumônerie de la Maison d’arrêt et de correction de Thiès où il a accompagné, avec une grande discrétion, les détenus. Il avait beaucoup appuyé le révérend abbé Diamacoune Senghor, quand il était à la prison de Thiès’’, relate Gustave Gaye.

Aussi, celui qui a quitté Thiès depuis 30 ans, a réussi à porter la capitale du Rail et ses habitants dans son cœur. De loin, dit-on, il ne cessait de prendre les nouvelles de Thiès et de tous les malades.

‘’Père des fous’’, Gaetano De Sanctis qui s’est consacré aussi à la formation des jeunes prêtres, en tant que directeur spirituel au moyen séminaire, a définitivement mis fin à son compagnonnage avec ses patients de longue date qui, désormais, sont orphelins. 

GAUSTIN DIATTA (THIES)

 

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